Nous avons besoin de notre industrie chimique, ne serait-ce que pour satisfaire les besoins des autres industries. Nous avons également besoin de garder l'industrie chimique en France, car la délocalisation n'est en rien une solution : quand elle se fait en Chine ou en Inde, les conditions de production sont bien pires que celles en usage sur notre territoire – sans compter que les produits chimiques doivent ensuite être transportés vers la France, sur des navires que l'on peut souvent qualifier de bateaux-poubelles : en la matière, le transport de produits pétroliers a déjà donné lieu à de multiples désastres.
Dans le monde industriel, on est passé du mot d'ordre : « Produis et tais-toi ! », en vigueur il y a encore vingt ans, à une meilleure information sur les risques et les plans de prévention, largement pratiquée par les grands groupes, sur la base d'audits réalisés par les opérateurs eux-mêmes. Cette amélioration des pratiques permet de limiter les risques, donc de réduire le nombre d'accidents. Cela dit, le risque zéro n'existe pas.
Un audit d'EDF a récemment mis en évidence les dangers de l'externalisation. Je serais personnellement favorable à une loi qui interdirait que la responsabilité des entreprises du secteur de l'industrie chimique soit transférée à un sous-traitant, car de nombreux incidents, et même quelques accidents, sont survenus à la suite de l'intervention de sous-traitants, devenue très fréquente sur les sites industriels.
Si les risques sont plutôt bien gérés sur les sites industriels, il n'en va pas de même hors site. Il se trouve dans ma circonscription un site où se trouve stocké du butadiène. Ce produit présentant un risque élevé d'explosion au contact de l'air, il est contenu dans des cuves étanches et enterrées, ce qui permet de réduire le rayon d'impact selon le classement Seveso sur le site même. Cependant, il est très fréquent que des wagons-citernes restent stationnés plusieurs jours d'affilée dans la gare de la commune sans aucun contrôle : des enfants qui étaient montés sur ces wagons ont même été électrocutés. Quand on s'en émeut auprès du préfet, il répond que ce n'est pas son administration qui est compétente, mais j'aimerais bien savoir qui serait responsable si les trente ou quarante wagons-citernes stationnés en gare venaient à exploser ! Cet exemple n'est d'ailleurs pas isolé : ainsi l'ammoniac, largement utilisé sur les sites industriels, constitue-t-il également un risque très élevé.
En matière de stockage, j'ai remarqué que le gros réservoir d'hydrogène qui se trouvait autrefois sur le site industriel de ma commune – afin de servir de réserve d'urgence à un four qui ne doit jamais être éteint – a été remplacé, pour des raisons de sécurité, par une multitude de stockages de taille plus réduite : fort bien, mais nul ne sait si une première explosion ne déclencherait une suite d'explosions en cascade…
Pour ce qui est de l'environnement, n'oublions pas que ce sont souvent les maisons qui sont venues s'agglutiner autour des sites industriels, et que l'État a souvent eu tendance – cela a été le cas dans ma circonscription – à modifier le tracé de la zone inconstructible autour d'un site afin de pouvoir construire tel ou tel équipement public, par exemple une autoroute. Enfin, il me semble que les PPRT et les plans de prévention du risque inondation (PPRI) sont parfois élaborés en catimini, et pas toujours suivis scrupuleusement. Pour toutes ces raisons, il faut renforcer le rôle des élus et des citoyens, mais aussi des CHSCT, sur les sites industriels.