Cette proposition de loi est à la fois tardive, car la crise affectant le secteur des taxis ne date pas d'hier, et incomplète puisque, comme vous l'avez dit vous-même, monsieur le rapporteur, elle ne règle pas la question du rachat des licences ni celle de l'effectivité des contrôles de police. Même si nous aurions tous souhaité qu'il aille plus loin, ce texte va cependant dans la bonne direction.
Au sein de l'économie collaborative, le transport de personnes est confronté aux mêmes enjeux, aux mêmes menaces et aux mêmes opportunités que tous les autres secteurs d'activité. Afin de répondre aux défis qui se présentent en la matière, il est nécessaire de mettre en place des systèmes de régulation, de protection et de partage de la richesse qu'il nous faut parfois créer de toutes pièces, compte tenu de la rapidité de l'évolution de l'économie numérique.
C'est la tâche à laquelle vous vous êtes attelé, monsieur le rapporteur, en prenant pour point de départ une vraie concertation avec les organisations syndicales du secteur des taxis. Comme celles-ci, on ne peut que regretter l'extrême violence du dumping social auquel sont actuellement confrontés les taxis, résultant d'une concurrence violente et non maîtrisée, ainsi que d'une absence quasi totale du contrôle de légalité des nouveaux entrants. L'esclavagisme existe, comme on peut en faire le constat en montant à bord d'un taxi ou d'un VTC, et nous tenons à exprimer notre solidarité vis-à-vis de ces professions sinistrées.
Si ce texte va dans le bon sens, grâce au renforcement de la réglementation sur les pratiques de réservation, à l'instauration d'une formation continue, et à la fin du détournement juridique des services occasionnels des LOTI, qui exercent de manière illégale les mêmes activités que les VTC, force est de constater que demeurent des zones floues, c'est-à-dire des questions auxquelles il n'est pas apporté de réponses crédibles – nous présenterons des amendements afin d'y remédier.
À l'article 2, il est proposé de recueillir enfin des données fiables et précises. Si l'intention est louable, elle avait déjà donné lieu à une proposition similaire dans le cadre de la loi Thévenoud, ayant abouti au projet de création d'un registre national de disponibilité des taxis, qui n'a pas été concrétisé jusqu'à présent.
À l'article 4, relatif aux LOTI, on s'étonne de lire dans l'exposé des motifs que « les capacitaires LOTI souhaitant continuer leurs activités occasionnelles avec véhicules légers pourront s'enregistrer en tant qu'exploitants VTC, leur permettant ainsi de pérenniser leur activité » et qu'« afin de faciliter la transition de LOTI à VTC pour les entreprises et les chauffeurs concernés, des mesures transitoires seront définies par décret en Conseil d'État » : on s'apprête donc à faciliter la transformation en VTC des LOTI, qui ont pourtant exercé de manière illégale une concurrence déloyale vis-à-vis des taxis et des VTC. C'est le monde à l'envers ! Sur ce point aussi, nous proposerons des amendements.
Enfin, la pierre d'achoppement reste le rachat des licences, car il faudra engager des moyens importants pour régler définitivement le problème – et en la matière, il y a loin de la coupe aux lèvres, même si les efforts correspondants sont censés être répartis sur les prochaines années. De même, l'effectivité des contrôles de police doit être améliorée en faisant en sorte, comme cela a été le cas dans plusieurs grandes métropoles, notamment à Londres, que les taxis soient régulés par la collectivité locale investie du pouvoir de police ad hoc : on peut comprendre que ce ne soit pas actuellement la priorité de l'État, mais il faut absolument travailler sur une décentralisation de certaines de ses compétences, et que l'on alloue des moyens aux collectivités afin qu'elles soient en mesure d'assumer un rôle de régulation dans le secteur du transport de personnes.