Intervention de Stéphane Geffroy

Réunion du 9 juin 2016 à 9h00
Commission d'enquête sur les conditions d'abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Stéphane Geffroy :

Bonjour à tous.

La prise en charge de la souffrance animale à l'intérieur des abattoirs dépend beaucoup de la taille de ces entreprises et des moyens économiques dont elles disposent. Les abattoirs de dimension industrielle, qui appartiennent à de grands groupes, ne connaissent pas de déficit de prise en charge des animaux de boucherie, contrairement aux structures de petite taille qui manquent souvent de moyens.

Les cas de souffrance animale sont réduits au minimum lorsque la formation des salariés est assurée, lorsque la procédure d'accueil et le protocole d'abattage des animaux sont formalisés et respectés. Cela dit, il faut faire attention à ne pas prendre des mesures de contrôle généralisé à partir d'un cas particulier. Il existe déjà des organismes d'État comme les directions départementales des services vétérinaires (DDSV) qui permettent ce niveau de contrôle ; malheureusement, nous assistons depuis plusieurs années à un manque d'agents en abattoir. La tendance ne va donc pas dans le sens du risque zéro. Les petits abattoirs auraient besoin d'être accompagnés dans la mise en place de procédures d'accueil par des mesures renforcées.

À l'extérieur de l'abattoir, les éleveurs ont une part de responsabilité dans la prise en charge des animaux. Le nombre de vaches gestantes qui se retrouvent dans les abattoirs est significatif ; il est même arrivé que certaines d'entre elles vêlent à proximité du piège. Rappelons qu'au cours de l'épisode de sécheresse de 2011, les éleveurs de l'association France Milk Board (FMB) avaient organisé le transfert de milliers de jeunes bovins vers la Turquie, par bateau au départ de Sète. De nombreux cadavres avaient été retrouvés en mer car les conditions de transports n'avaient pas été respectées.

Pourquoi ai-je écrit ce livre ? Pierre Rosanvallon m'a convaincu que mes propos ne seraient pas détournés et qu'ils toucheraient un très large public. Je voulais faire découvrir la pénibilité de notre métier, raconter ce que cela signifie d'être sur une chaîne d'abattage cadencée ou continue. Nous sommes oubliés des gouvernements et, après les vidéos sur la maltraitance animale, on nous montre encore du doigt.

Avec ce livre, j'espère que la pénibilité de notre travail sur les chaînes d'abattage cadencées ou continues sera reconnue par les pouvoirs publics. Car on cumule tout : les cadences, le bruit, l'odeur, la vue du sang, le stress, les gestes de force répétitifs, l'humidité, les dangers et les effets psychologiques. Et on n'a pas le droit d'être malade : chez nous, le délai de carence est de sept jours en cas d'arrêt maladie… Après quarante années de cotisation, on devrait donc avoir le droit à une retraite entière.

Nous aussi, nous avons on a été choqués par les vidéos sur la maltraitance animale. En plus, ces comportements sont contraires à la logique de l'entreprise qui cherche à faire de la qualité : la viande d'un animal stressé devient poisseuse ; celle d'un animal battu présente des hématomes qui la rendent impropre à la consommation et provoquent son retrait du circuit alimentaire par le service vétérinaire.

Chaque personne en contact avec les animaux vivants doit recevoir une formation sur le bien-être animal. Il faut aussi former le délégué du personnel du hall d'abattage, quand il y en a un, pour qu'il puisse défendre ou condamner le salarié en cas de problème. On parle beaucoup d'installer des systèmes de vidéosurveillance dans les abattoirs. Pourquoi pas, à condition que la caméra ne filme que l'approvisionnement de la chaîne, que la direction de l'établissement n'ait pas de droit de regard sur ces images dont le visionnage serait réservé au service vétérinaire, et qu'il n'y ait pas d'enregistrement.

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