Intervention de l'ambassadeur

Réunion du 31 mai 2016 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

l'ambassadeur :

Le transfert de pavillon du premier BPC, le Gamal Abdel Nasser, aura lieu dans 48 heures, celui du deuxième bâtiment dans quelques mois. L'Égypte s'est intéressée à ces navires pour des questions de sécurité en Méditerranée et en mer Rouge. Il y a la Libye, bien sûr, mais aussi le gigantesque gisement de gaz situé à 120 kilomètres au large des côtes égyptiennes qu'il faut pouvoir le protéger. Nous devons assurer la sécurité du canal de Suez et de la zone économique spéciale attenante au canal dont nous avons lancé le projet : nous souhaitons créer une zone franche de 461 km², où sept ports seront aménagés. Voilà ce qui explique l'acquisition des Mistral.

Plusieurs raisons expliquent pourquoi le gouvernement des Frères musulmans n'a pas fonctionné. En premier lieu, il est clair pour les Égyptiens que les Frères musulmans se considèrent d'abord comme tels et ensuite seulement comme Égyptiens. D'autre part, une fois au pouvoir, les Frères musulmans ont fait preuve d'un amateurisme affligeant. On se rappellera un épisode sidérant : alors que les Éthiopiens avaient entrepris de construire un barrage sur le Nil, la télévision d'État égyptienne a diffusé en direct une réunion politique organisée autour du président Morsi au cours de laquelle différents intervenants décrivaient par le menu leurs intentions belliqueuses à l'égard de l'Éthiopie et les divers moyens de les mettre à exécution. Enfin, les frères musulmans ont appliqué la doctrine de la démocratie « à usage unique » une fois seulement, pour qu'ils accèdent au pouvoir, et ensuite, fini.

Il est stupéfiant de vouloir imposer à notre région l'islam politique comme une alternative possible alors qu'il n'en est pas question en Europe. Nous sommes parvenus, comme vous, au stade de maturité où l'on considère que la religion n'a rien à voir avec le politique. Que l'on soit religieux, parfait, mais qu'on le soit à la mosquée ou à l'église ; au pouvoir, non merci. Le fait de manipuler un peuple relativement pieux ne devrait pas être.

Pourquoi les choses ont-elles été si difficiles en Égypte ? Parce que toute la région allait être gouvernée par les Frères musulmans. Cela aurait arrangé certains, qui auraient ainsi traité avec un Guide, et un califat ottoman aurait peut-être été formé dans la région. Mais un tel projet n'aurait jamais pu aboutir sans l'Égypte ; a contrario, si ce projet avait pour commencer abouti en Égypte, son extension en aurait été de beaucoup facilitée car les autres pays auraient suivi bien plus aisément. Méfiez-vous des islamistes de tout acabit : il n'existe pas d'islamistes modérés, ce sont des idéologues. Soit on est islamiste soit on ne l'est pas. Quand on l'est, on souhaite voir la gloire de Dieu et l'avènement d'un califat. Un islamiste qui vous semble modéré l'est par stratégie – mais les objectifs visés restent la gloire de Dieu et l'avènement d'un califat. Je me méfie de tous ceux qui mêlent religion et politique ; on ne peut mener les deux de front. Telle est la position de l'Égypte d'aujourd'hui, où vous pouvez faire ce qu'il vous semble bon : même si vous êtes un Frère musulman, vous avez le droit de faire de la politique, mais avec une autre étiquette puisque cette appellation est interdite. Aussi longtemps que vous êtes pacifique et que vous n'avez pas de sang sur les mains, vous êtes le bienvenu sur la scène politique égyptienne.

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