Intervention de Dominique Martin

Réunion du 28 juin 2016 à 9h30
Commission d'enquête sur la fibromyalgie

Dominique Martin, directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, ANSM :

Il est certain que la fibromyalgie est – au minimum – un syndrome qui préoccupe l'ensemble des acteurs que vous venez de mentionner, comme les associations spécialisées, le site Orphanet, portail des maladies rares, ou certains professionnels de santé qui se sont mobilisés autour du sujet. Et l'on peut imaginer assez aisément que, dans cet environnement, les industriels puissent avoir le souhait de développer des produits. Cela étant, il faut éviter les confusions. On reproche parfois à l'industrie pharmaceutique de vouloir couvrir des situations, comme la calvitie, qui ne relèvent pas de pathologies, en les présentant comme des maladies identifiées pour lesquelles il existerait des traitements. En l'occurrence, la situation est tout de même différente : la fibromyalgie est une réalité syndromique incontestable. Je suis directeur général de l'ANSM, mais je suis aussi psychiatre de formation, et j'ai eu à traiter des cas de fibromyalgie, y compris de patients qui étaient en fauteuil roulant.

Certes, on ne sait pas définir la fibromyalgie et en faire une pathologie parfaitement identifiée, on n'en connaît pas les causes, mais il est difficile de nier que des personnes souffrent énormément et que leur autonomie peut être gravement atteinte. Elles présentent des syndromes très invalidants – douleur, très grande fatigue, troubles du sommeil, troubles dépressifs –, qui, dans les cas extrêmes, peuvent les conduire à une quasi-immobilité.

On assiste cependant à une évolution. La fibromyalgie a été reconnue par l'organisation mondiale de la santé (OMS), mais aussi par l'Académie nationale de médecine laquelle n'en a pas fait une pathologie, mais en a reconnu la réalité. Le rapport d'orientation de la HAS reconnaît ce syndrome et sa fréquence puisque sa prévalence est évaluée entre 2 % et 4 % de la population. Ce n'est pas négligeable, même si les situations mineures sont nombreuses et les situations plus graves qui peuvent conduire au fauteuil roulant restent exceptionnelles. Ce syndrome est au moins sociétalement pris en compte dans notre pays, même si l'on n'en a pas encore tiré toutes les conséquences, probablement en raison de la difficulté à en établir les bases, les limites, les contours, comme on sait le faire dans la plupart des pathologies. Il est difficile de le caractériser sur un mode classique, comme on le fait dans la nosographie.

J'ajoute, monsieur le Rapporteur, et sans être ironique, que, s'il y a vraiment une pression de l'industrie pharmaceutique, elle n'a pas encore donné de résultats, puisque, pour les raisons que j'ai évoquées, il n'y a pas, sur le territoire européen, de médicament spécifiquement dédié à la fibromyalgie.

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