Au nom du groupe socialiste, écologiste et républicain, je voudrais dire que la pollution de l'air est un fléau sanitaire et environnemental majeur. Selon le dernier rapport du Sénat, son coût pour la société est estimé à plus de 100 milliards d'euros par an. Le coût global de la pollution de l'air serait même, d'après plusieurs études scientifiques, encore plus élevé que celui du réchauffement climatique. C'est en effet ce qu'ont affirmé les estimations de l'OCDE ou de Guillaume Sainteny, éminent fonctionnaire du ministère de l'environnement.
Il ne faut pas opposer les deux, bien sûr, mais comme vous le notez dans votre rapport, nos politiques publiques en matière environnementale peuvent parfois être contradictoires. En soutenant la biomasse, on soutient à la fois une énergie faible en carbone mais qui est productrice de particules fines. De même, notre politique en matière automobile montre souvent que nous avons largement sous-estimé les émissions de dioxyde d'azote ou de particules fines en nous concentrant sur le CO2.
Votre rapport souligne avec force ces contradictions et c'est bien là le rôle du comité d'évaluation et de contrôle. Évaluer la cohérence, l'efficacité, l'efficience de nos politiques publiques. La commission du développement durable a elle aussi vocation à déminer ces sujets complexes.
Aussi, notre groupe vous félicite pour l'exhaustivité de votre rapport qui bouscule les schémas établis. Il a d'autant plus de force qu'il s'inscrit dans une démarche transpartisane. Toutefois, depuis 2012, je tiens à rappeler l'action importante de notre majorité pour lutter contre la pollution de l'air.
La loi sur la transition énergétique pour la croissance verte y a dédié un volet entier. Concernant la mutation du parc automobile vers des véhicules moins polluants, nous fixons des objectifs ambitieux : 50 % pour la flotte de l'État, 20 % pour la flotte des collectivités locales ; pour les sociétés d'autocar, 50 % de la flotte d'ici 2025 et la totalité en 2025.
La loi donne la possibilité pour les collectivités de créer des zones de circulation restreintes réservées à une certaine catégorie de véhicules. Depuis le 1er septembre 2015, la ville de Paris peut limiter l'accès aux poids lourds. La loi encourage fortement le développement de la voiture électrique par un objectif de 7 millions de points de charge. Le financement est assuré par les collectivités, le plan d'investissement d'avenir, et la Caisse des dépôts. Le bonus-malus de 10 000 euros est un soutien très important à l'achat de véhicules électriques.
Le préfet et le maire sont aussi habilités à fixer plus facilement des limitations de vitesse dans leurs agglomérations, et à fixer des conditions spéciales de circulation et de stationnement pour les véhicules à faible émission. Le projet loi rend aussi obligatoire les plans de mobilité pour les entreprises employant plus de cent salariés sur le même site. La loi introduit la possibilité pour les concessionnaires d'autoroute d'établir des tarifs préférentiels pour les véhicules à faible émission ou ceux effectuant du covoiturage.
Ce projet de loi est une véritable boîte à outils dans laquelle peuvent se servir l'État et les collectivités pour agir localement. Le ministère de l'écologie a justement lancé l'appel à projet « Villes Respirable en 5 ans » pour accompagner les collectivités locales prioritaires justes après la publication de la loi.
Nos concitoyens sont également préoccupés par les mesures d'urgence lors de pics de pollution. Face à ce défi, l'Assemblée nationale a adopté, en janvier dernier, la proposition de loi de notre collègue François de Rugy visant à accélérer le déclenchement des mesures d'urgence en cas de pic de pollution.
Dès le 7 avril 2016, le Gouvernement a publié un arrêté préfigurant l'adoption de cette loi, permettant de mettre en place les mesures d'urgence dès le 3e jour au lieu du 4e et de les maintenir plus longtemps en fonction des prévisions météorologiques.
Enfin, le Gouvernement a annoncé d'ici maintenant 4 ans la convergence de la taxation de l'essence et du diesel, et en finir avec un avantage de moins en moins justifié par des arguments industriels dépassés. Les Français sont de plus en plus en plus sensibles à l'enjeu sanitaire du diesel.
Et vous le précisez, à juste raison, nous pouvons aller encore plus loin. À ce titre, la publication prochaine du plan de réduction des émissions de polluants atmosphériques doit envoyer des signaux. C'est d'autant plus nécessaire que comme vous l'avez bien dit, la qualité de l'air est la première préoccupation environnementale des Français.
Aussi, je souhaite vous interpeller sur plusieurs points qui m'interrogent. Les collectivités locales ont aujourd'hui envie de s'engager plus fortement dans la décision en cas de pic de pollution. Certains souhaitent rendre automatique les mesures d'urgence dès lors que le seuil réglementaire est franchi. Pensez-vous que le Gouvernement aurait dû aller jusque-là et se priver du pouvoir d'appréciation du préfet ?
Le GART, la mairie de Paris et le ministère de l'environnement ont abouti à un accord ambitieux pour restreindre la circulation des véhicules les plus polluants, avec six vignettes de couleurs différentes, contre les quatre envisagées à un moment. Que pensez-vous de cet accord ?
Enfin, je souhaiterais recueillir votre sentiment sur la dernière Conférence environnementale en matière de pollution de l'air.
Une question supplémentaire concernant les véhicules anciens. En tant que députée du Mans, ville emblématique de l'automobile, je rencontre régulièrement les associations de passionnés de véhicules de collection qui organisent de nombreuses manifestations festives : défilés, expositions, rallyes… Ils sont inquiets des possibles évolutions réglementaires. Il serait bien de ne pas intégrer ces véhicules aux véhicules usagés polluants qui circulent sur nos routes et ne pas les taxer en conséquence. Quel est votre avis sur le sujet ?