Intervention de Amiral Gilles Humeau

Réunion du 24 mai 2016 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Amiral Gilles Humeau, commandant adjoint de l'opération Sophia :

C'est certain, mais il s'agit bien d'une situation de détresse, reconnue comme telle par tous les gens de mer. Les 700 personnes récupérées ce matin ont été sauvées d'une mort presque certaine – ils n'avaient ni nourriture, ni eau, ni pétrole. Après le sauvetage, les rescapés sont embarqués à bord de nos unités et, en fonction des consignes du centre de coordination et de sauvetage, nous les raccompagnons vers un port italien qui nous est désigné, principalement aujourd'hui en Sicile, et bientôt à Tarente où un sixième port devrait ouvrir. Nous remettons ensuite ces migrants aux autorités de police italiennes, en présence d'organisations humanitaires. Lorsque des passeurs sont identifiés, les autorités de police les appréhendent et ils entrent dans une logique de traitement de leur cas par la justice italienne. Le reste du temps, quand il n'y a pas de bateaux de migrants ou de navires en détresse détectés, notre activité se concentre sur la collecte de renseignements.

Que faisons-nous des bateaux récupérés ? Souvent, ils sont en très mauvais état et il est impossible de les remorquer vers des ports, comme c'était demandé à l'origine dans notre mandat. Face à cette impossibilité, si nous les laissons à la dérive ils risquent de devenir des obstacles à la navigation ; donc nous les faisons sombrer. Avant cela, nous récupérons toutes traces et indices utiles au renseignement, pour savoir d'où ils viennent et à qui ils ont appartenu. Ensuite, nous les envoyons par le fond.

S'agissant des chiffres, plus de 14 000 vies ont été sauvées directement par l'opération Sophia. Plus encore, lorsqu'un navire qui ne relève pas de Sophia récupère des migrants à la mer, l'un des nôtres l'assiste en cas de besoin. Si nous incluons ces actions d'appui pour comptabiliser le nombre de vies sauvées, nous arrivons à environ 30 000 migrants au total.

Madame Gosselin-Fleury, on ne peut pas dire, il me semble, que l'opération n'a pas entravé le trafic des passeurs. Nous avons constaté que leurs modes d'action consistaient autrefois à accompagner les migrants en haute mer afin de leur extorquer le maximum de fonds possible. Aujourd'hui, les passeurs ne s'aventurent plus en haute mer. La contrainte qui s'exerce sur eux est donc réelle. Il est cependant exact que cela ne suffit pas à démanteler totalement ces réseaux, car tant qu'il n'y aura pas d'invitation libyenne pour agir dans les eaux territoriales voire à terre, nous ne pourrons pas faire davantage. Mais il n'est pas juste de dire que la mission a été inefficace et n'a pas perturbé le trafic des passeurs.

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