Monsieur Geffroy, je vous félicite d'avoir eu le courage d'écrire ce livre : il ne doit pas être évident de raconter ce qu'on fait, surtout dans ces conditions.
Je voudrais revenir sur l'aspect humain de votre travail. En préambule, vous avez dit que vous étiez un peu des oubliés du Gouvernement – je suppose que vous faites référence à tous ceux qui se sont succédé. Il se trouve que la nouvelle loi travail comporte une clause de pénibilité. En tant que délégué syndical, pensez-vous que vous pouvez intégrer ces clauses de pénibilité ? Personnellement, je le souhaite.
Vous dites être entré à dix-neuf ans dans cet abattoir, sans aucun bagage. Comment avez-vous appris ce métier ? Avez-vous reçu une formation ou avez-vous seulement observé avant de pratiquer ? Comment les choses se passent-elles pour les jeunes qui arrivent maintenant ? S'ils reçoivent une formation, considérez-vous qu'elle est suffisante ?
Le grand public manifeste peut-être plus d'indifférence que d'ignorance à l'égard de votre métier. On fait l'autruche : on ne tient pas à savoir ce qui se passe entre le moment où on voit la vache brouter tranquillement dans son pré et celui où on achète un beefsteak. Tout à coup, les images ont interpellé les gens. Ce manque de considération n'est certainement pas facile à vivre. On parle d'inspections pour vérifier le bien-être animal. Y en a-t-il pour s'occuper du bien-être humain ? Des services s'en chargent, je pense.
Qu'en est-il du retour à la maison, le soir, pour des gens qui pratiquent ce métier qui peut troubler ? Les jeunes qui entrent pour la première fois dans un abattoir pour y travailler doivent être dans une situation compliquée. Psychologiquement, comment surmontez-vous ce décalage qui existe entre la vie de l'abattoir et celle de l'extérieur ?