Intervention de Jean-Yves Caullet

Réunion du 18 mai 2016 à 16h30
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Caullet, rapporteur :

Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre exposé liminaire qui montre bien que tout en étant le plus rigoureux possible avec les outils que l'on a, une alerte peut être utile puisque les contrôles que vous avez diligentés ont fait apparaître des manquements, même s'ils ne sont pas généralisés. Cela veut dire que, dans ce domaine comme dans d'autres, il faut une constance dans le contrôle. Toute habitude occasionne forcément une dérive vers un laisser-aller plutôt que vers une plus grande rigueur. La confiance n'exclut pas le contrôle ; elle s'en nourrit, et c'est très vrai pour ce domaine.

Je veux vous interroger sur les abattoirs de proximité. Moins on est proche, plus on est grand, plus on a des économies d'échelle, plus on peut investir ; mais plus la distance de transport des animaux s'allonge et plus les problèmes liés au transport augmentent. Ne peut-on imaginer des temps de transport maximum qui pourraient, s'ils étaient dépassés, obliger à organiser des temps de repos avant d'entrer dans la chaîne d'abattage pour ne pas multiplier les stress lors de la montée dans le camion, pendant le transport, lors de la descente du camion, à la menée à l'abattoir ? Ne pourrait-on pas normaliser un tant soit peu les choses pour éviter ce conflit entre la distance et la maltraitance ?

Vous avez dit ne pas être opposé, sur le principe, à l'installation de caméras de vidéosurveillance. Pensez-vous qu'il serait possible que cet outil soit, non à la main de l'employeur mais à celle de l'État ? Ce serait en fait un inspecteur virtuel qui pourrait se déclencher à la volonté de l'État ou à celle du responsable bien-être animal qui aurait la possibilité de faire une sorte de reporting grandeur réelle, quitte à faire de la pédagogie interne ensuite. Ces caméras peuvent-elles permettre de faire autre chose que de surveiller le salarié ?

Vous avez parlé de transparence. Il n'est pas sain qu'une société refuse de porter un regard sur un maillon essentiel de sa chaîne alimentaire. Il existe, pour certaines installations classées, des commissions locales composées d'élus, d'associations, de responsables, qui discutent une ou deux fois par an de ce qui se passe avec l'exploitant. Cette piste vous paraît-elle intéressante sur le plan de la transparence ?

Les contrôles sont de la responsabilité de l'État. La démarche de certification par les distributeurs qui voudraient pouvoir garantir aux consommateurs qu'ils leur fournissent des produits tout à fait conformes vous semble-t-elle être une piste intéressante ?

Je ne reviendrai pas sur les échanges qui ont eu lieu sur la question de l'abattage rituel ; nous aurons l'occasion de l'approfondir. Le sacrificateur doit répondre de sa qualité rituelle et être agréé par l'autorité publique en termes de compétences ; or rien ne me semble vraiment clair en ce qui concerne sa relation avec l'exploitant de l'abattoir. Les responsables d'abattoir que nous avons auditionnés nous ont dit qu'ils n'avaient aucun regard ni aucune autorité sur ces gens qui, bien entendu, sont certifiés. Ils viennent avec leurs outils. Dans l'abattoir que nous avons visité, nous avons vu un autre système : le sacrificateur est agréé par les autorités publiques et par les autorités religieuses, mais il est aussi salarié de l'établissement. Ainsi, ses outils sont entretenus et aiguisés sous la responsabilité de l'établissement, et il doit se conformer aux règles de sécurité et aux cadences de l'établissement. Ne pourrait-on pas redonner à ces sacrificateurs un lien plus direct avec l'établissement dans lequel ils exercent, indépendamment des certificats qu'ils doivent avoir par ailleurs, pour éviter un peu d'amateurisme ou d'irresponsabilité ? On ne peut pas dire, d'un côté, que le directeur est responsable et, de l'autre, laisser entendre que certains agents agissant dans l'abattoir ne seraient pas en lien direct avec le responsable.

Enfin, tous les investissements qui permettront de réduire la pénibilité dans les abattoirs et les troubles musculosquelettiques seront évidemment les bienvenus. Mais ne pourrait-on pas mener une réflexion sur les exosquelettes qui permettent, dans certaines entreprises, grâce à un bras robotisé, de limiter l'effort de l'homme tout en gardant la maîtrise des gestes ? Cette piste pourrait permettre un meilleur contrôle de soi et éviter des carrières trop brisantes pour les personnels, qui du reste vont rarement dans le sens du bien-être animal.

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