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Jacques Dellerie
Question N° 100033 au Ministère de la justice


Question soumise le 18 octobre 2016

M. Jacques Dellerie attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur la situation difficile des surveillants de l'administration pénitentiaire. La surpopulation carcérale, ajoutée à l'insécurité et aux horaires décalés entraînent pour ces personnels des conditions de travail délétères. Le nombre de détenus gérés par un seul surveillant s'élève parfois à plus de 120. L'institut de veille sanitaire (InVS) a analysé en 2015, en partenariat avec l'administration pénitentiaire, les causes de décès de l'ensemble des personnes ayant travaillé dans l'administration pénitentiaire au moins un an entre 1990 et 2008. Cette étude comprenait plus de 30 000 hommes et 10 000 femmes répartis dans 5 filières professionnelles (surveillance, insertion et probation, administration, service technique et encadrement). L'étude révèle un excès significatif de suicides chez les hommes par rapport à la population générale française, en particulier chez les surveillants et les adjoints techniques. Aussi il lui demande s'il envisage d'adopter des mesures rapides de façon à doter les institutions d'un système de surveillance épidémiologique et de poursuivre les mesures de prévention déjà instaurées auprès des personnels de l'administration pénitentiaire.

Réponse émise le 2 mai 2017

L'Institut de veille sanitaire (InVS) a publié en mars 2015 la première analyse des causes de décès des agents et ex-agents pénitentiaires sur la période 1990-2008. Cette étude s'inscrit dans une réflexion globale de l'administration pénitentiaire sur la santé au travail des agents. En effet, les agents de l'administration pénitentiaire travaillent dans un environnement professionnel particulier. Ils sont exposés à des nuisances professionnelles spécifiques, tels que le stress et l'insécurité. L'InVS rapporte alors que « les surveillants sont exposés à des contraintes psychosociales reconnues délétères pour la santé psychique et pouvant constituer un élément déclencheur des conduites suicidaires ».  Si le rapport de l'InVS conclut à une absence de surmortalité, toutes causes confondues, chez les agents pénitentiaires par rapport à la population française, il révèle en effet un excès de suicide (+21% chez les hommes par rapport à la population française), en particulier chez les surveillants et les personnels techniques. L'étude ne révèle toutefois pas de lien avec le type d'établissement ou le taux d'occupation carcérale. L'excès observé n'a probablement pas une origine unique et les données disponibles ne permettent pas d'explorer la part des facteurs personnels et professionnels.  En termes de prévention des risques psycho-sociaux (RPS), de nombreuses actions sont déjà mises en œuvre par l'administration pénitentiaire, qui a abordé cette thématique en mettant en place un groupe de travail avec ses partenaires sociaux dès 2009 (année où étaient constatés 15 suicides de personnels pénitentiaires). La direction de l'administration pénitentiaire (DAP) a conduit des actions visant à améliorer les conditions de travail et à prévenir les suicides des personnels pénitentiaires, politique qui s'est notamment concrétisée à travers la signature d'un protocole d'accord le 14 juin 2013 avec l'organisation syndicale majoritaire des personnels de surveillance.  Les principales actions, qui continuent d'être menées et approfondies, concernent : Le soutien et l'accompagnement pluridisciplinaire : - développement du réseau de psychologues des personnels : dorénavant au nombre de 65, dont 10 coordonnateurs régionaux. Ils interviennent en soutien individuel, groupal ou institutionnel. Des plaquettes ont été également diffusées afin de permettre une meilleure connaissance du réseau de soutien par les personnels ; - installation d'une téléphonie sociale : no vert 24h/24, 7j/7, confidentiel et anonyme. dispositif agissant en complémentarité du réseau de soutien pour les personnels ;  La mise en place d'outils d'information et de formation sur les risques psycho-sociaux : - outils d'information et de communication sur les RPS (tryptiques, boites à outils, document unique d'évaluation des risques professionnels, …) ; - formations aux RPS à destination des cadres et des cadres intermédiaires, à titre expérimental en partenariat avec la Police nationale ; - convention avec l'établissement de soins de l'association nationale d'action sociale (ANAS) -Le Courbat, pour la prise en charge de patients souffrant de surmenage et d'addictologie. L'ANAS, association reconnue d'utilité publique, a pour mission le développement de l'action sociale et l'organisation de la solidarité, au bénéfice des personnels de la Police nationale et du ministère de l'intérieur ; Le développement d'axes de qualité de vie au travail : - signature en 2014 par la DAP d'une charte de la qualité de vie au travail, traduisant l'engagement de la direction à lutter contre les RPS ; - sensibilisation des personnels aux conséquences des horaires atypiques sur la santé par le biais d'un fascicule de conseils pour le sommeil et le bien-être des personnels exerçant des fonctions en horaires décalés ; - organisation en janvier 2016 d'un séminaire sur la protection de la santé au travail permettant l'intervention de nombreux témoins avec un retour et une mutualisation d'expériences et de savoir-faire, dans le domaine de la prise en charge des agents victimes d'un stress post-traumatique, de la prévention des effets du surinvestissement professionnel et des protocoles de soins pour les personnes souffrant d'addictions ; Une réflexion sur les cycles de travail des personnels de surveillance : - séminaire en septembre 2015 rassemblant tous les acteurs concernés sur les thèmes du travail de nuit, de l'organisation des tâches et de l'équilibre de la vie professionnelle et de la vie sociale ; - étude en cours sur une organisation de travail plus en adéquation avec les rythmes biologiques et la santé des personnels pénitentiaires ; Des ateliers d'analyse de la pratique professionnelle : - ateliers constituant des lieux d'échanges entre pairs au cours desquels les agents exposent leurs difficultés professionnelles en toute confidentialité ; - thèmes du séminaire des métiers organisés en juillet 2016.

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