Madame la présidente, je ne peux que souscrire à votre propos : il faut faire attention où nous nous engageons sur le plan des concepts et où cela peut nous conduire. Cela dit, nous avons signé et ratifié la convention OCDE dont une annexe indique que « la compétence territoriale devrait être interprétée largement, de façon qu'un large rattachement matériel à l'acte de corruption ne soit pas exigé ». Donc on a souscrit à ce genre d'interprétation.
Le problème est que les Américains ont une véritable politique juridictionnelle. Ils ne sont pas mécontents non plus, Pierre Lellouche l'a souligné, de mettre de temps en temps des concurrents en position difficile et ensuite certaines sociétés passent sous contrôle américain… De plus, le problème de l'exterritorialité des lois américaines ne concerne pas uniquement la corruption, il y a aussi la question des embargos, domaine où les États-Unis vont beaucoup trop loin en arguant du « rattachement » au territoire américain de toutes les transactions en dollars. Lors d'un voyage, j'ai d'ailleurs vu qu'il y a aussi des interrogations au Congrès sur la compatibilité de cette politique juridictionnelle extérieure des États-Unis avec les principes généraux du droit international et sur les risques de conflits de souveraineté et de crises diplomatiques. Cela dit, l'Union européenne a la même tendance à l'extraterritorialité s'agissant des abus de position dominante. Il faudrait être plus prudent.
Je veux aussi soulever le problème des « moniteurs » imposés aux entreprises françaises suite aux affaires de corruption. Ce type de transmissions d'information devrait relever de la coopération judiciaire. Cette pratique pourrait être contestée devant les juridictions car il s'agit de mesures d'exécution, sur le territoire français ! Cela va beaucoup trop loin, il faut mettre des limites.