La fibromyalgie est un diagnostic par défaut, que l'on pose lorsque toutes les autres causes ont été éliminées. Elle est donc propice à l'errance médicale. La définition même de la fibromyalgie fait que l'on ne peut poser ce diagnostic qu'après avoir éliminé l'ensemble des autres causes rhumatismales. C'est assez compliqué, je ne sais pas comment faire pour que les problèmes de fibromyalgie soient mieux pris en charge, mais mon propos n'est pas du tout de nier ces problèmes.
Le fait est que nous ne savons pas surveiller une maladie dont la définition est aussi imprécise et dont la prévalence fait l'objet d'une variabilité aussi importante selon les critères retenus. Par exemple, entre la première enquête sur les critères de 1990 et celle réalisée avec les critères de 2010 modifiés, le rapport est passé de treize femmes pour un homme à deux femmes pour un homme.
On ne peut pas repérer la fibromyalgie dans les bases médico-administratives. Elle a un seul code selon la classification internationale des maladies (CIM) : M79.7. J'ai fait une recherche avec ce code dans les bases de données médico-administratives, en diagnostic principal et en diagnostic associé. Sur une trentaine de millions d'hospitalisations annuelles, j'ai trouvé un code de diagnostic de la fibromyalgie dans 15 024 hospitalisations, mais pour seulement 2 000 hospitalisations en diagnostic principal ; dans le reste des cas, c'était un diagnostic associé, qui n'était donc pas la première cause d'hospitalisation.
Dans les bases de données médico-administratives, qui n'ont pas été créées pour l'épidémiologie, tous les professionnels de santé retiennent-ils la même définition de la fibromyalgie ? Tous les actes sont-ils parfaitement codifiés, appréhendés, connus, identifiés ? Je ne le pense pas. Par conséquent, les efforts à faire portent sur la connaissance de la maladie : je ne crois pas avoir eu un seul cours sur la fibromyalgie. Il est vrai que je ne suis plus toute jeune et que cette maladie a été identifiée récemment, mais je ne crois pas qu'il y ait actuellement beaucoup de cours sur elle.
Quand votre commission m'a demandé de travailler sur la fibromyalgie, j'ai pensé qu'il fallait que nous nous penchions sur ce problème, que nous étudiions l'amplitude de la littérature qui existe, l'étendue de la mortalité et de la morbidité, ainsi que le dommage physique et moral impliqué. La question est ouverte. Il y a, à l'évidence, une vraie pathologie et la reconnaissance de cette maladie est en train de progresser rapidement. Votre commission y contribue.
Lorsque nous avons créé notre département, nous avons commencé par les grandes pathologies, puis nous nous sommes intéressés à la santé mentale, aux maladies neurodégénératives, à des approches par populations vulnérables, à la santé des détenus. Il faut avoir conscience de l'énorme éventail de pathologies à surveiller et du peu de ressources dont je dispose. Je ne pense pas qu'il faille commencer par la surveillance épidémiologique, car je doute que l'on puisse fournir des données fiables.