En effet. Aujourd'hui, avec la création du CFCM et d'autres organisations, des relations se nouent entre les autorités publiques et les responsables musulmans. Je comprends tout à fait qu'on soit étonné de cette évolution mais nous ne sommes plus dans une France fermée : nous sommes en train de vivre la mondialisation – qui implique aussi que les musulmans puissent vivre leur foi.
Je reviens sur la formation. Le 15 juin 2015 s'est réuni au ministère de l'intérieur un groupe de travail devant élaborer un guide pratique, réunion au cours de laquelle nous avons fait des propositions. En attendant leur éventuelle prise en compte, nous continuons à accompagner les abattoirs avec lesquels nous travaillons pour mettre en place une formation pratique des sacrificateurs. La réglementation imposant qu'on ne peut pas abattre plus d'animaux qu'il n'en est commandé, il faudrait que nous puissions former nos sacrificateurs en abattoir. Nous-mêmes avons mis en place une formation de sacrificateur, nous délivrons un certificat de compétence.
Nous proposons par ailleurs que soit imposée une contention dans des boxes rotatifs afin de réduire le stress de l'animal lors de sa contention debout, et afin d'éviter, lors du sacrifice, la présence de sang dans la trachée, et l'aspiration de sang dans les bronches, ce qui peut provoquer une réaction irritante pour l'animal. D'autre part, il est préconisé, dans le cadre de l'abattage rituel musulman, de coucher l'animal sur son flanc, position naturelle pour lui. Ensuite, il conviendrait d'adapter les boxes aux espèces d'animaux et à leur taille, ce qui implique d'aider les abattoirs à investir dans des pièges adéquats.
Surtout, il faut combattre les idées reçues et en finir avec les débats passionnels provoqués par certaines associations de défense du bien-être animal, qui partent du principe que l'abattage des animaux en général, et que l'abattage rituel en particulier, tel qu'il est pratiqué en France, est barbare. Est-ce parce que nous sommes musulmans ou juifs que nous serions des barbares ?
L'islam traite du bien-être animal depuis quatorze siècles. Nous n'avons pas attendu le XIXe siècle pour en parler. Et il a fallu attendre 1964 pour voir arriver les premières dispositions en la matière. J'ai participé, en compagnie du rabbin Fiszon, à toutes les réunions en Europe sur la question – car nous faisons partie de cette Europe : est-ce à dire que nous serions d'une autre planète ? Je suis Français et fier de l'être, mais je suis aussi musulman et, comme le soulignait le grand rabbin de France tout à l'heure, on ne peut pas nous demander de n'être qu'une moitié de nous-mêmes.
Il y a une volonté de détruire l'élevage en France, et particulièrement chez les membres de l'association L214 qui veut faire de nous des végétariens. Nous sommes respectueux des lois et c'est pourquoi nous acceptons de venir discuter avec vous et afin de trouver, avec vous et avec personne d'autre, des solutions qui tiennent compte de nos convictions religieuses.