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Mme Karine Berger interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation au sein de la direction de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep). Cette autorité de régulation indépendante organise en particulier le marché des télécoms par l'exercice de prérogatives pour encadrer ses acteurs et marchés. Ainsi elle délivre les autorisations nécessaires à y exercer une activité économique, réglemente l'organisation du service universel sur l'ensemble du territoire ou encore enquête et prononce des sanctions notamment financières en cas de manquements aux obligations imputables à ces acteurs (voir notamment articles L. 36-5 et suivants du code des postes et des communications électroniques). En janvier 2017, le départ d'un haut dirigeant de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) vers Google pose le sujet des conflits d'intérêts de dirigeants agents publics passant d'un régulateur public à un opérateur privé majeur. L'ARCEP a par exemple directement eu à connaître de dossiers concernant Google, comme l'enquête close à l'été 2013 concernant les conditions techniques et financières d'acheminement du trafic avec la société fournisseur d'accès Free. L'impartialité du service public et de ses agents se trouve ainsi publiquement mise à l'épreuve. De vives inquiétudes sont à nouveau exprimées à cette occasion sur notre capacité réelle à protéger la souveraineté française et européenne dans le domaine du numérique, aussi stratégique pour les libertés et droits fondamentaux des citoyens français, pour notre sécurité nationale que pour notre économie. On rappellera qu'en France l'ensemble des revenus des opérateurs des marchés des télécommunications sont évalués pour l'année 2015 à 35,9 milliards d'euros (ARCEP, Observatoire des marches des communications électroniques, Les services de communications électroniques en France, résultats définitifs/année 2015, 20 décembre 2016). Depuis 2012, le droit en matière lutte de conflits d'intérêts au sein des secteurs public et privé a été considérablement renforcé. Plusieurs textes ont été adoptés : la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière, la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 « Sapin II » relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. Elle l'interroge donc afin d'être éclairée sur les points suivants : premièrement dans quelle mesure un haut fonctionnaire d'une autorité administrative peut-il ultérieurement exercer légalement des fonctions de direction et de relations publiques dans une entité privée relevant totalement ou partiellement du domaine de son ancien employeur public ? Sur ce sujet, elle demande à être plus particulièrement informée de la légalité des relations d'un ancien dirigeant public avec d'autres agents et dirigeants largement concernés par les questions du numérique, au sein de l'ARCEP mais aussi des services des ministères concernés comme ceux en charge de l'économie, des télécommunications ou du numérique, des services de l'Autorité de la concurrence, des services de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), des services du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) ou encore des services de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Deuxièmement dans quelle mesure les interdictions pénales sanctionnant les conflits d'intérêts trouveront des effets dans les outils de prévention que doivent mettre en place les acteurs économiques en application de la loi du 9 décembre 2016 (en particulier ses articles 3 et 17) ? Sur ce point, elle demande à savoir dans quels délais l'Agence anticorruption proposera ses recommandations qui doivent justement permettre d'éviter les conflits d'intérêts dans le secteur public et le secteur privé. Elle demande également quelles seront les mesures prises pour que les codes de conduite, prévus à l'article 17 de la loi Sapin II s'imposant à certaines sociétés, prennent en considération ces risques de conflits d'intérêts. Elle souhaite être informée plus particulièrement des coopérations menées par les ministères compétents ou/et par la nouvelle Agence française anti-corruption avec les États étrangers accueillant les grands acteurs du numérique, afin que ces nouvelles obligations soient bien respectées. Troisièmement comment sera assuré le respect de ces obligations en cas de départ d'un tel haut fonctionnaire vers un opérateur privé ? Elle désire être informée sur les moyens alloués en particulier au sein de l'ARCEP, des ministères concernés, des services judiciaires de la police nationale comme des services de la Justice (parquet national financier notamment). Ceci afin de concrètement détecter, enquêter et réprimer administrativement ou pénalement le cas échéant un manquement aux obligations valant en matière de conflit d'intérêts. Quatrièmement quelle est la politique menée par la France en matière de coopération avec l'Union européenne et les autres pays de l'Union européenne entre services judiciaires, afin de bien faire respecter les interdictions administratives et pénales valant en droit français ? Plus particulièrement, elle demande notamment à être informée des règles de prévention des conflits pour ce qui concerne les relations avec les membres de l'Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE ou BEREC selon l'acronyme anglais pour Body of european regulators for electronic communications). Elle l’interroge à ce sujet concernant les moyens humains et financiers alloués pour mener à bien ces activités de contrôle et le cas échéant de répression administrative et pénale.
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