Intervention de Olivier Marleix

Réunion du 5 juillet 2016 à 9h00
Commission d'enquête relative aux moyens mis en œuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis le 7 janvier

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Marleix :

Pour ma part, j'ai lu l'intégralité du rapport et je suis d'accord avec l'essentiel de ses propositions. Je félicite le président et le rapporteur du travail considérable qu'ils ont accompli.

Je regrette toutefois que le rapport escamote quelques points particulièrement problématiques.

Premièrement, en ce qui concerne la genèse du 13 novembre, l'enquête statuera précisément, mais je suis frappé qu'aucun de nos interlocuteurs n'ait évoqué comme un possible tournant la date du 7 septembre 2015, c'est-à-dire le moment où le Président de la République a décidé l'intervention en Syrie. Personne n'a dit qu'à partir de ce moment nous aurions dû être en alerte maximale. Je regrette qu'il ait fallu attendre le Bataclan pour que cela devienne le cas. Il y a eu là une défaillance : nous aurions dû mieux anticiper les risques de réplique.

Deuxièmement, en ce qui concerne le Bataclan, le rapporteur écrit que « le déclenchement de la FIPN [Force d'intervention de la police nationale] aurait vraisemblablement eu un effet limité ». Personnellement, je regrette que la décision politique de faire intervenir le RAID comme force menante n'ait pas été prise, au vu du risque encouru. Je note d'ailleurs qu'en présentant le nouveau schéma national d'intervention, le 19 avril, le ministre de l'intérieur a assumé le fait d'avoir lui-même déclenché la FIPN le 9 janvier. Je ne considère pas pour ma part que ce nouveau schéma d'intervention inscrive une doctrine d'intervention dans le marbre : il sert plutôt à justifier a posteriori ce qui a été fait au Bataclan, et la doctrine sera certainement amenée à évoluer à l'avenir.

Troisièmement, en ce qui concerne la réforme du renseignement, je partage l'analyse du rapporteur : nous ne sommes pas allés au bout de la démarche. Le rapporteur insiste beaucoup sur la séparation de fait entre le service territorial – la sous-direction de l'information générale (SDIG) – et la DCRI. Il me semble que la séparation entre DGSI et DGPN était encore plus grave, ou du moins qu'elle a aggravé la situation, et que la création de l'EMOPT était une manière d'en prendre acte. Mais vous formulez des propositions afin de résoudre le problème, monsieur le rapporteur.

Je suis également tout à fait d'accord pour dire que le coordonnateur national du renseignement n'a pas trouvé sa place et doit être transformé, comme l'a également souligné Pierre Lellouche, en un véritable directeur national du renseignement.

Quatrième point – le plus important peut-être : la manière dont nous avons envisagé, depuis 2015, le retour des djihadistes engagés sur des théâtres d'opérations en Irak et en Syrie constituait une véritable faute politique. Celle-ci n'est pas l'apanage de la France, mais concerne également la Belgique et d'autres pays européens. À la page 183 du rapport, le rapporteur insiste sur la différence entre l'infraction d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste (AMT) selon qu'elle est délictuelle ou criminelle et se satisfait discrètement du changement de pratique à cet égard, qui correspond à l'arrivée de M. Urvoas place Vendôme. Je suis convaincu que nous avions sous-estimé la gravité de la situation, une erreur qu'illustre bien la circulaire de présentation de la loi terrorisme prise par Mme Taubira en date du 5 décembre 2014, aux termes de laquelle les djihadistes de retour devaient être poursuivis sur le fondement de l'AMT délictuelle et en prenant moult précautions.

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