Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du 31 janvier 2013 à 15h00
Application du principe de précaution aux ondes électromagnétiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Dès lors, il est de notre devoir de prendre en compte les risques d'une trop grande exposition à ces ondes.

C'est donc dans le croisement dialectique de ces deux exigences que nous soutenons le présent texte. Il n'y a là aucun paradoxe : c'est bien en « sécurisant » les technologies que nous développerons leur acceptabilité sociale, et que nous faciliterons donc leur déploiement.

Les problèmes, rappelés par la ministre et les rapporteurs, sont de plusieurs ordres : ils concernent les antennes relais, les téléphones portables eux-mêmes, les réseaux de type 3G et 4G, et le wifi. Au total, ce sont les émissions tous azimuts, en diverses fréquences et d'intensités multiples, qui créent un brouillard électromagnétique artificiel croissant.

Face à ce constat, le législateur doit demander le respect du principe ALARA, qui vise à réduire les expositions à un niveau aussi faible que possible. Nous regrettons que cette disposition ait été supprimée en commission.

En l'état actuel des connaissances, nous sommes favorables à l'instauration d'un plafond d'exposition du public aux hyperfréquences à 0,6 volt par mètre. Du reste, ce seuil a été préconisé par le Conseil de l'Europe, pas plus suspect que moi de fondamentalisme vert ! (Sourires.)

C'est également celui qui figurait dans une proposition de loi déposée par notre ancien collègue Jean-Pierre Brard sous la douzième législature. Ce texte avait été cosigné par des représentants de tous les groupes, dont une future ministre de l'environnement, Nathalie Kosciusko-Morizet.

Il est également regrettable que la protection des enfants dans les crèches et les écoles ait été escamotée de ce texte. Il est en effet nécessaire d'introduire l'idée que les connexions filaires devraient être préférées au wifi, émetteur d'ondes, dans les établissements scolaires.

Enfin, il n'est pas acceptable de reculer sur la prise en compte de l'électrosensibilité. Pour connaître les cas douloureux de plusieurs personnes accueillies dans mon village, j'y suis particulièrement attaché. J'ai donc cosigné un amendement de mes collègues du groupe écologiste, afin de réintroduire cette préoccupation dans le texte.

Dès 2008, j'avais alerté la ministre de l'époque sur cette question. Il m'avait été répondu que l'ensemble des symptômes de l'électrosensibilité « ne faisait partie d'aucun syndrome reconnu ». Justement, n'est-il pas temps d'étudier officiellement les cas, afin d'aboutir à une définition rigoureuse de ces troubles et d'apporter une réponse adaptée ?

D'une façon générale, force est de reconnaître que le lobbying des opérateurs a conduit à vider sensiblement cette proposition de loi de son contenu. Je pense notamment à la suppression de l'obligation de permis de construire pour toute implantation ou modification d'antenne-relais.

Céder aux réclamations partiales et intéressées des multinationales des télécommunications, c'est occulter l'humain. C'est tout l'inverse du changement attendu par nos concitoyens. À l'inverse, les députés que je représente soutiennent une meilleure information préalable des riverains, qui permettra la concertation et la recherche de solutions alternatives satisfaisantes.

Je voudrais développer l'approche, que je crois spécifique, des députés communistes et citoyens sur cette question. Nous ne nous cantonnerons pas à une attitude qui consisterait à ne pointer que les méfaits des technologies et à se limiter à l'application du principe de précaution. Il s'agit aussi de dénoncer la logique générale qui prévaut dans l'implantation des nouvelles technologies, à savoir le tout-privé, la marchandisation et la mise en concurrence.

C'est à l'État de reprendre la main en matière d'aménagement numérique et technologique du territoire, notamment par l'implantation et le maintien de services publics. Nous le savons, les acteurs du secteur privé poursuivent un objectif, la rentabilité. Ils n'ont que faire de la situation des territoires enclavés ou des conséquences de certaines technologies sur la santé.

Chers collègues, faisons le bilan en toute transparence des privatisations successives et de l'ouverture à la concurrence dans le domaine des télécommunications. Les situations fortement conflictuelles liées à l'implantation d'antennes-relais montrent qu'il est inconcevable d'avoir dessaisi l'État de ses prérogatives au profit d'opérateurs privés.

Les députés du front de gauche estiment que c'est d'abord de la logique libérale qu'il faut faire le procès. Ainsi, en matière de téléphonie ou d'accès à internet, au lieu d'avoir une infrastructure de réseau unique et égalitaire, respectueuse des réglementations et de la santé, installée sous l'égide de l'État, chaque opérateur peut déployer son propre réseau ! C'est cette multiplicité, imposée par le dogme de la concurrence et de la marchandisation, qui crée des redondances et entraîne des expositions aux champs électromagnétiques bien supérieures aux seuils préconisés.

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