Intervention de Philippe Gosselin

Réunion du 30 janvier 2013 à 11h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Quelques remarques pour commencer. D'abord, je m'étonne que cette réforme nous arrive ainsi, à la découpe, sans que nous ayons de vision d'ensemble des réformes électorale et territoriale à venir. Il est également permis de s'interroger sur la volonté de reporter le renouvellement des grands électeurs après les élections sénatoriales. Enfin, le Sénat, qui fut à une époque le « Grand conseil des communes de France », a rejeté ce texte.

Il faut dire que le monde entier va nous envier ce nouveau mode de scrutin ! Comme je l'ai dit la semaine dernière, lorsqu'une collègue écologiste nous a proposé une coprésidence des groupes politiques : il n'y a pas de place pour deux crocodiles dans le même marigot… Il faut bien qu'à un moment une seule personne dispose de la plénitude des pouvoirs, et l'on voit bien à quelles difficultés pratiques se heurtera le partage d'un même territoire par deux légitimités. On me répondra que ce n'est pas à la loi d'imposer un mode de fonctionnement et qu'il faudra trouver, humainement et politiquement, un modus vivendi ; soyons honnêtes : personne n'y croit – et pas seulement sur les bancs de l'UMP !

La ruralité ne doit pas être l'oubliée de la réforme. Bien sûr, dans une démocratie, le principe de l'élection, c'est « un homme, une voix ». Toutefois, il ne s'agit pas d'une règle absolue : il existe d'ores et déjà plusieurs procédés permettant de la tempérer – comme les seuils de population – et je rappelle que le Sénat n'y est pas soumis. Il conviendrait de procéder à des aménagements, en introduisant pour le redécoupage cantonal d'autres critères, comme la ruralité ou le caractère montagnard de certains territoires, dans un souci de proximité. Si les dispositions du projet de loi étaient appliquées, la Manche, qui compte 601 communes, verrait son nombre de cantons réduit de 52 à 26 : les territoires à couvrir seraient bien trop vastes, même pour deux !

S'agissant des conseillers communautaires, il convient de noter que dès lors qu'on les désigne par fléchage, on les désigne au suffrage universel direct, ce qui soulève une nouvelle fois la question du statut des EPCI, qui sont des établissements publics, et non des collectivités territoriales de plein exercice.

Enfin, le seuil des 1 000 habitants pour l'élection des conseillers municipaux au scrutin de liste et, plus encore, la proposition de la présidente de la délégation aux droits des femmes de supprimer tout seuil, traduisent une méconnaissance du fonctionnement de nos collectivités : comment faire des listes paritaires dans des communes de 300 ou 400 habitants ? Le mieux est parfois l'ennemi du bien !

Cela traduit aussi une méconnaissance des pratiques électorales dans les communes rurales : les élections municipales ne s'y réduisent pas à un panachage d'individualités ! Il serait dangereux de les politiser à l'extrême en imposant des listes : dans les petites collectivités, les ressorts de l'élection ne sont pas les partis politiques, mais les intérêts locaux. Prenons garde aux dérives !

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