Intervention de Jean-Louis Roumegas

Réunion du 1er juin 2016 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Roumegas :

Nous avons cherché à mettre en lumière les différentes contributions des divers secteurs – secteur routier, agriculture, secteur résidentiel – sur la pollution de l'air, en nous appuyant sur les travaux de la Cour des comptes, qui a relevé qu'ils contribuent de manière inégale à la lutte contre la pollution de l'air.

L'industrie et les transports sont les secteurs qui ont le plus progressé. La première a progressé essentiellement pour des raisons réglementaires, grâce à l'application de normes sur les émissions de polluants dont le contrôle est relativement aisé pour les services de l'État. Dans les transports, l'on a progressé essentiellement par l'évolution des motorisations, qui sont devenues beaucoup moins polluantes : le secteur doit cependant continuer ses efforts, car il est encore l'un de ceux qui produisent le plus de polluants.

Plusieurs raisons contribuent cependant aux limites de la lutte contre la pollution de l'air dans le secteur des transports. Premièrement, la fiscalité des carburants et le taux réduit de TICPE en faveur du gazole subventionnent l'achat des voitures diesel, qui émettent pourtant plus de NOx et de particules fines que les voitures essence : ce n'est pas logique. Deuxièmement, la dernière version du bonus-malus et la prime de conversion, créée en 2015, sont axées sur la réduction des gaz à effet de serre et donc du CO2. Ils n'aident quasiment pas les consommateurs à acheter les voitures essence les moins polluantes.

Troisièmement, le transport routier de marchandises a réduit fortement ses émissions mais continue de polluer, surtout pendant le dernier kilomètre de livraison. Les solutions alternatives – camions et véhicules utilitaires roulant au gaz ou à l'électricité – existent, mais elles sont encore trop coûteuses. Contrairement à ce qui se pratique ailleurs en Europe, il n'y a pas encore de transport de charges vers des véhicules propres sur le dernier kilomètre.

Quatrièmement, l'un des outils les plus efficaces, qui permet d'agir sur le nombre et la qualité des véhicules en circulation, à savoir les zones à basses émissions, n'a toujours pas été mis en oeuvre en France. Vingt villes se sont engagées à le faire, mais les premières zones ne pourront pas voir le jour avant 2017. À l'inverse, Londres, Milan et Berlin ont mis en place cet outil depuis environ dix ans. Il ne s'agit pas seulement de rendre possible un péage, comme on le connaît à Londres, mais de définir aussi des zones réglementées réservées aux véhicules propres.

Cinquièmement, le scandale Volkswagen a mis en lumière les failles des tests d'émission des véhicules en laboratoire. Les conditions réelles d'utilisation doivent servir de base à l'évaluation.

Aussi avons-nous formulé des propositions : rendre les aides au renouvellement du parc plus incitatives, en créant, à côté du bonus-malus, centré sur le changement climatique et prenant en compte le CO2, un bonus-malus « pollution atmosphérique » prenant en compte le NOx et les particules, ainsi qu'en instituant une prime à la casse ciblée sur les véhicules très polluants, poids-lourds, véhicules utilitaires lourds (VUL) et autocars anciens ; s'agissant du transport de marchandises, développer l'offre de poids-lourds et de VUL roulant à l'électricité ou au gaz naturel pour véhicules (GNV) et faciliter les ruptures de charge destinées à utiliser de tels véhicules pour effectuer le dernier kilomètre de livraison.

Il conviendrait aussi d'agir sur le nombre de véhicules en circulation en instaurant des zones à faible émission reposant sur l'identification obligatoire des véhicules en fonction des normes Euro – les vignettes annoncées par la ministre de l'écologie vont en ce sens – et l'octroi de facilités de circulation aux véhicules les moins polluants incitant les entreprises à mettre en place le covoiturage et en assurant la prise en charge, par l'employeur, de la moitié des frais engagés par les covoitureurs. Ils le font déjà pour l'abonnement aux transports en commun, mais des outils numériques permettent de mesurer le degré d'utilisation des véhicules et le nombre de passages, données qui pourraient être prises en compte dans les plans de déplacement des entreprises.

Appliquer le nouveau cycle d'essai des véhicules en conditions d'usage réelles et créer une autorité européenne de surveillance des niveaux d'émission des véhicules, qui soit indépendante des États membres et des constructeurs et procède à des contrôles aléatoires sur le parc roulant.

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