Je voudrais tout d'abord remercier chaleureusement la présidente Catherine Coutelle de nous accueillir aujourd'hui dans ce lieu chargé d'histoire, ainsi que du soutien apporté à notre projet.
L'université Paris Diderot, dont la présidente, Mme Chrisitine Berici, n'a pu être présente aujourd'hui en raison d'un empêchement de dernière minute, est une université pluridisciplinaire, reconnue dans le milieu académique pour son engagement depuis plusieurs années sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes, à travers la création d'un pôle dédié que je dirige. Je précise que cet engagement remonte en fait aux années 1970, à travers les activités de recherches et d'enseignements. En effet, l'université a été pionnière dans les études scientifiques sur le genre. Ainsi, bien avant l'institutionnalisation des études de genre, l'historienne Michelle Perrota pu commencer en 1973, grâce au soutien de l'université, un cours intitulé « Les femmes ont-elles une histoire ? ».
En 1985, nous avons été l'une des trois premières universités françaises à avoir créé un poste de maître de conférences sur les études féministes, qui sera occupé par Mme Claude Zaiman. En 2001, un poste de professeur « Genre et société » a également été créé.
Aujourd'hui, nous avons une quinzaine d'enseignantes et d'enseignants-chercheurs travaillant sur le genre dans différentes disciplines, comme la sociologie, l'histoire, la géographie, les lettres, les arts et le cinéma, mais aussi les études psychanalytiques ou les études interculturelles en langues appliquées. L'existence de ces postes a permis la mise en place d'enseignements et de diplômes sur le genre. Il existe en effet un master en sociologie qui a pour titre « Genre et changement social et politique ».
Dans la continuité de cette tradition, l'université Paris Diderot a été la première – et la seule à ce jour – à avoir créé en 2010 un service dédié à l'égalité femmes-hommes. Ce service s'est vu confier trois missions par le conseil d'administration de l'établissement.
La première consiste à dresser le constat des inégalités dans l'université, à travers des études quantitatives, et à rechercher des explications, par des études qualitatives. Depuis la création du pôle égalité femmes-hommes (PEF), cinq études ont été réalisés sur la communauté universitaire : enseignantes et enseignants-chercheurs, personnels administratifs et techniques, étudiantes et étudiants.
La deuxième mission du PEF est de sensibiliser les acteurs et actrices de l'université sur les inégalités femmes-hommes, notamment en diffusant les données issues des études produites, mais aussi à travers une série de conférences annuelles sur l'égalité des sexes, destinées aux chercheurs et au grand public.
Enfin, le PEF a pour mission de proposer des mesures concrètes pour faire progresser l'égalité entre les femmes et les hommes à l'université. Depuis sa création, il a ainsi défini deux plans d'action : l'un, adopté en juin 2011 par le conseil d'administration de l'université, et le second, défini pour répondre à un appel à projets de la Commission européenne, qui date de 2013. Les mesures prévues par ces deux plans d'action s'adressent à l'ensemble de la communauté universitaire et touchent aussi bien la sphère professionnelle (recherche, enseignement, politique générale de l'établissement) que privée, notamment en vue d'améliorer l'équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée.
Certains pourraient s'interroger sur les raisons d'un tel engagement. En effet, le monde académique est souvent perçu comme démocratique, ouvert à la société et dédié à la transmission égalitaire des savoirs. Cependant, les données statistiques et sociologiques disponibles montrent qu'un plafond de verre existe également dans le monde académique.
L'université Paris Diderot est engagée sur ces questions, car nous sommes convaincus de l'importance du rôle de l'université pour promouvoir l'égalité entre les femmes et les hommes ; c'est aussi un lieu d'innovation sociale, et notamment dans le domaine des droits des femmes. Les recherches sur le genre, qui nous permettent de mieux comprendre les mécanismes de construction et de reproduction des inégalités, ainsi que les formations dispensées nous permettront d'atteindre notre objectif : l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Nous dispensons chaque année, depuis 2011, une formation obligatoire à l'égalité femmes-hommes à destination de l'ensemble des étudiants de première année de licence, et au fil des ans, nous avons constaté une nette évolution : en effet, si au début les étudiants s'interrogeaient sur la nécessité de suivre ce cours, leur discours a aujourd'hui changé. L'action des pouvoirs publics, les initiatives de différents organismes, tels que le Centre Hubertine Auclert et ONU Femmes, ont favorisé une prise de conscience du grand public.
Au cours de ces formations, nous constatons que certains étudiants s'interrogent sur les moyens dont ils disposent pour faire changer les choses. Le concours vidéo « Ton court pour l'égalité » répond précisément à leur envie de s'investir pour promouvoir l'égalité des sexes. Mobiliser les étudiantes et les étudiants sur cette thématique, la lutte contre les discriminations sexistes et l'implication des hommes et des garçons, est pour nous un enjeu et un défi majeur, et pour l'ensemble de la société. À cet égard, la campagne internationale He for She, dans le cadre de laquelle s'inscrit ce concours, et dont l'objectif est de sensibiliser les hommes pour qu'ils prennent eux aussi conscience de la nécessité de soutenir et de s'engager dans cette cause, est une initiative formidable.
Pour l'ensemble de ces raisons, lorsque ONU Femmes nous a proposé de s'associer à ce projet, nous n'avons pas hésité une seconde. L'idée d'inviter les jeunes générations à réfléchir aux enjeux de l'égalité et promouvoir l'implication des hommes nous a semblé intéressante, et surtout nécessaire.
Aujourd'hui encore, quand nous organisons des manifestations sur l'égalité, scientifiques ou culturelles, nous dressons le même constat : peu d'hommes ou de garçons y participent car ils ont peu conscience du problème, et en particulier du fait que les inégalités ne nuisent pas seulement aux femmes. Par ailleurs, si ce concours vidéo visait notamment à encourager l'implication des hommes et des garçons, il est bien évident que les questions d'inégalités entre les sexes, de lutte contre le sexisme ou des violences faites aux femmes se posent également aux filles.
En tant qu'organisateurs du concours, avec le centre Hubertine Auclert et le comité ONU Femmes, nous avons insisté sur la nécessité d'une réflexion menée par les filles et par garçons et les filles : la mixité des équipes proposant un court-métrage était d'ailleurs l'un des critères du règlement du concours.
Pour conclure, je voudrais remercier la Délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, en soulignant le plaisir que nous avons eu à travailler sur ce concours vidéo avec le Centre Hubertine Auclert et ONU Femmes, en remerciant en particulier Béatrice Audollent, Pauline Chabbert et Amandine Berton-Schmitt notamment, ainsi que l'ensemble des partenaires et les membres du jury.
Un travail formidable a été réalisé et, si le choix n'a pas été facile, compte tenu de la qualité des courts-métrages proposés, les débats ont été constructifs et ont abouti à un consensus, dans une ambiance chaleureuse. Je me félicite également de la diversité des personnes et organismes impliqués dans ce projet, et cette diversité, qui a certainement contribué au succès du projet, est à l'image de la campagne He for She, qui a pour objectif, en s'adressant à des personnalités issues de différents milieux, notamment politiques, économiques et académiques, la dissémination à une large échelle d'un message optimiste et inclusif sur l'égalité.