Même s'il faut se tourner vers l'avenir, comment ne pas regretter dix années de décrochage continu du commerce extérieur français ? Les parts de marché des exportations françaises dans le commerce international ont reculé de 33 % depuis 2000 en passant de 5 % à 3 %. Ce recul s'est traduit par une diminution nette du nombre de TPE et de PME exportatrices. Il aura fallu attendre l'élection du Président de la République actuel pour que soit conduite enfin une vraie politique du commerce extérieur, avec un ministère spécifique. MM. Jean-Christophe Fromantin et Patrice Prat sont chargés, dans le cadre du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale, d'un rapport d'évaluation sur le soutien public aux exportations.
Madame la ministre, au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen, je tiens à saluer votre politique, qui marque le retour d'une stratégie après des années d'inertie, voir de défaitisme. Le Premier ministre a fixé un cap ambitieux, mais accessible : le retour à l'équilibre commercial hors énergie avant la fin du quinquennat. Alors que beaucoup ont agité l'étendard de la compétitivité sans agir sur le fond des choses, nous soutenons le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi, qui fait de l'exportation une priorité, ce qui permettra de donner des marges de manoeuvre aux entreprises.
Vous avez rappelé les quatre grands axes (« mieux se nourrir », « mieux se soigner », « mieux vivre en ville » et « mieux communiquer ») sur lesquels la France portera son action en vue d'accéder aux pays prometteurs qui concentrent 80 % des importations dans le monde. Votre projet pour l'exportation française est donc global.
Nous partageons votre volonté de refondre les dispositifs d'aide existant en inversant les méthodes habituelles proposées par Ubifrance : vous lui avez en effet demandé, dans le cadre de la BPI, de proposer à mille entreprises un dispositif personnalisé à l'export. Vous avez également insisté sur votre volonté de rationaliser le dispositif de soutien financier à l'export. En effet, de trop nombreuses entreprises se plaignent encore du maquis réglementaire qu'elles doivent traverser avant d'accéder aux aides, ce qui entraîne une perte de temps considérable.
Vous souhaitez également porter un regard plus approfondi sur les entreprises prometteuses, en mettant en place un véritable partenariat État-région.
Nous nous félicitons par ailleurs de votre volonté de soutenir davantage encore les exportations agroalimentaires, un des fleurons de notre économie. Un leader ne doit pas s'endormir ; il doit continuer à se battre et anticiper les nouvelles concurrences, d'autant que l'agriculture française devra bientôt affronter le renouvellement de la politique agricole commune.
Vous souhaitez également rendre plus rationnel le mandat donné à l'Union européenne pour négocier la politique commerciale en faisant notamment émerger la notion de réciprocité à laquelle la Commission des affaires économiques est très attachée.
Je tiens à rappeler que la France possède un tissu d'entreprises très diversifiées, le nombre des très petites entreprises françaises étant supérieur à celui de l'Allemagne. Toutefois, si la majorité du tissu exportateur français est composé de PME indépendantes, leur part dans le chiffre d'affaires de l'export est minime : les mille premières entreprises exportatrices concentrent près de 70 % du chiffre d'affaires. En 2009, les entreprises de groupes français ne représentaient que 6 % de l'appareil exportateur français, mais réalisaient 41 % de son chiffre d'affaires. A contrario, les entreprises étrangères installées en France qui représentaient 13 % de l'appareil productif assuraient 43 % du chiffre d'affaires à l'export. De plus, le taux de disparition des entreprises exportatrices se concentre sur les PME indépendantes primo-exportatrices. Il faut d'autant plus accompagner leur développement et assurer leur pérennité qu'en raison de leur potentiel d'innovation elles seront, à l'export, les fleurons de demain.
Un autre axe est le partenariat avec les régions, lesquelles, pour la plupart, ont prévu des dispositifs d'aide à l'exportation. Je citerai Sud de France Développement, l'opérateur à l'export de la région Languedoc-Roussillon, dont je suis le président en tant que conseiller régional. Le contexte économique impose, aux yeux des élus comme des entreprises, de rationaliser les dépenses. Les réponses nationales paraissent souvent en décalage par rapport au potentiel et aux attentes des acteurs économiques régionaux. La démultiplication des offres, des outils et des dispositifs d'appui à l'international ne permet pas toujours de s'adapter aux spécificités des acteurs économiques de ces territoires. La mise en concurrence des offres nationales avec des stratégies et des dispositifs régionaux apparaît souvent comme contre-productive. La relation avec les opérateurs nationaux principaux (Ubifrance et la Sopexa) est vécue comme une relation client-fournisseur. Est-il envisageable de faire des régions volontaires des chefs de file à l'export, en lien avec les opérateurs nationaux et l'ensemble des acteurs concernés (les entreprises et les chambres consulaires) ?
Comment, enfin, mieux développer le potentiel des entreprises à l'export et mieux coordonner les différentes actions afin de les adapter à la spécificité des entreprises et de leur territoire ?