Intervention de Maxime Saada

Réunion du 1er juin 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Maxime Saada, directeur général du groupe Canal :

J'ai senti dans cette salle un grand attachement à Canal+, ce dont je me réjouis, mais aussi beaucoup d'inquiétudes, parfois légitimes.

J'ai intégré, en avril 2004, le groupe Canal+ qui sortait alors d'une passe difficile : sa dette de 5 milliards d'euros avait été recapitalisée par Vivendi, déjà, à hauteur de 3 milliards, et deux plans sociaux venaient d'avoir lieu sous la houlette de Bertrand Meheut qui m'a recruté, et avec lequel j'ai fait l'essentiel de ma carrière au sein du groupe. Rodolphe Belmer, qui était mon ami, m'a fait venir chez Canal+. Je rappelle ces éléments pour vous dire que je suis attaché à un certain nombre de personnes qui ont quitté Canal+.

Je crois aussi que je connais la réalité du groupe. J'ai été, à mon arrivée, directeur de la stratégie pendant trois ans, puis directeur du marketing, directeur commercial, et patron de la distribution, c'est-à-dire de tout ce qui produit le chiffre d'affaires réalisé en France métropolitaine par le groupe, avant de prendre la direction des antennes, sous la responsabilité de Rodolphe Belmer, il y a trois ans.

Je salue la mémoire d'André Rousselet. Nous sommes tous très émus chez Canal+ ces jours-ci, car ce dernier a, encore aujourd'hui, une importance considérable dans l'esprit des équipes.

La stratégie internationale ne se fonde pas sur une volonté de se focaliser sur l'international : elle est une question de survie. On ne peut plus aujourd'hui exister en tant que groupe média si l'on n'a pas d'approche internationale. La concurrence des GAFA n'est pas potentielle : elle est malheureusement bien réelle aujourd'hui même.

Nous sommes par exemple régulièrement privés de programmes par ces acteurs qui peuvent acheter sur une base mondiale, alors que nous ne nous appuyons que sur quelques territoires. Nous n'avons pas accès à certaines séries produites par les Américains ou d'autres pays étrangers parce que Netflix fait des offres sur cent pays. Même si notre offre est très attractive sur le territoire français, voire supérieure à celle de nos concurrents pour notre pays, l'ayant droit va préférer un Netflix ou un Amazon. Depuis plus d'un an, avec l'arrivée de Netflix en France, il nous est arrivé régulièrement de perdre des programmes. Cela concerne également les autres acteurs nationaux – vous avez certainement appris que TF1 et Netflix avaient passé un accord pour la diffusion d'une série. Tout le PAF est fragilisé face à des acteurs internationaux qui peuvent acquérir des programmes sur une base mondiale.

C'est également vrai dans le domaine des droits sportifs : Eurosport a raflé les Jeux olympiques au nez et à la barbe de France Télévisions. Ce n'est pas nous qui sommes privés des JO pour les deux prochaines éditions – nous avons un accord avec France Télévisions qui nous les sous-licencie –, mais le service public, sous réserve d'un éventuel accord avec l'entreprise américaine Discovery, maison mère d'Eurosport. Nous pensons en conséquence que, pour survivre, et pour avoir accès à des programmes qui sont parfois considérés comme les meilleurs de leur catégorie, il est absolument nécessaire d'avoir une empreinte géographique qui dépasse le cadre du territoire français.

Nous sommes évidemment très attachés à la singularité de Canal+. Nous ne pensons pas faire une télévision « comme les autres » ni une télévision « classique ». Cela dit, toute une partie des gens qui faisaient la chaîne, à l'époque où régnait ce que certains appellent aujourd'hui « l'esprit Canal », récusent totalement ce terme. C'est le cas, par exemple, de Dominique Farrugia des Nuls, pour ceux qui le connaissent. J'étais avec lui hier…

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