Il y a depuis ce matin beaucoup d’émotion dans cet hémicycle car nous discutons de sujets extrêmement sensibles. Je tiens à saluer la volonté de mes collègues du groupe GDR de réhabiliter les fusillés pour l’exemple.
Pendant la guerre 1914-1918, mon arrière-grand-père se trouvait de l’autre côté de la frontière, dans l’Empire austro-hongrois. Il était officier. Ses hommes, pour survivre, ont volé des carottes dans un champ, comme beaucoup de Français qui, pour survivre, ont fait tout et n’importe quoi. Étant le chef, on lui a refusé sa permission et c’est à cette occasion qu’il a été tué.
Pour moi, c’est un héros. Face à cette injustice – pourquoi, en effet, sanctionner des hommes qui ne demandent qu’à survivre ! – il s’est élevé contre le commandement et en est mort. Il restera à tout jamais un héros dans ma mémoire.
Vous allez tout à l’heure, chers collègues du groupe socialiste, écologiste et républicain, défendre un amendement visant à supprimer cet article unique. Je veux vous dire une chose. Vous déniez à ceux qui ont été fusillés le titre de « mort pour la France ». Je pense personnellement qu’ils sont morts pour une autre idée de la France, pour un pays sans guerre. Ceux qui ont refusé de tuer leur voisin, venu de l’autre côté de la frontière, ceux qui ont refusé de participer à la boucherie décidée par des chefs bien au chaud dans leur bureau sont aussi, à mes yeux, des héros. Si nous ne voulons pas en parler, nous pouvons aussi refuser à Jaurès le titre de héros.
Je terminerai par ces mots : ils sont morts parce qu’ils ne voulaient pas combattre, ils sont morts pour ne pas avoir été au front. Je ne sais pas ce que nous aurions fait à leur place, mais je pense qu’aujourd’hui, avec le recul et à l’occasion du Centenaire, nous devons nous mettre à leur place et les réhabiliter. Je vous remercie.