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Paul Salen
Question N° 11861 au Ministère de l'intérieur


Question soumise le 27 novembre 2012

M. Paul Salen attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les problèmes soulevés par la conclusion des BEA au regard des évolutions légales. De nombreuses collectivités territoriales ont conclu des BEA, conformément aux dispositions des articles L. 1311-2 à L. 1311-4-1 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction en vigueur avant la loi LOPPSI II, afin de réaliser une opération d'intérêt général consistant à externaliser la gestion immobilière de casernes de gendarmerie. Par jugement du 15 octobre 2010 le tribunal administratif de Grenoble a annulé un BEA transférant à une société privée la gestion du tènement de la gendarmerie. S'appuyant sur cette décision, la gendarmerie nationale refuse dès lors d'accepter le choix des collectivités territoriales qui ont confié la gestion de ce patrimoine immobilier à des opérateurs privés, et refusent de signer l'avenant de transfert des baux d'occupation des casernes. Actuellement, la gendarmerie nationale continue à régler les loyers directement aux collectivités alors qu'elles devraient les verser aux titulaires des BEA. Cette situation devient inextricable car les baux conclus entre les collectivités et chaque caserne, dont la gendarmerie refuse le transfert à l'emphytéote, arrivent à échéance. Dans l'attente d'une décision du Conseil d'État qui pourrait intervenir dans plusieurs années, ce blocage fragilise les emphytéotes, gestionnaires des casernes pour le compte des collectivités, les collectivités délégantes, ainsi que la gendarmerie qui, en refusant de conclure les baux, devient occupante sans titre, d'une part, et se prive des travaux d'entretien et de rénovation des logements occupés par ses agents, d'autre part. Aussi, il lui demande quelles solutions le Gouvernement compte mettre en œuvre pour remédier à cette impasse contractuelle.

Réponse émise le 19 février 2013

Suite à la démarche initiée par un opérateur privé, suivi par d'autres, plusieurs collectivités territoriales ont procédé, à partir de 2005, à l'externalisation de la gestion de leur parc immobilier constitué de casernes de gendarmerie dans le cadre d'un bail emphytéotique administratif (BEA). Cette démarche s'appuyait sur les dispositions figurant dans la loi d'orientation et de programmation sur la sécurité (LOPSI) du 29 août 2002, intégrés à l'article 1311-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT). Pour sa part, la gendarmerie nationale n'a pas été consultée, les opérateurs et les collectivités territoriales considérant qu'il s'agissait d'un contrat bilatéral. Non co-contractante du BEA, la direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) avait cependant émis de sérieuses réserves sur la nature de ces opérations et appelé l'attention sur leur fragilité au regard du support juridique choisi. La DGGN n'a pu que prendre acte des opérations réalisées n'étant pas fondée à refuser ou accepter le choix des collectivités territoriales propriétaires. Des avenants aux baux de location en cours, organisant les relations entre le bailleur et la gendarmerie, avaient été établis localement. A cette occasion, sur le fondement de l'article R.1212-1 du code général de la propriété des personnes publiques, le responsable territorial de la gendarmerie, en tant qu'administration occupante assiste le responsable du service du domaine, seul habilité à conclure le bail de location. En 2010, le tribunal administratif de Grenoble, saisi par le préfet de la Drôme, a annulé la délibération d'une commune visant à confier la gestion d'une caserne de gendarmerie à un opérateur privé dans la cadre d'un BEA (TA Grenoble - 15 octobre 2010 - « Romans-sur-Isère » 26). Ce jugement a, par la suite, été confirmé en appel (Cour d'appel administrative de Lyon - 7 juillet 2011). Par ailleurs, le tribunal administratif de Grenoble, le 2 décembre 2011, a annulé la délibération du 20 décembre 2010 par laquelle le conseil municipal a approuvé la signature d'une convention de gestion provisoire avec l'opérateur. Ces décisions de justice ont pour conséquence de ne plus pouvoir conclure des actes administratifs relatifs à des transferts de gestion s'appuyant sur le fondement juridique du BEA dit LOPSI. Il convient d'observer que la loi n° 2011-267 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2) du 14 mars 2011 autorise désormais ce type d'opérations et en précise les modalités. La direction générale de la gendarmerie nationale prenant acte de cette situation en a informé ses échelons locaux, en liaison avec le service France Domaine. La signature d'avenants aux baux de location sur le fondement d'un BEA dépourvu de base légale n'est effectivement plus possible. Afin de remédier à l'impasse contractuelle, la DGGN avait envisagé l'hypothèse d'une rédaction d'un avenant au bail initial de location conclu entre la collectivité et la gendarmerie dont l'objet serait de faire ratifier par la collectivité le paiement à un tiers, en l'espèce l'opérateur privé. Consultée, la direction générale des collectivités locales, seule compétente au regard des dispositions de l'article L 1311-2 du code général des collectivités territoriales, a précisé que cette solution n'apparaissait pas susceptible d'être retenue. Elle préconise donc la régularisation au cas par cas tout en soulignant la nécessité d'examiner les fragilités de chaque BEA de gestion. Elle souligne également la nécessité d'en conclure de nouveaux dans le respect de l'ensemble des conditions requises. Cette solution rejoint l'analyse du service France Domaine, considérant que les actes ou avenants pris en application de BEA irréguliers sont dépourvus de base légale. En conséquence, afin de donner une assise juridique non contestable aux BEA signés, une vérification par les préfets de département, au titre du contrôle de légalité est envisagée, par les services du ministère de l'intérieur, au moins pour les actes sur lesquels pèseraient encore un doute. Enfin, la LOPPSI 2 offre le support juridique permettant de conclure des BEA de gestion juridiquement fondés, sans pour autant, n'étant pas rétroactive, permettre d'entériner ceux déjà conclus. Il convient d'observer, qu'à ce stade, la gendarmerie s'est refusée à recourir systématiquement à la consignation car cette dernière prive le bailleur, quel qu'il soit, des fruits du loyer. Elle nuit par voie de conséquence à la maintenance des casernes mais aussi à la qualité des relations privilégiées tissées entre la gendarmerie nationale et ses interlocuteurs locaux, deux aspects auxquels elle est particulièrement sensible.

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