Cet amendement va permettre de faire un travail de comparaison, un peu compliqué mais utile, entre la « version Mazetier » – si j’ose dire – de ce dispositif de compensation et la version que propose le groupe Les Républicains.
En vérité, leur architecture est très semblable. L’un et l’autre prévoient l’initiative du procureur de la République, la présence du juge, la publicité des sanctions, l’instauration d’une amende lourde, la mise en place d’un système de mise en conformité et l’intervention d’un commissaire chargé d’effectuer le travail. La seule différence notable, en dehors du montant des amendes – celui-ci est un peu plus flexible dans le texte proposé par le groupe Les Républicains, tandis que les plafonds sont chiffrés dans le texte de Mme Mazetier – réside dans la possibilité d’une deuxième procédure dans laquelle intervient le juge d’instruction.
En réalité, le système proposé par Mme Mazetier ouvre deux voies à la compensation, que pour ma part j’appelle la transaction vénale.
La première se situe avant le déclenchement des poursuites, lorsque le procureur de la République propose une convention. Dans ce cas, les poursuites ne sont pas engagées dans la mesure dès lors que la convention est sanctionnée par le juge. C’est également ce que nous proposons et ce qui existe dans les législations américaine, britannique, ou encore hollandaise.
La seconde voie – et c’est là que Mme Mazetier fait preuve d’une imagination que je qualifierais de « politique » – consiste, dans le cas où des poursuites pénales ont été engagées par un juge d’instruction, celui-ci peut prendre l’initiative d’une transaction.
Je vous le dis honnêtement : cela me paraît un peu baroque. Je ne pense pas, pour ma part, que ces deux voies soient réellement compatibles. La procédure ne peut, selon moi, intervenir qu’avant le début des poursuites, car dès lors que le processus pénal est engagé, en sortir sous la forme d’une transaction me semble quelque peu étrange sur le plan du droit.
Je comprends votre problème politique, madame Mazetier : vous devez rassurer vos collègues de la majorité. Toutefois, j’ai du mal à accepter, sur le plan du droit, ce que vous proposez. Il faut faire preuve de cohérence : soit l’on n’engage pas l’action publique pénale parce qu’il existe une convention ferme et publique – ce qui n’interdit en rien, au demeurant, d’entamer des poursuites pénales contre les individus qui se sont rendus coupables et la réparation du préjudice pour les parties civiles –, soit l’action pénale a débuté, auquel cas on n’ouvre pas la possibilité d’établir une convention, sous peine de retomber dans les travers d’une procédure longue, lente et inefficace.
En ouvrant conjointement ces deux voies, comme vous l’avez fait, pour essayer de trouver un consensus au sein de votre groupe, vous avez fabriqué une chose un peu étrange – je ne parlerai pas de monstruosité juridique, mais d’une sorte d’animal à deux têtes qui, à mon avis, risque de se mordre la queue à un moment ou un autre de la procédure.