Sur l'anthropomorphisme, je suis tout à fait d'accord. De la même manière, en tant que spécialistes de sciences sociales, nous ne sommes pas là pour défendre quelque culte que ce soit.
Vos questions, sur lesquelles j'ai travaillé il y a longtemps, dans les années quatre-vingt-dix, sont difficiles mais tout à fait légitimes. À l'époque, le problème ne se posait pas en ces termes. Et pourtant, quand on entre dans un abattoir, la question de la mort animale – et de la mort tout court – nous saute à la figure. La sensibilité, le sentiment sont des questions philosophiques essentielles. Nous avons tous une sensibilité par rapport à la souffrance et à la maltraitance animales – c'est notre tendance à l'anthropomorphisme, d'autant que ces mammifères nous ressemblent.
On oppose souvent les sciences sociales et humaines, dites « sciences molles » ou « souples » aux sciences « dures », mais les sciences dures aussi comportent une part de subjectivité. Les rapports des scientifiques et des vétérinaires donnent des chiffres très variables sur le temps qui s'écoule entre la saignée et la perte de conscience.