Intervention de Stéphane le Foll

Réunion du 18 mai 2016 à 16h30
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt :

Monsieur le rapporteur, vous m'interrogez sur l'exosquelette. Il ne faudrait pas que le rapport à l'animal soit complètement perdu à cause d'un système qui deviendrait intégralement technologique. Il ne faut pas oublier la sensibilité des femmes et des hommes qui, même si certains peuvent la contester, permet ce rapport à l'animal. Je suis favorable à la mise en place de systèmes de découpe qui allègent les efforts des salariés. Du reste, ces systèmes existent déjà. Il faudrait engager une concertation entre tous ceux qui innovent dans ces domaines et FranceAgriMer afin de regarder ce qui est fait et où cela nous mène.

Les sacrificateurs sont toujours sous la responsabilité de l'exploitant. Soyons clairs : l'exploitant est responsable de ce qui se passe dans son abattoir. Peut-être peut-on réfléchir à un salariat, sachant que l'agrément est donné aux sacrificateurs par les instances religieuses. Ira-t-on jusqu'à dire que les outils qu'ils utilisent sont sous la responsabilité de l'abattoir ? Voilà une question à laquelle il va falloir répondre. Je n'y suis pas du tout opposé.

La question des abattoirs de proximité a été reposée. Il y a aujourd'hui en France 259 abattoirs. Est-ce trop ou pas assez ? Je crois qu'y en a suffisamment. C'est un débat de fond. Suffit-il de limiter le transport et de multiplier le nombre d'abattoirs pour diminuer la souffrance animale. Je dis non. L'expérience montre clairement que cela ne marche pas. Il est plus facile, si je puis dire, d'améliorer les conditions de transport des animaux, pour éviter leur stress durant l'embarquement, la contention, le trajet. N'oublions pas, je le redis, qu'un abattoir est en endroit où un animal arrive vivant et où il doit être abattu, tué et découpé. Sans oublier ce qu'on appelle le cinquième quartier : une partie du chiffre d'affaires des abattoirs se fait sur la peau des animaux. Autrement dit, il faut dépiauter… Et il suffirait de mettre des abattoirs mobiles dans des camions, qui se baladeront à travers la campagne des camions pour abattre des animaux un peu partout ? Et vous me parlez d'empreinte carbone ? J'aimerais qu'on fasse le calcul… Et pour ce qui est de la souffrance, je suis sûr de mon fait : je préfère avoir 259 établissements contrôlés, dans lesquels on peut investir pour améliorer le bien-être animal, plutôt que de disséminer des abattoirs partout au nom de la proximité. Et après ? Il y aura d'autres ministres après moi qui se feront eux aussi alpaguer… N'oublions jamais qu'abattre un animal exige ensuite de le découper et de le transformer. Je voudrais bien voir comment les choses se passent exactement dans les pays européens où l'abattage mobile existe. N'oublions pas enfin les conditions sanitaires : il ne s'agit pas de mettre sur le marché de la viande qui ne répondrait pas aux normes sanitaires. Je suis bien placé pour savoir que la question sanitaire renvoie à des enjeux colossaux en termes de qualité, de microbiologie, d'agents pathogènes : je vous rappelle qu'il a fallu récemment faire le vide sanitaire pendant un à deux mois dans dix-sept départements avant de remettre en production des canetons. Il y va de ma responsabilité de ministre.

Voilà pourquoi, je l'ai dit au Sénat, je ne suis pas favorable à la multiplication des abattoirs, au nom de la proximité, car on risque de se mettre dans des situations où on aura de plus de plus de mal à lutter contre la souffrance animale. Il faut d'abord gérer les sites d'abattage existants. Des élus m'appellent tous les jours. On me demande de rouvrir l'abattoir de Mauléon. Je comprends l'enjeu : c'est un abattoir territorialisé, de proximité mais qui a rencontré les problèmes que l'on sait.

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