M. Noël Mamère interroge M. le secrétaire d'État, auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du développement et de la francophonie sur la campagne menée par Handicap international par rapport aux bombes explosives à souffle. D'ores et déjà, 53 États et territoires, l'Union européenne, le Human security network et le groupe nordique ont déjà reconnu officiellement qu'un problème humanitaire spécifique résultait de l'utilisation de ces armes. On compte parmi ces États sensibilisés à la question 28 États proactifs, qui recommandent l'adoption d'une déclaration politique sur ce sujet. Il faut dire que le sujet est d'une extrême gravité : à Kobané comme à Alep, on compte 10 munitions au mètre carré. Au-delà des dangers présents que cela représente pour les civils, c'est aussi un fléau qu'on mettra environ 30 ans à éradiquer. La France a déjà démontré son rôle leader en matière de désarmement, notamment par la force de l'impulsion qu'elle a su donner pendant le processus d'Ottawa. Si un engagement politique pour la protection des civils ne serait pas suffisant, il s'agit néanmoins d'une première étape nécessaire vers l'éradication de l'utilisation meurtrière des armes explosives en zones peuplées. C'est vers un tel engagement politique que se dirigeait son prédécesseur M. André Vallini. Il lui demande s'il va engager la France dans le processus de la signature de cet engagement politique international fort.
La France joue un rôle de premier plan au sein de la communauté internationale sur les questions de désarmement. Elle est partie à tous les instruments internationaux visant à interdire ou limiter l'emploi de certaines armes conventionnelles, et travaille activement à leur universalisation. En outre, dans le cadre de ses engagements en opérations extérieures, la France applique de manière rigoureuse les principes pertinents du droit international humanitaire (DIH) qui limitent les moyens et méthodes pouvant être utilisés pour faire la guerre et encadrent strictement l'utilisation des armes, que celles-ci soient explosives ou à énergie cinétique, pour protéger les civils et les biens de caractère civil. C'est dans ce contexte que la France met en œuvre un processus de ciblage extrêmement contraignant visant à limiter les dommages collatéraux. Ces pratiques sont citées en exemple par des acteurs comme le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ou Handicap International. La France reconnaît la gravité de l'emploi d'armes explosives, qui, lorsqu'elles sont utilisées de manière excessive et indiscriminée dans des zones où des civils sont présents en grand nombre, peuvent entraîner des dommages considérables. Afin de protéger les populations civiles et les infrastructures civiles essentielles à ces dernières, telles que celles chargées des soins de santé et de l'approvisionnement en énergie et en eau, il est impératif d'assurer le plein respect du DIH. Celui-ci prohibe en effet le fait de viser délibérément des civils ou des biens de caractère civil. Cette règle est au cœur du principe d'humanité. Pour l'appliquer, les belligérants doivent respecter trois principes fondamentaux dans la conduite de leurs opérations : - le principe de distinction, conformément auquel les parties à un conflit doivent en tout temps faire la distinction entre civils et combattants et ne peuvent lancer d'attaques sans discrimination ; - le principe des précautions dans l'attaque, conformément auquel les opérations militaires doivent être conduites en veillant constamment à épargner la population civile, les personnes civiles et les biens de caractère civil ; - le principe de proportionnalité dans l'attaque, conformément auquel les parties au conflit doivent s'abstenir de lancer une attaque susceptible de causer incidemment des pertes ou des blessures au sein de la population civile et/ou des dommages à des biens de caractère civil qui seraient excessifs par rapport à l'avantage militaire attendu. L'emploi d'armes explosives, en particulier dans des zones où des civils sont présents en grand nombre, n'échappe pas à ces règles fondamentales du droit international humanitaire. Tout emploi qui s'en écarte est d'ores et déjà interdit par le droit international humanitaire et est susceptible de constituer un crime de guerre. Le projet de déclaration politique sur les armes explosives, actuellement porté par certains Etats, fait encore l'objet de nombreuses interrogations. Les maux que cette campagne cherche à combattre ne trouvent pas leur origine dans une défaillance supposée du droit, mais bien davantage dans son non-respect. Il ne s'agit pas de remettre en cause la validité des principes fondamentaux du droit international humanitaire, au risque de les affaiblir et d'affaiblir en conséquence la protection des civils, mais bien au contraire d'en réaffirmer la pertinence et, partant, la nécessité de leur stricte application par l'ensemble des parties aux conflits. La communauté internationale n'ignore pas ce sujet : lors de la Cinquième conférence d'examen de la Convention sur certaines armes classiques (CCAC) qui s'est tenue en décembre 2016, les Etats participants, dont la France, ont prévu de travailler à renforcer le respect du droit humanitaire et à prendre en compte les défis posés par l'emploi des armes conventionnelles, en particulier dans les zones où se trouvent des concentrations de civils. La France salue toute mobilisation de la communauté internationale visant à assurer le plein respect du droit international humanitaire et la protection des civils, et se tient prête à continuer à y contribuer, notamment en partageant les bonnes pratiques permettant de retranscrire les principes pertinents dans la réalité des opérations militaires. La problématique des restes explosifs de guerre (REG), ces munitions non-explosées ou pièges explosifs disposés durant les conflits et qui perdurent après leur fin, menaçant les civils et empêchant le retour des déplacés, demeure posée. Il s'agit effectivement d'un fléau contre lequel il faut lutter. Outre la Convention d'Oslo interdisant les armes à sous-munitions et la Convention d'Ottawa interdisant les mines antipersonnel, la France est également partie au Protocole V de la CCAC qui comprend des mesures destinées à minimiser la présence, les effets et les risques posés par les restes explosifs de guerre. La France est engagée en faveur de l'assistance à des pays confrontés au danger des restes explosifs de guerre, qu'il s'agisse de programmes de l'ONU, de coopérations bilatérales (notamment des formations) ou de soutien à des ONG. Elle soutient également le Centre de perfectionnement aux actions de déminage et de dépollution (CPADD) de Ouidah au Bénin, et dispense une formation au profit des forces de sécurité intérieures irakiennes. Une approche préventive combinant sensibilisation des populations, formation des armées et procédures d'enregistrement et de transmission de données est essentielle et doit être encouragée.
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