Je souhaite tout d'abord remercier les deux intervenants. Certes, nous n'utilisons pas les mêmes mots, mais j'ai trouvé vos propositions extrêmement intéressantes – notamment celle visant à nous guérir de cette crampe mentale consistant à toujours tout ramener à la compétitivité.
Vous avez rappelé les fondamentaux : l'exigence de l'investissement, qui concerne non seulement les machines et l'immobilier, mais aussi les nouvelles technologies, la recherche, le développement, la formation, et celle d'une efficacité que je lierais pour ma part à l'évolution des modes de production et à une forme de planification écologique aujourd'hui indispensable. Mais ces exigences se heurtent à l'obstacle du niveau de rentabilité financière actuellement exigé, ce qui a trois conséquences : l'écart entre le taux de croissance et le taux de rentabilité ; le décalage entre l'horizon de l'investissement et la tyrannie du court terme ; le fossé entre l'industrie, qui exige des investissements à long terme, et d'autres formes d'économie, rentables à court terme. Ces considérations conditionnent les propositions que l'on peut faire.
Je reviendrai sur trois points.
D'abord, je crois que l'on n'a pas intérêt à établir une différence entre deux formes d'industrie, celle qui produirait pour la France et celle qui exporterait. Si les pôles de compétitivité n'ont pas atteint leur objectif, c'est précisément parce qu'ils ont essentiellement servi à alimenter les multinationales exportatrices, au détriment des PME, dont les productions sont locales. Il faudrait les transformer en de véritables pôles de coopération entre les deux types d'industrie.
Ensuite, le rôle de l'État ne devrait-il pas dépasser la simple mise en relation des acteurs ? Ne faudrait-il pas rechercher un effet de levier, par exemple en créant un pôle financier public capable d'orienter l'industrie ?
Enfin, vous avez raison, il faut faire évoluer la gouvernance des sociétés, mais pourquoi réserver la démocratie sociale aux seules grandes sociétés cotées ? Il faut donner de nouveaux pouvoirs aux salariés dans l'ensemble du secteur industriel ! En outre, vous laissez de côté tout ce qui touche à l'économie sociale et solidaire, alors qu'on peut y développer certaines formes de coopération. Il faudrait, là aussi, mettre en oeuvre des outils législatifs.