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Alain Marty
Question N° 39690 au Ministère des affaires sociales


Question soumise le 8 octobre 2013

M. Alain Marty attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les inquiétudes des travailleurs handicapés concernant l'article 23 du projet de loi sur les retraites. En effet, depuis 2010, les travailleurs handicapés qui justifient d'un taux d'incapacité permanente de 80 % ou qui ont obtenu la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) peuvent liquider leur pension à taux plein dès 55 ans. L'article 23 propose de supprimer le critère de la RQTH et de le remplacer par le taux d'incapacité permanente (IP) de 50 %. Or, s'il est vrai que de nombreux travailleurs handicapés n'ont pas demandé autrefois la RQTH, beaucoup n'ont pas plus demandé l'attribution d'un taux d'incapacité permanente en temps utile et ne peuvent donc pas prouver une IP de 50 %. Les accidentés du travail ou les victimes de maladies professionnelles par exemple, en raison des délais d'apparition des signes cliniques et de reconnaissance de l'invalidité, seront grandement pénalisés. De plus, ceux qui devaient partir en retraite avec l'ancien dispositif ne le pourront plus et devront travailler au moins 7 années supplémentaires : ils vont donc perdre des droits acquis. En conséquence, il lui demande de bien vouloir conserver le critère de la RQTH.

Réponse émise le 13 mai 2014

Les dispositions de l'article D. 351-1-5 du code de la sécurité sociale pris en application de l'article L. 351-1-3 du même code prévoient les conditions d'ouverture du droit à la retraite anticipée au profit des assurés handicapés : une durée d'assurance minimale, dont une partie doit avoir donné lieu au versement de cotisations à la charge de l'assuré, accomplie alors que l'intéressé était en situation de handicap. Les conditions de durée d'assurance et de durée cotisée exigées dépendent de l'âge de l'assuré à la date d'effet de la pension de retraite, l'âge minimum d'attribution étant fixé à 55 ans. La loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites avait étendu le dispositif de la retraite anticipée aux bénéficiaires de la reconnaissance de la qualité de travailleurs handicapés (RQTH) au sens de l'article L. 5213-1 du code du travail, c'est-à-dire celles dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l'altération d'une ou plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique. Le critère de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) est apparu inopérant et source de complexité en gestion pour les caisses et surtout pour les assurés, qui bien souvent n'ont pas demandé ou ne demandent pas le bénéfice de la RQTH au titre de l'ensemble des périodes au cours desquelles ils étaient assurés sociaux. Surtout, la RQTH constitue une reconnaissance temporaire du handicap (pour 1 à 5 ans) destinée à faciliter l'insertion dans une catégorie d'emploi précise ; un assuré justifiant d'un taux d'incapacité permanente élevé pourra se voir refuser la RQTH, si ce handicap ne constitue pas un frein spécifique à l'emploi qu'il occupe. De même certains assurés justifiant d'un handicap durable, médicalement attesté, mais n'ayant pas demandé la RQTH, pouvaient ainsi être écartés du bénéfice de la mesure. C'est pourquoi la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraites, prévoit de remplacer, pour le bénéfice de la retraite anticipée des travailleurs handicapés, le critère de la RQTH par un taux d'incapacité permanente (IP) de 50 %, tel qu'établi par les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), afin de prendre en compte, pour le bénéfice de la retraite anticipée, l'ensemble des périodes d'assurance vieillesse obtenues pendant lesquelles l'assuré justifiait d'un handicap conséquent (50 %). A titre transitoire et pour les périodes antérieures au 31 décembre 2015, le critère de la RQTH sera maintenu afin de ne pas changer les règles pour des assurés proches du bénéfice d'une retraite anticipée. A compter de 2016, le critère de 50 % de taux d'incapacité permanente, plus simple et plus large que celui de la RQTH, sera le seul retenu pour ouvrir droit à la retraite anticipée des travailleurs handicapés. Les modalités de ces dispositions seront précisées par décret dont la publication devrait intervenir au cours du premier semestre 2014. Un arrêté viendra compléter ce texte réglementaire : il permettra, après concertation, de préciser les règles d'équivalence entre les différentes reconnaissances administratives du handicap, dans le cadre de l'examen d'un droit à retraite anticipée. Ces équivalences devraient permettre de présumer des situations de handicap au titre de périodes antérieures, parfois très reculées dans le temps, alors que cette présomption était impossible avec le critère de RQTH : des travaux techniques sont en cours pour en construire les modalités.

3 commentaires :

Le 17/10/2013 à 13:40, Monique LEJEUNE a dit :

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Moi, femme, née en 1955 et travailleuse handicapée, je remercie Monsieur le Député Alain MARTY pour sa question et souhaite apporter mon témoignage

Mon handicap

Je souffre d’une dysplasie bilatérale congénitale des deux hanches, opérée à de multiples reprises. (Elle n’a pas été détecté à la naissance mais à l’âge de 1 an ½ - s’en sont suivis 3 ans ½ partagés entre hôpital (à 70 km) et domicile pour finir par 2 interventions à 5 ans. Nouvelles interventions à 13 ans, 16 ans et 17 ans avec des séquelles importantes à la marche (boiterie de Trendelenburg et importantes déficiences musculaires). Prothèses de hanches à droite en 1991 et à gauche en 2004. Une nouvelle intervention prévue en 2014. Conclusion de mon dernier bilan kinésithérapique (mai 2013) : "Au final madame est atteinte d'un lourd handicap fonctionnel, s'aggravant régulièrement et ne disposant pas de thérapies curantes mais uniquement palliatives. Le retentissement sur les activités de la vie quotidienne, le travail, les loisirs, la vie relationnelle et psychologique est très important."

Ma reconnaissance RQTH

J’ai la reconnaissance RQTH depuis 1983. La dernière en date (mars 2013) m’a défini un taux d’incapacité compris entre 50 et 79 %. Mais cette indication n’a pas de valeur d’IPP, de plus auparavant aucun taux n’était indiqué dans les notifications. Je n’ai donc, comme vous le précisez dans votre question, aucun moyen de prouver une antériorité de taux.

Mon parcours professionnel

Ayant commencé à travailler à 20 ans, j’ai une carrière mixte, privée et fonction publique.

Comme de nombreux autres salariés reconnus RQTH, j’ai galéré pendant très longtemps pour jongler entre handicap et travail, entre dignité et décence pour élever seule mes enfants, tant financièrement que philosophiquement en leur montrant une image active de la différence..... perdu des trimestres d'assurance, car trouver du travail en étant handicapé c’est un parcours du combattant, surtout lorsque le handicap se voit, perdu des trimestres pour avoir voulu me réorienter professionnellement afin de m'adapter à l'évolution du handicap (2 ans de formations suite à décision COTOREP, qui n’ont validé aucun trimestre d’assurance pour la retraite, malgré des cotisations prise en charge par l’État : encore 8 trimestres perdus)...

Et je vais demain perdre la reconnaissance, acquise depuis peu, de tous ces efforts et de toutes ces difficultés qu’il a fallu contourner pour continuer  !

À noter également :

Inégalité de traitement pour les fonctionnaires : Un calcul du montant de la retraite dans le cadre d’un départ anticipé pour RQTH défavorable dans la fonction publique État puisqu’elle applique une décote contrairement et non le taux plein contrairement à tous les autres régimes.

Inégalité de traitement pour les salariés à carrière mixte : le calcul de la majoration pour handicap ne tient compte que de la durée liquidable dans chaque régime. Pas de cumul possible, donc souvent pas ou peu de majoration.

Avec ce dispositif, j’aurais tout de même pu partir à 62 ans en 2017 avec une retraite de 1 229 € au lieu de 938. Demain, en travaillant jusqu’à 67 ans (je n’y arriverai jamais) j’aurai à peine plus.

Je ne peux presque plus marcher, je n'ai pratiquement plus de vie sociale à cause de mon handicap, et j'ai à peine 58 ans ! Mais mon handicap est qualifié de - moins lourd - par mon gouvernement parce que j'ai une RQTH et non une IPP ?

Je ne vois là aucune justice ni avancée pour les travailleurs handicapés, car JE SUIS EGALEMENT UN TRAVAILLEUR HANDICAPE !

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 18/10/2013 à 20:46, Marx a dit :

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Ce témoignage est constructif car un grand nombre de TRAVAILLEURS HANDICAPES sans IPP sont dans la même situation pour our différentes raisons de santé qui en vieillissant s'aggravent. Et en plus s'ils sont fonctionnaires ils partent en retraite avec moins de pension : double peine.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 06/11/2013 à 15:07, Sylvia a dit :

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"La grandeur d'une civilisation se mesure à l'aune du traitement qu'elle réserve aux personnes en situation de

handicap, aux personnes dépendantes, enfants et personnes âgées."

Sylvia Poinsignon

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