Intervention de Hervé Mariton

Réunion du 4 juillet 2012 à 12h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton :

Au nom du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, je donne acte au Gouvernement d'un changement formel : la couleur rouge de la jaquette du document, et le novlangue puisque « augmentation d'impôts » se dit « première étape de la réforme fiscale dans la justice ». Les engagements du Président de la République sont numérotés, mais nous attendons avec intérêt la liste de ceux qui ne seront pas honorés. Ainsi le Premier ministre a-t-il évoqué hier l'« augmentation » du plafond du livret A, terme plus pudique que celui de « doublement » que les Français ont entendu il y a quelques semaines.

Quant au fond, messieurs les ministres, sur la TVA sociale, vous présentez une contre-réforme. C'était, il est vrai, prévisible, comme l'a dit M. Cahuzac. Mais M. Moscovici a souligné à juste titre le déficit de compétitivité de notre pays et l'urgente nécessité d'y remédier. Or la TVA sociale était une mesure intelligente et nouvelle permettant justement d'améliorer la compétitivité. Vous allez donc continuer de dépenser beaucoup d'argent, notamment pour financer une ribambelle d'agences destinées à promouvoir nos entreprises et notre industrie à l'étranger, au lieu de reconduire des mesures structurelles adaptées à votre objectif ! En outre, en instaurant la TVA sociale, on avait créé un compte de concours financiers qui sécurisait les circuits de financement de la protection sociale. Si l'on peut comprendre le choix idéologique qui vous conduit à abroger la TVA sociale, comment accepter que vous supprimiez aussi ce dispositif sans rien proposer en échange ?

Deuxièmement, le président l'a dit, la suppression de l'exonération de la part salariale représente une perte de pouvoir d'achat de 2,8 milliards d'euros pour certains de nos concitoyens qui n'appartiennent manifestement pas aux catégories les plus favorisées. Une dose supplémentaire d'1,5 milliard d'euros est à prévoir dans le budget pour 2013, ce qui représente au total 4,3 milliards de pouvoir d'achat en moins ! Voilà une information parfaitement claire qui ressort du projet de loi de finances rectificative. Comment de telles mesures pourraient-elles contribuer à la relance de la consommation dont vous parlez tant ?

Enfin, votre fascination pour l'impôt produit ici les effets désastreux que l'on pouvait redouter. Après avoir entendu tout à l'heure les représentants de la Cour des comptes, nous disposons maintenant de vos chiffres. Le projet de loi de finances rectificative représente 7,2 milliards d'euros de charges supplémentaires pour 90 millions non d'économies, mais de redéploiements sous forme de crédits supplémentaires destinés à l'éducation. Pour le cas où nos concitoyens n'auraient pas une idée claire de nos positions respectives : lorsqu'il s'agit de redresser les finances publiques, nous sommes plutôt favorables aux économies sur les dépenses quand vous privilégiez les impôts. On peut d'ailleurs en débattre, sans pratiquer le « tout ou rien ». Mais ici, c'est tout ou rien : 7 milliards d'euros d'augmentation de charges, pour 90 millions de réaffectation de dépenses ! La répartition de ces 90 millions n'est pas dénuée d'intérêt. Un tiers concerne par exemple la défense, dont le budget représente, rappelons-le, 10 % des autorisations d'engagement ; en d'autres termes, pour s'en tenir à ce modeste exemple, la défense paie trois fois sa part. Pourquoi le Gouvernement s'éloigne-t-il à ce point des préconisations de la Cour des comptes quant à l'équilibre entre recettes nouvelles et économies ?

Quelques questions pour finir. Nombre de dépenses annoncées par le Gouvernement ne figurent pas dans le projet de loi de finances rectificative car elles relèvent du volet social. Le Gouvernement s'engage-t-il à présenter un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative ? Dans le cas contraire, pourquoi ? Car il serait bien dommage de ne pas le faire.

J'ai cru par ailleurs comprendre, messieurs les ministres, que l'alourdissement de l'ISF avait fait tiquer le Conseil d'État, qui craint une mesure inconstitutionnelle car confiscatoire. Par quel raisonnement juridique le Gouvernement en justifie-t-il la constitutionnalité ?

Parmi les recettes de poche et les travers traditionnels des présentations du budget, convenez que les 800 millions d'euros que vous récupérez au titre du versement anticipé de l'impôt sur les sociétés ne sont qu'une facilité de trésorerie pour 2012, et ne doivent rien à la vertu.

J'aimerais en dernier lieu que l'on m'éclaire sur un point que je n'ai pas bien compris dans le discours que le Premier ministre a prononcé hier. Y a-t-il un seul mot de différence entre le traité sur la stabilité, la coopération et la gouvernance dont vous allez soumettre la ratification à l'autorisation du Parlement et celui qui a été signé par le précédent gouvernement ?

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