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Valérie Corre
Question N° 12179 au Ministère des affaires sociales


Question soumise le 27 novembre 2012

Mme Valérie Corre attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les risques psycho-sociaux liés au travail et sur la difficile reconnaissance de la dépression nerveuse comme maladie professionnelle. Or de nombreux travailleurs sont soumis aux risques psycho-sociaux, en particulier ceux dûs à l'isolement face aux problèmes professionnels. Ces risques sont susceptibles de générer des atteintes sur la santé mentale et physique, pouvant parfois conduire la personne dépressive jusqu'au suicide. La dépression nerveuse n'est que difficilement reconnue comme maladie professionnelle du fait qu'elle ne figure dans aucun des 98 tableaux annexés du code des maladies professionnelles. Les personnes touchées par une telle pathologie générant des pertes de capacité de travail peuvent tout de même saisir le comité régional de reconnaissance de maladie professionnelle qui statuera au vu de l'historique médical. Elle demande si le Gouvernement compte accentuer la prévention des risques psycho-sociaux liés au travail et étudier l'inscription de la dépression nerveuse au tableau des maladies professionnelles en vue d'une meilleure reconnaissance de cette pathologie.

Réponse émise le 27 août 2013

L'inscription au tableau des maladies professionnelles, qui permet d'établir pour les pathologies concernées une présomption d'imputabilité à l'activité professionnelle, pour une liste limitative de travaux, n'est pas adaptée au cas des pathologies psychiques. Il ne serait notamment pas possible d'établir, comme c'est le cas pour les autres pathologies inscrites au tableau, la liste des travaux concernés par cette inscription. Toutefois, ces pathologies peuvent être reconnues d'origine professionnelle, lorsqu'il est établi par un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) qu'elles sont directement et essentiellement causées par le travail habituel du salarié, lorsqu'elles entraînent un taux d'incapacité permanente au moins égal à 25%, et a forfiori lorsqu'elles entraînent le décès (article L.461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale). Une centaine de salariés environ obtiennent chaque année la reconnaissance du caractère professionnel de leur maladie. Le caractère professionnel d'un suicide ou d'une tentative de suicide peut être reconnu au titre de la législation relative aux accidents du travail (AT), sur le fondement de l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale. Le lien avec le travail est présumé si l'acte suicidaire est intervenu au temps et au lieu du travail, ou s'il fait suite à un sinistre professionnel déjà reconnu (AT ou MP antérieur) et non encore guéri ou consolidé. Dans le souci de mieux prendre en charge ces pathologies, la commission spécialisée relative aux pathologies professionnelles du comité d'orientation des conditions de travail a créé le 9 avril 2010 un groupe de travail sur le sujet. Ce groupe avait pour mandat de réaliser une typologie descriptive des pathologies d'origine psychique susceptibles d'être examinées par les CRRMP ; de préciser, pour ces pathologies, les critères de stabilisation permettant de fixer un taux d'incapacité permanente et de définir le niveau de gravité à partir duquel il est possible de fixer un taux d'incapacité permanente au moins égal à 25 % ; de formuler des recommandations afin d'aider les CRRMP à apprécier le lien entre ces pathologies et l'activité professionnelle ; et enfin d'examiner d'autres voies d'amélioration de la prise en charge des pathologies psychiques liées à l'activité professionnelle. Les conclusions du groupe de travail concernant les trois premiers points ont été réunies dans un rapport final présenté lors de la commission spécialisée relative aux pathologies professionnelles du 3 mai 2012. Les recommandations aux CRRMP qu'il comprend ont vocation à être intégrées au guide des CRRMP. Concernant l'amélioration de la prise en charge des pathologies psychiques, il a été demandé aux caisses, sur proposition du groupe du travail, par lettre ministérielle du 13 mars 2012, de retenir une interprétation souple de l'article L. 461-1 alinéa 4 permettant de fixer un taux d'incapacité « prévisible » à la date de la demande sans exiger que l'état de la victime soit stabilisé, afin d'ouvrir à un plus grand nombre de victimes la voie de la reconnaissance par les CRRMP et d'assurer le maintien des indemnités journalières jusqu'à la consolidation effective de la maladie. Le groupe de travail poursuit actuellement ses réflexions et envisage notamment d'élaborer un référentiel d'enquête à destination des agents enquêteurs des caisses primaires d'assurance maladie dans le cadre du traitement des demandes de reconnaissance de l'origine professionnelle de ces pathologies. En parallèle, dans le domaine de la prévention des risques psycho-sociaux (RPS), des actions sont menées tant par le ministère chargé du travail que par la caisse nationale de l'assurance maladie (CNAMTS). Les RPS ont en effet été intégrés dans le plan santé au travail 2010-2014 en tant que risque prioritaire, dans le prolongement du plan d'urgence contre le stress au travail lancé en octobre 2009. Les préventeurs institutionnels se sont dès lors attachés à proposer un modèle de compréhension et de prévention des RPS ainsi que des outils qui soient opérationnels pour accompagner les entreprises. Le réseau des actions régionales pour l'amélioration des conditions de travail (ARACT) a notamment pu expérimenter un modèle pratique d'analyse des RPS en entreprise dit C2R (« Contraintes, Régulations, Ressources »), qui permet un diagnostic global des RPS grâce à des entretiens avec les salariés, puis la construction d' un plan d'action visant à réduire les facteurs de contraintes, développer les facteurs de ressources et favoriser les processus de régulation. De nombreux outils méthodologiques ont été élaborés par un groupe de travail comprenant des membres de la direction générale du travail (DGT) et des principaux organismes de prévention, et ont été mis à disposition des entreprises via le site « travailler-mieux. gouv. fr ». En complément de ces outils destinés aux petites entreprises, l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT) a mis à disposition des entreprises de plus grande taille le kit méthodologique « prendre en compte les risques psychosociaux dans le document unique », très largement téléchargé (30 000 fois en 2012). L'institut national de recherche et de sécurité (INRS) a en outre développé une nouvelle brochure comprenant notamment un outil pratique pour repérer les facteurs de RPS et les intégrer dans le document unique d'évaluation des risques professionnels. Enfin, la DGT a édité en 2012 le guide à destination des employeurs « RPS : comment choisir un consultant ». Au-delà de l'accompagnement des entreprises, une campagne de contrôle a porté du 15 septembre au 15 décembre 2012 sur l'application de la réglementation relative à la prévention de l'exposition des salariés aux RPS, qui s'est inscrite dans le cadre des actions fixées en 2010 par le comité des hauts responsables de l'inspection du travail (CHRIT) de l'union européenne. Le bilan des résultats de la campagne a été diffusé sur « www. travailler-mieux. gouv. fr ». Par ailleurs, la CNAMTS mène depuis cinq ans un programme de formation des agents de services de prévention des caisses régionales afin de les sensibiliser à la problématique RPS et d'orienter la demande exprimée par les différents acteurs de l'entreprise (direction, comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), salariés). En outre, un référent RPS a été désigné dans chaque caisse régionale, ces référents se réunissant régulièrement pour échanger sur les pratiques professionnelles au sein d'un réseau propre animé par l'INRS. Parallèlement, des réseaux régionaux d'environ deux cents consultants capables d'apporter une réponse de prévention primaire ou secondaire ont été constitués.

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