Intervention de Christophe Premat

Réunion du 29 juin 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Premat :

Au nom du groupe socialiste, écologiste et républicain, je vous remercie, madame la présidente, pour votre présentation et pour l'état des lieux général que vous venez d'exposer.

On le sait, le CNC est l'acteur incontournable du cinéma français et plus largement de la création sous toutes ses formes, qu'il s'agisse du cinéma bien sûr, avec les courts et les longs-métrages ou les films d'animation, des programmes audiovisuels et des documentaires, des oeuvres numériques mais aussi de la création dans le secteur des industries techniques et du multimédia.

Vous avez fort justement rappelé les enjeux actuels et futurs auxquels est confrontée l'institution que vous présidez.

Le premier sujet sur lequel je souhaiterais vous interroger concerne la place et le rôle du CNC à l'échelle européenne : qu'en est-il de la déterritorialisation des aides au cinéma ?

M. Éric Garandeau, votre prédécesseur à la tête du CNC, se déclarait en 2012 opposé au projet de la Commission européenne visant à créer un marché unique de l'audiovisuel et à instaurer une négociation des aides à l'échelle communautaire, en raison de la menace que cela ferait à ses yeux peser sur l'écosystème du cinéma français. Ce qui était vrai en 2012 ne l'est plus forcément quatre ans plus tard. Quand on observe le nombre croissant de films français qui, pour des raisons fiscales, se tournent dans d'autres pays européens, je pense à la Belgique notamment, on ne peut que se féliciter du relèvement à 30 % du taux du crédit d'impôt, mécanisme qui n'a cessé d'être réadapté sans parvenir à un modèle parfaitement opérationnel.

La question de la territorialité se pose également à travers l'accès aux plateformes numériques de films et d'oeuvres audiovisuelles. Le projet de marché unique numérique a pour objectif d'éliminer les barrières qui résultent souvent de législations ou de pratiques dépassées. Pensons à la limitation de l'accès à des biens ou à des services selon le pays de résidence de la personne à travers le blocage géographique. J'aimerais avoir votre réponse à une question que j'ai eu l'occasion de poser aux différents dirigeants de groupes de médias audiovisuels reçus par cette commission : pourquoi n'est-il pas possible d'accéder depuis un autre pays aux contenus, films ou autres subventionnés par le CNC sur les plateformes nécessitant un abonnement comme CanalPlay ou Netflix ? Comment le CNC compte-t-il contribuer à abattre les frontières du numérique ?

S'agissant de Canal +, la politique pour le moins téméraire menée par les nouveaux dirigeants de ce groupe assure-t-elle au CNC un partenariat stable ? Que penser des propos de son président qui s'est voulu rassurant en renouvelant les engagements de la chaîne sur cinq ans, jusqu'en 2020 ? Quelle conséquence aura, selon vous, l'opposition de l'Autorité de la concurrence au projet de distribution exclusive passé entre beIN Sport et Canal +, accord auquel le Bureau de liaison des organisations du cinéma (BLOC), qui rassemble quatorze organisations représentant les indépendants de l'industrie, s'était déclaré favorable ? L'enjeu est d'importance sachant que la chaîne, qui devient de plus en plus cryptée, est soumise à l'obligation d'investir 12,5 % de ses revenus dans des films européens, dont 10 % de films français ? N'y a-t-il pas là un risque que l'assiette sur laquelle reposent ces taux soit modifiée, se limitant au seul chiffre d'affaires lié au cinéma au lieu de comprendre également les revenus tirés du sport ? Que penser de la volonté du nouveau président de Canal + de concentrer ses investissements sur les films à succès au lieu de les disperser sur une centaine d'oeuvres chaque année ?

Un autre point que je voulais évoquer rapidement est le lien entre le CNC et l'Institut français, via IFcinéma, plateforme de diffusion non commerciale de l'Institut français destinée au réseau culturel français dans le monde, à ses partenaires et aux enseignants de français, qui propose, sur son catalogue en ligne, environ six cents titres français ou en co-production française. Quel regard portez-vous sur le programme « Éducation au cinéma » mis en oeuvre par l'Institut français en partenariat avec le CNC, qui s'inscrit dans le cadre de la convention signée à Cannes en mai 2014 ? Quel est selon vous l'avenir de ce dispositif ?

Enfin, je terminerai mon propos en me réjouissant de l'accord trouvé entre le CNC et les distributeurs pour défendre les « petits films », ces longs-métrages d'art et d'essai ou entrant dans la catégorie du cinéma de recherche qui sortent avec moins de dix copies. J'ai cru comprendre que c'était l'une des annonces que vous aviez faites lors du dernier Festival Cannes et souhaitais souligner cette bonne nouvelle.

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