Intervention de Isabelle Grémy

Réunion du 5 juillet 2016 à 9h30
Commission d'enquête sur la fibromyalgie

Isabelle Grémy, directrice des maladies non transmissibles et des traumatismes à l'Agence nationale de santé publique, ANSP :

Le directeur général de l'Agence nationale de santé publique – que l'on appelle aussi Santé publique France – m'a demandé de le représenter car, dans le cadre de la nouvelle organisation de cette agence, le département des maladies non transmissibles et des traumatismes serait le plus à même de prendre en charge la surveillance de la fibromyalgie.

Dans un premier temps, je souhaite vous expliquer la façon dont nous effectuons la surveillance des maladies non transmissibles. J'aborderai ensuite, en répondant aux questions que vous m'avez adressées, le cas spécifique de la fibromyalgie. Il est important que vous connaissiez le contexte contraint dans lequel nous assurons la surveillance épidémiologique dans de nombreux domaines, depuis la santé périnatale jusqu'aux maladies neurodégénératives

Cette surveillance concerne principalement les cancers, les maladies neuro-cardiovasculaires, le diabète, la santé mentale – avec un volet sur le suicide, puisque nous sommes très impliqués dans l'Observatoire national des suicides mis en place par la ministre des affaires sociales et de la santé. Nous assurons également la surveillance de tout ce qui concerne les traumatismes. S'agissant des cancers, nous assurons la surveillance de vingt-cinq localisations de cancers, et sommes également en charge du dépistage organisé du cancer et de son évaluation. Toutes les informations émanant des cent structures de gestion nous reviennent également.

Le champ de notre surveillance est donc important pour une direction qui compte cinquante personnes, réparties en quatre unités : affections cardio-respiratoires et diabète ; santé mentale, cancer et maladies neurodégénératives ; tabac, alcool et santé périnatale ; traumatismes.

La surveillance épidémiologique est faite de manière à assurer le suivi des maladies chroniques et des traumatismes, ainsi que de leurs déterminants et de leurs complications. Il s'agit pour nous de surveiller la fréquence et la gravité des pathologies, leurs tendances temporelles, les disparités géographiques et socio-démographiques, les déterminants de l'état de santé.

Comme vous le savez, on estime entre 10 et 11 millions le nombre de personnes en affection de longue durée (ALD) actuellement. Nous constatons chaque année 355 000 nouveaux cas de cancer et 148 000 décès des suites de cette maladie. Les maladies cardio-vasculaires sont responsables de 30 % des décès. Le diabète touche 5 % de la population, l'asthme 10 % des enfants et 6 % des adultes. Une personne sur deux est en surpoids, et 17 % de la population est en situation d'obésité. Les troubles neuro-psychiatriques sont la première cause d'invalidité et la quatrième cause d'ALD. Le champ de notre surveillance est donc extrêmement vaste, et encore faut-il y ajouter les décès consécutifs à des traumatismes, au nombre de plus de 30 000.

Il nous est demandé de faire la surveillance épidémiologique de l'ensemble de ces pathologies et de produire des indicateurs fiables, qui rendent compte de l'épidémiologie d'une pathologie chronique et des traumatismes. Ces indicateurs doivent être à la fois réactifs, produits en routine et déclinables au niveau infra-régional, à un niveau géographique correspondant au niveau d'action, puisque nous ne récoltons des données qu'en vue d'actions pour le suivi épidémiologique des plans de santé publique comme le plan cancer 3, le plan national nutrition-santé, le plan maladies neurodégénératives, pour n'en citer que trois parmi ceux qui sont en cours.

Le contexte de notre action est en forte évolution, le big data nous ouvrant l'accès à des bases de données de plus en plus complexes. Nous nous aidons de trois sources de données principales pour la surveillance. En premier lieu, des enquêtes transversales répétées. En deuxième lieu, des dispositifs spécifiques, tels que, par exemple, des registres de morbidité permettant de recenser de façon exhaustive, sur un territoire donné, les cas de cancer. En troisième lieu, les bases de données médico-administratives, qui proviennent pour la plupart de l'assurance maladie : elles n'ont pas été construites à des fins épidémiologiques, mais elles peuvent être utilisées à cette fin, moyennant des validations et une méthode assez complexes. Il s'agit du système national d'information interrégimes de l'assurance maladie (SNIIRAM), qui regroupe le programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI), les ALD et tout ce qui concerne les traitements et les actes médicaux.

L'utilisation de ces trois sources de données nous donne un panorama assez exhaustif des principales pathologies dont le fardeau, en termes de mortalité et de morbidité, est important. Nous privilégions la surveillance des pathologies accessibles à des mesures de santé publique. Il faut que la pathologie retenue puisse faire l'objet d'une prévention – qu'elle soit primaire, secondaire ou tertiaire, qu'elle soit sélective ou universelle – ou d'un plan de santé publique. En général, si les pathologies font l'objet d'un plan de santé publique, c'est qu'il y a matière à les faire évoluer. Ce sont les choix qui ont été faits pour établir les priorités de prévention.

Notre département a été créé en 1999. Pour lancer le plan de surveillance, nous avons eu recours à la méthode Delphi. En regroupant une centaine d'experts, nous avons essayé de définir un plan de développement de notre département et de surveillance. Naturellement, c'est le suivi des grosses pathologies des maladies non transmissibles qui a d'abord été mis en place : diabète, maladies cardiovasculaires, cancer, maladies respiratoires chroniques. La santé périnatale, la santé mentale, les maladies neurodégénératives et des approches par population – santé de l'enfant et santé des personnes âgées – sont venues s'y ajouter dans un second temps.

Telle est la façon dont Santé publique France surveille les maladies non transmissibles.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion