Intervention de Stéphane le Foll

Réunion du 18 mai 2016 à 16h30
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Stéphane le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt :

Certes. Mais est-ce à dire qu'il y aurait, d'un côté, ceux qui mangent de la viande et qui ne seraient pas sensibles à la question de la souffrance animale, et de l'autre, ceux qui, en cessant d'en consommer, règlent le problème ? Beaucoup d'associations considèrent qu'il faut arrêter de manger de la viande. Je respecte totalement ce point de vue, mais je maintiens que la stratégie sur le bien-être animal est indépendante du choix qu'on peut faire, en tant que consommateur, de manger ou non de la viande. C'est pour moi clair et net. Et je ne vais pas, dans ce débat philosophique, me mettre dans la posture de celui qui doit choisir : chaque individu est responsable de ses choix de consommation. Notre responsabilité, c'est d'assurer le bien-être des animaux, car il n'y a aucune raison de les faire souffrir. Manger ou non de la viande est un vrai sujet. Mais le jour où l'on ne mangera plus de viande, il n'y aura plus d'animaux domestiques élevés dans de grands pays comme le nôtre ; il faut que chacun en ait conscience. Les animaux, quand on les voit dans les champs, c'est joli, c'est mignon… Et après, on voit des barquettes.

Moi qui suis issu du monde rural, je me souviens que dans les fermes, tout le monde voyait tuer un animal ; tout le monde participait à la tuée du cochon. Et les poules, les lapins… Et l'on savait parfaitement ce que devenait l'animal après avoir été tué : le lapin du pâté, la poule autre chose ; quant au cochon, je ne vous rappelle pas la fameuse formule… Il y avait un rapport direct. Or nos sociétés urbaines se sont coupées de cette réalité ; une « boîte noire » a été mise entre l'animal que l'on voit dans les champs et le steak haché que l'on mange. Certains enfants ne savent même pas que le lait qu'ils voient dans la brique vient d'une vache. C'est un vrai sujet : il va falloir réfléchir à la manière de faire redécouvrir aux gens ce qu'est la réalité des choses. J'en ai parfaitement conscience en tant que ministre et ancien enfant des fermes. Un steak, cela vient d'un animal, une côte de porc provient d'un cochon. Mais à cause de l'urbanisation et de l'industrialisation de l'alimentation, les gens ne le savent plus, ne le voient pas, quelquefois ne veulent pas le savoir. Je vous indique, au passage, que nous sommes l'un des derniers pays d'Europe à manger du poulet rôti servi à table. Dans les autres pays, le poulet n'est plus consommé entier et rôti mais en morceaux : du coup, on ne mange plus un poulet, mais des nuggets par exemple. L'urbanisation de la société et l'industrialisation ont été à l'origine de la disparition de certaines réalités qui interpellent lorsqu'elles refont surface. Le ministre que je suis n'est pas responsable de tout, mais il doit mettre en place les outils qui s'imposent.

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