Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire, monsieur le rapporteur de la commission de la défense nationale et des forces armées, mes chers collègues, nous débattons aujourd’hui, en première lecture à l’Assemblée nationale, d’une proposition de loi visant à instituer une carte spécifique aux familles des blessés de guerre.
Le Groupe les Républicains a choisi de mettre ce texte symbolique à l’ordre du jour et j’en suis personnellement très heureux, car je crois sincèrement que, dans notre société meurtrie chaque jour par tant de crispation, de haine et de violence – y compris, malheureusement, envers nos forces de défense et de sécurité – nous avons besoin, plus que jamais, de marqueurs et de symboles.
La reconnaissance de la Nation envers nos soldats blessés et leurs familles est un symbole très fort, car la reconnaissance réchauffe les coeurs et aide à panser les blessures. De retour d’opération, nos soldats doivent se reconstruire, aussi bien physiquement que mentalement. Parfois, ils peuvent être saisis d’une forme de rejet de l’institution militaire, due à l’absence de reconnaissance, ce qui les plonge dans l’isolement et la dépression la plus profonde.
Un soldat blessé de guerre, s’il est bien entouré, connaît un rétablissement plus efficace et plus rapide. La famille joue donc un rôle essentiel dans la reconstruction de nos blessés, et elle mérite par conséquent notre attention et notre soutien. Les familles confrontées à ce type de situation sont plongées dans une grande souffrance, qui demeure souvent muette. Toute cette souffrance, tous ces sacrifices consentis doivent être entendus et reconnus par la Nation.
Il est vrai que notre législation permet à nos blessés de guerre, et à leurs familles, de bénéficier de soins, d’aides et du soutien matériel et moral nécessaires à leur réinsertion dans la société civile. Bien sûr, il existe déjà des structures spécialisées au service des blessés et de leurs familles, comme les cellules d’aide aux blessés et la sous-direction de l’action sociale de la défense. J’en profite pour saluer les nombreuses actions de ces structures, ainsi que celles du monde associatif, qui jouent un rôle actif et primordial dans la réinsertion des blessés de guerre dans notre société et dans le soutien aux familles.
La proposition de loi de mon collègue Olivier Audibert-Troin a pour objet de créer une carte de famille de blessé de guerre, délivrée par le ministère de la défense aux familles de victimes d’une blessure de guerre homologuée par ce même ministère. Cette carte constituerait la matérialisation symbolique de leur contribution à la défense de notre pays. Elle est une affirmation de l’appartenance de ces familles à la communauté de défense.
D’autres mesures symboliques ont déjà été votées par notre assemblée. Par exemple, l’insigne de blessé de guerre, attribué à nos héros de guerre, a été créé en 1916 et formalise la reconnaissance de la Nation, sans y attacher aucun droit. C’est la même logique que nous poursuivons avec l’introduction de cette carte, destinée, quant à elle, à leurs familles. Pas plus que l’insigne de blessé de guerre, cette carte ne vise l’octroi d’un avantage matériel – d’autres dispositifs y pourvoient – mais bien la manifestation de la reconnaissance qui, elle, n’a pas de prix. Rien ne s’opposera à ce que des initiatives publiques ou privées conditionnent certains avantages non matériels à la possession de cette carte. Ceux-ci devront toujours être en lien étroit avec la communauté de défense – je songe par exemple à la participation à des commémorations patriotiques ou à la possibilité de témoigner.
Le présent texte insiste sur le fait que cette carte ne peut ni être attribuée de façon systématique, ni être sollicitée directement par la famille – certains blessés ne souhaitant pas s’afficher en tant que blessé. De même, l’homologation de la blessure de guerre par le ministère de la défense relève d’une démarche purement volontaire. Quant aux modalités d’application de cette proposition, leur définition est volontairement laissée au ministère de la défense, mieux à même de les imaginer. Elles doivent être les plus simples possibles.
Certaines pistes sont d’ailleurs envisagées par notre rapporteur, comme celle de lier à l’homologation de la blessure de guerre un formulaire d’attribution de la carte pour les familles, ou celle de remettre l’insigne de blessé de guerre, en même temps que cette carte, au cours d’une cérémonie solennelle, ce qui serait particulièrement apprécié des familles et, plus généralement, des Françaises et des Français.
Le retour d’un mari, d’une femme, d’un père ou d’une mère, d’un frère ou d’une soeur blessé est une épreuve souvent invisible, que doivent endurer les familles. Elles méritent toute notre reconnaissance et ce geste, certes symbolique, est la moindre des choses que nous puissions faire. Je ne doute pas que nous serons tous prêts, sur l’ensemble de ces bancs, à faire un tel geste.
Le groupe Les Républicains vous invite donc à voter unanimement cette proposition de loi.