Intervention de Arnaud Richard

Séance en hémicycle du 25 mai 2016 à 15h00
Débat sur la mise en oeuvre du plan juncker de soutien à l'investissement au sein de l'union européenne

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Richard :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, après les mesures adoptées depuis 2008 par l’Union européenne pour assainir les marchés et résoudre – du moins l’espérons-nous – la crise des dettes souveraines, le plan Junker constitue, selon son initiateur, la troisième pièce du puzzle : il doit générer une sorte d’effet de levier pour relancer l’investissement, dont le niveau, en 2014, était encore inférieur de 15 % à celui atteint en 2007.

Relancer l’investissement, c’est évidemment « revitaminer » la croissance en Europe. Mais les moyens pour le faire ne sont pas si nombreux, compte tenu notamment, à l’échelle nationale, entre autres, de la nécessaire maîtrise des dettes publiques et de la fragilité des balances commerciales.

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, porte peut-être, depuis juillet dernier, une partie de la solution – en espérant qu’il ne s’agisse pas d’un expédient. Concrètement, le fonds qui a été ouvert pourra, bien sûr, prêter plus que le montant de son capital, son niveau de fonds propres – 21 milliards d’euros – étant relativement faible : l’espoir est de lever, grâce à l’effet de levier, 315 milliards d’euros sur trois ans, aussi bien pour les infrastructures, à hauteur de 240 milliards d’euros, que pour le financement des PME.

Derrière un montage financier qui pourrait paraître intenable au néophyte – d’aucuns ont dit « surréaliste », ce qui me paraît excessif, les résultats déjà obtenus en témoignent –, l’idée est assez simple. En cette période de dépression économique rampante, il est impératif d’ériger une rampe de lancement de la confiance, autrement dit de donner des gages aux prêteurs afin qu’ils s’engagent résolument dans le sillage de l’Union.

Un an à peine après sa mise en oeuvre, le plan paraît donner quelques motifs de satisfaction – cela doit être salué car, dans notre pays, ils ne sont pas si nombreux. Treize projets européens ont été sélectionnés par la BEI en 2015 et quinze bénéficient du le FEIS.

La force de ce plan réside dans la création d’un élan de confiance que seule une institution aussi puissant que la BEI peut insuffler, dès lors que les banques dites « commerciales » hésitent parfois encore. Forte de son étendard frappé d’un « triple A », la BEI est incontestablement une candidate crédible à la levée de financements annexes.

Comme j’ai pu l’écrire, avec l’excellent Razzy Hammadi, dans le rapport d’information qu’a bien voulu citer Pierre Lequiller, l’analyse est fiable, la mécanique rodée et la dynamique probable. Nous nous engageons donc dans le sens souhaité d’une relance de la croissance européenne.

Certes, rien n’est jamais sûr, mais cela ne doit pas nous conduire à ajouter de l’incertitude à l’incertitude. Or il semble bien que le plan Juncker souffre, monsieur le secrétaire d’État, d’un déficit de communication et de pédagogie. Sans que l’on y prenne garde, s’est immiscé, ici ou là, le soupçon d’un tour de passe-passe créateur d’un écran de fumée – il est vrai que ce gouvernement nous y a habitués… Alors que la confiance entre nos concitoyens et les institutions européennes, hélas, se délite, que les populismes s’emparent de leurs incertitudes et de leur manque de connaissance pour nourrir la suspicion, et que le Gouvernement se voit de plus en plus fragilisé, la communication était l’outil politique le plus important à mettre en oeuvre ; c’était un impératif démocratique et moral.

La colère peut également naître dans d’autres pays européens, qui auraient des raisons légitimes de craindre de possibles effets pervers de ce plan, dont les principaux bénéficiaires sont incontestablement les grands États membres. Les États que l’on pourrait qualifier de plus fragiles sont malheureusement les plus absents des projets financés. Nous sommes là, monsieur le secrétaire d’État, face à une problématique très sérieuse : dans la course européenne à la croissance, le moindre doute sur la solidarité entre les membres de l’équipe européenne serait désastreux. L’idée qu’il existe une équipe de tête d’un côté et le peloton de l’autre ne doit pas subsister. Il faut donc encourager immédiatement l’ensemble des plus petits pays membres à proposer des projets. Voilà un message que l’UDI vous propose de porter.

Je veux enfin appeler l’attention de la représentation nationale sur l’avenir du plan, qui arrivera à échéance en juillet 2018. D’après les dernières estimations, 50 % des 315 milliards d’euros seraient alloués d’ici à la fin de 2016 : c’est une bonne nouvelle ; au-delà de la volonté ainsi exprimée par l’Union, nous espérons tous qu’elle aura un effet sur l’engagement de l’ensemble des financeurs européens.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion