L’évolution spontanée des recettes fiscales s’est élevée à 1,7 % en 2015. Elle est positive pour la première fois depuis 2011 – il est important de le souligner. Certes, l’année 2015 a été une année record en matière de lutte contre la fraude. En effet, environ 40 000 fraudes, notamment sociales, ont été détectées l’année dernière pour un montant de 247,8 millions d’euros. Les bonnes rentrées fiscales sont essentiellement dues à un rendement élevé du contrôle fiscal, en hausse de 1, 8 milliard d’euros pour atteindre 12,2 milliards.
Venons-en maintenant aux points négatifs, que la Cour des comptes elle-même rappelle en estimant que la situation financière de la France est profondément dégradée. La situation nette, qui est la différence entre le passif et l’actif, est aujourd’hui négative, à hauteur de 1 115 milliards d’euros.
La croissance est le premier point négatif. Elle s’explique en effet largement en 2015 par des facteurs extérieurs favorables : baisse de 40 % des prix du pétrole, politique monétaire menée par la Banque centrale européenne, reprise de l’activité en Europe. Il faut malheureusement constater que la croissance en France demeure en retrait par rapport à celle de nos voisins. La hausse du PIB a en effet atteint en moyenne 2 % dans l’Union européenne et 1,7 % dans la zone euro en 2015.
Le deuxième point négatif est le déficit. En effet, si l’exercice 2015 a été marqué par un léger recul du déficit public, qui est passé de 4 % à 3,6 % du PIB, la France reste cependant un des quatre derniers pays dont le déficit excède 3 % du PIB, avec la Grèce, l’Espagne et le Portugal. Ces deux derniers pays vont du reste connaître des sanctions inédites résultant de la déclaration par la Commission européenne d’un déficit budgétaire excessif. Nous espérons que la France ne connaîtra pas le même sort dans les années à venir.
Le troisième point négatif est la dette publique de la France qui, après avoir atteint près de 2 100 milliards fin 2015, continue d’augmenter en 2016 : l’endettement culminait fin mars 2016 à 97,5 % du PIB. Depuis 2012, la dette s’est creusée à hauteur de 230 milliards d’euros, dépassant de près de vingt points celle de l’Allemagne et de cinq points celle de la moyenne de la zone euro.
Quatrième point négatif : la maîtrise de la dépense publique avancée par le Gouvernement est artificielle. En effet, comme l’a souligné l’orateur précédent, la décélération de la dépense a, pour l’essentiel, découlé, d’une part, de la baisse de l’investissement local et de la charge de la dette, d’autre part, du recours à des coups de rabot, avec en particulier les gels du point d’indice et des prestations sociales.
Je souhaite enfin développer ce qu’est l’approbation des comptes de l’année 2015, évoquée par M. le secrétaire d’État et Mme la rapporteure générale, à travers l’image fidèle des traductions des actions de l’État. Les comptes de l’année sont un état des lieux, une photographie des réalisations, un cliché à un instant « T ». Le vote que nous exprimons traduit certes une opinion sur l’établissement des comptes, mais il porte également sur l’expression et l’approbation des actions traduites dans ces comptes.
Les députés de l’opposition à l’Assemblée nationale et la majorité sénatoriale rejettent le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2015, pour marquer clairement leur rejet de la politique budgétaire et fiscale qui a été menée l’an passé. Il ne s’agit pas d’une posture. Notre vote traduit notre désaccord avec les actions entreprises, lesquelles sont exprimées en flux financiers.
Il existe dans le secteur privé et associatif une obligation de déclenchement de procédure d’alerte : lorsqu’on constate l’existence de faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation, une procédure particulière est engagée. Notre pays pourrait à juste titre établir une démarche de même nature et mettre en place des mesures efficaces pour améliorer la situation. Or, aucune action n’est engagée dans ce cadre contre les risques qui ont un impact sur la situation budgétaire catastrophique de notre pays.
Seules des réformes structurelles permettraient d’intervenir avec efficacité sur le niveau de déficit de notre pays. Le plus inquiétant est que cela va toujours nettement moins bien en France que dans les pays comparables, alors qu’ils sont soumis aux mêmes contraintes conjoncturelles. Qu’il s’agisse des taux de chômage, ou des taux de croissance, de déficit, d’endettement, de prélèvements obligatoires ou de dépenses publiques, nous sommes toujours à la remorque de nos principaux partenaires européens.