Je m'exprimerai au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen. Vous l'avez rappelé, monsieur le ministre des finances, le déficit de nos finances publiques atteint 5,2 % en 2011, contre 1 % en Allemagne. Pourquoi cet écart alors que les deux pays étaient en déficit excessif en 2005 ? L'audition des représentants de la Cour des comptes l'a montré : l'Allemagne a réduit son déficit avant la crise, avant l'été 2008, alors que la France l'a laissé dériver. Il en est résulté cinq années de déficit structurel compris entre 3,3 % et près de 5 %, ce qui ne s'était jamais vu – je rappelle que le déficit structurel correspond au déficit que nous aurions connu sans la crise.
Par le présent PLFR, le Gouvernement dessine la voie étroite qui permet de réduire les déficits tout en soutenant la croissance et l'emploi. Vous corrigez ainsi de 7,2 milliards d'euros la dérive de l'année 2012, messieurs les ministres, par des mesures qui soutiennent la croissance et l'emploi tout en supprimant des dispositifs injustes et inefficaces comme les niches fiscales. Ces mesures représentent 13 milliards d'euros de réduction des déficits en année pleine, ce qui constitue la première étape d'une politique de redressement dans la justice.
Vous supprimez des niches fiscales et sociales qui ont pour effet de miter nos impôts et de les rendre profondément injustes.
Vous supprimez un dispositif qui nuit lourdement à la croissance : la TVA « sociale » ou « anti-délocalisation » – peu importe le nom dont on l'affuble –, dont nous avons longuement débattu ici même et qui consistait pour l'essentiel, comme vous l'avez dit, à saupoudrer des recettes sur un secteur non concurrentiel puisque 8 milliards d'euros allaient aux services, contre 3,3 milliards seulement à l'industrie. En outre, l'effet de la mesure est profondément dépressif. Je ne connais pas l'évaluation qu'en livre aujourd'hui Bercy, mais j'ai souvenir, dans la longue histoire de la TVA sociale, d'un ministre des finances qui expliquait en 2004 devant la commission des finances du Sénat, dont le président était un passionné de ce dispositif, qu'un point de TVA représentait selon ses services 0,9 % de croissance en moins et que l'allègement de cotisations correspondant n'aboutissait qu'à 0,4 % de croissance en plus, si bien qu'un point de TVA équivalait à un demi-point de croissance en moins. Ce ministre s'appelait Nicolas Sarkozy. Je ne sais si d'autres évaluations ont été réalisées depuis ; mais à l'heure où notre croissance est limitée par l'augmentation insuffisante du revenu, la suppression de la TVA sociale – neutre du point de vue budgétaire, voire susceptible de rapporter un peu d'argent – est bienvenue car elle permet de la stimuler.
Vous supprimez également cette arme de destruction massive de l'emploi qu'est la subvention des heures supplémentaires. Comment a-t-on pu appliquer des années durant, alors que le chômage augmentait, une mesure qui aurait pu avoir un sens au temps du plein-emploi, dans les années cinquante, mais qui est totalement absurde dans le contexte actuel ? Comme l'expliquent fort bien les instituts de conjoncture, en période de chômage, elle n'a d'autre effet que de substitution : ce que l'on croit gagner sur le pouvoir d'achat de ceux qui occupent un emploi, on le perd sur le pouvoir d'achat de ceux qui n'en ont plus. En annulant ce dispositif, non seulement vous recouvrez des recettes, mais vous mettez fin à une mesure qui revenait à supprimer quelque 90 000 emplois selon les évaluations d'instituts privés.
Le projet de loi de finances rectificative taxe la rente en instaurant une contribution sur les produits pétroliers, en augmentant la taxe bancaire de risque systémique et en revenant sur la réforme des droits de succession contenue dans la loi TEPA – autant de mesures destinées à orienter l'épargne vers l'investissement. Et la contribution de 3 % sur les dividendes distribués favorise l'investissement, comme l'a dit M. Cahuzac.
Jointes aux mesures de revenu que sont la hausse du SMIC et celle de l'allocation de rentrée scolaire, ces dispositions constituent les premiers éléments d'une politique économique qui tend à réduire le déficit, à réorienter notre pays vers la croissance et l'emploi et à rétablir la confiance. De même que celle-ci constitue, comme l'a dit M. le ministre des finances, un facteur essentiel de croissance, de même une politique de justice sociale est une source majeure d'efficacité économique. Voilà qui résume bien ce projet de loi de finances rectificative.