Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 29 janvier 2013 à 16h15
Commission des affaires économiques

Nicole Bricq, ministre du commerce extérieur :

Vous avez raison, monsieur Barbier : il n'existe pas vraiment de stratégie coordonnée à l'échelle de l'Union européenne. Il y a bien une politique commerciale européenne, mais chacun a tendance à jouer son propre jeu. Un premier pas a été fait avec le sommet de juin 2012 sur l'initiative de croissance. Nous devons développer des politiques économiques pour toutes les grandes infrastructures de transport, pour l'économie numérique, pour le secteur énergétique, où les enjeux dépassent les frontières et où nous sommes confrontés aux mêmes problématiques. Le seul domaine où l'on puisse véritablement parler de coordination est celui de la politique commerciale vis-à-vis des pays tiers – j'en ai parlé à propos des accords de libre-échange et des accords bilatéraux.

Lorsque nous négocions, nous défendons à la fois des intérêts offensifs, en cherchant ce qui va nous rapporter, et des intérêts défensifs. Nous allons conclure un accord avec le Japon. J'ai demandé une clause de sauvegarde pour l'automobile, car le secteur est en difficulté en France. Nous sommes là dans l'intérêt défensif. La Commission ne souhaitait pas reconnaître la spécificité du secteur automobile et ajouter cette clause, mais avec l'appui d'autres États, dont l'Allemagne, nous avons eu gain de cause. Dans le secteur agroalimentaire, nous devons au contraire privilégier les intérêts offensifs : un accord de libre-échange nous permettra de mieux vendre au Japon, surtout si nous négocions une baisse des barrières non tarifaires. Nous devons donc « pousser » nos intérêts offensifs. À la fin de la négociation, il faudra bien sûr arbitrer, en fonction de ce qui a été obtenu sur les intérêts défensifs comme sur les intérêts offensifs, pour décider de signer ou de ne pas signer. C'est ce que nous sommes en train de faire pour l'accord de libre-échange avec le Canada.

Je ne reviens pas sur l'internationalisation des entreprises. Pour exporter nos produits, il est désormais indispensable de s'internationaliser, c'est-à-dire de s'implanter à l'étranger ou d'y trouver des partenaires locaux. Il s'agit non plus seulement de commercer, mais de développer un partenariat, et très souvent un partenariat industriel, qui implique des transferts qui doivent rester maîtrisés, voire encadrés pour les secteurs stratégiques.

La découverte et l'exploitation des gaz et huiles de schiste aurait en effet généré des gains de productivité de l'ordre de 25 % pour l'industrie nord-américaine, monsieur Blein. Il convient cependant de prendre en considération les dégâts qui peuvent en découler. La question sera évidemment posée dans le cadre du débat sur la transition énergétique. Vous connaissez la position française, qui n'a rien de partisan puisque nous sommes tous d'accord pour interdire la fracturation hydraulique. Peut-être une technique d'exploration subsidiaire sera-t-elle trouvée un jour, mais nous n'en sommes pas là. Il faut donc faire la part des dégâts à l'environnement et du bienfait économique. Nous sommes là pleinement dans le débat sur la transition énergétique.

J'ai déjà répondu sur le portage des PME, monsieur Cinieri. Dans la mesure où le ministre des affaires étrangères est le chef de la diplomatie économique, il est légitime qu'il mobilise les ambassadeurs sur les enjeux économiques, qui sont la première priorité du Gouvernement, et nomme des chargés de mission dans tel ou tel pays – Mme Aubry pour la Chine, M. Raffarin pour l'Algérie, ou encore M. Schweitzer pour le Japon. Le rôle de ces grands acteurs politiques ou économiques peut compléter utilement l'action de l'État, que j'incarne lors des commissions mixtes et des dialogues stratégiques. En effet, la diplomatie économique est aussi une stratégie d'influence. J'ai pu constater en Algérie que M. Raffarin avait accompli un excellent travail. Mme Aubry, qui m'a accompagnée en Chine, me rendra prochainement compte de sa mission. Nous devons néanmoins veiller à ce que les énergies individuelles ne brouillent pas le message collectif.

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