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Philippe Plisson
Question N° 12407 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 4 décembre 2012

M. Philippe Plisson alerte M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur les conséquences sociales et environnementales que pourraient induire la conception d'installations de méthanisation collective et industrielle. Face à la crise pétrolière à laquelle se confronte - et se confrontera toujours plus dans l'avenir - notre société, l'agriculture est souvent mise à contribution et se doit aujourd'hui d'être, directement ou indirectement, source d'énergie. La méthanisation en est une des dernières trouvailles. Lors de l'audition du 23 octobre à la Commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, il a déclaré qu'il était favorable au développement d'une filière méthanisation, avec trois objectifs : elle doit être menée de manière collective ; dans les zones d'excédents structurels d'azote ; les reliquats de la méthanisation devront servir à la fertilisation et éviter l'achat par la Bretagne d'azote minéral. Il a également mentionné la nécessité d'inclure la cogénération et le photovoltaïque à ce plan. Le député tient à lui dire sa satisfaction concernant la mise en place de ce plan global. Cependant, au vu du retard considérable dans le développement de ces technologies vis-à-vis de nos partenaires et concurrents européens, il ne peut que vous empresser à le mettre en place. De plus, le député s'inquiète d'une vision centralisatrice de la méthanisation. En effet, la méthanisation collective favorise les projets de groupe et donc la construction de méthaniseurs à grosse capacité. Si ces unités de méthanisation séduisent par leur faible délai de rentabilité et leur rendement supérieur, le problème réside dans la nécessité de transport des déchets et des reliquats et dans les nuisances olfactives engendrées. Il serait donc préférable d'encourager la mise en place de petits méthaniseurs au sein même des exploitations. Concernant le développement de projets de méthanisation industrielle, ils devront être minoritaires et totalement assumés par les industriels (fonctionnement et gestion complète, de la mise à disposition des matières premières à la gestion du reliquat.) Par conséquent, ils relèvent davantage de la compétence des ministères de l'industrie que de celle du ministère de l'agriculture. Finalement, il lui demande quelles sont les pistes envisagées afin d'utiliser de manière efficiente les reliquats de la méthanisation ainsi que pour trouver des solutions en enrichissement de cellulose.

Réponse émise le 7 mai 2013

Les filières de méthanisation, de part leurs multiples intérêts, font partie des priorités du gouvernement en matière de développement durable. La méthanisation est en effet un procédé exemplaire, local et créateur d'emploi, qui permet à la fois de traiter et valoriser des déchets urbains, industriels ou agricoles, et de produire une énergie d'origine renouvelable. La France s'est fixé des objectifs ambitieux pour la filière biogaz, qui prévoient notamment sur une dizaine d'années la multiplication par quatre de la production d'électricité (625 MW en 2020) et par sept de la production de chaleur (555 ktep en 2020) à partir de biogaz. Elle bénéficie à ce titre de plusieurs instruments de soutien public (tarif d'achat de l'électricité, tarif d'injection du biogaz dans le réseau, fonds déchets...). Pour le monde agricole, la méthanisation, en particulier à la ferme, est intéressante pour la gestion de la fertilisation azotée qui constitue une problématique centrale. Elle constitue une des solutions permettant de conserver l'azote contenu dans certains sous-produits de l'exploitation et de l'exporter, à condition que les digestats bruts fassent l'objet de post-traitement permettant leur transport et leur valorisation. La méthanisation permet également, par la cogénération, d'assurer un revenu complémentaire et stable aux exploitants agricoles. Conformément à la feuille de route établie à l'issue de la conférence environnementale de septembre 2012 qui prévoyait la préparation d'un plan national biogaz et dans le prolongement du projet agro-écologique lancé en décembre 2012, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt ont présenté le 29 mars dernier le plan énergie-méthanisation autonomie azote (EMAA) qui vise à améliorer la gestion de l'azote et à développer un « modèle français de la méthanisation agricole », pour faire de la méthanisation agricole collective de taille intermédiaire un complément de revenus pour les exploitations agricoles, en valorisant l'azote et en favorisant le développement de plus d'énergies renouvelables ancrées dans les territoires, dans une perspective d'agriculture durable et de transition énergétique et écologique. Ce modèle de méthanisation repose essentiellement sur le traitement des déjections animales issues des élevages par méthanisation, permettant ainsi leur valorisation énergétique, agronomique et économique, mais également sur le traitement des autres sous-produits ou co-produits des exploitations agricoles, qui sont une source de potentiel méthanogène intéressante pour le fonctionnement et la rentabilité des installations de méthanisation. Le plan EMAA s'attache particulièrement au développement d'installations de méthanisation dites « à la ferme », de taille intermédiaire, sous maîtrise d'ouvrage agricole, et approvisionnées essentiellement par des effluents d'élevage et sous-produits ou co-produits des exploitations agricoles. Il encourage une approche collective par le regroupement d'exploitations agricoles pour la réalisation de ces projets, afin de concevoir les installations dans une logique d'ancrage territorial et dans le respect de la diversité des territoires, en s'adaptant aux contextes territoriaux. Sur la question des digestats de méthanisation : en application des articles L 255-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime (CRPM), la mise sur le marché et l'utilisation de matières fertilisantes et donc des digestats de méthanisation destinés à l'agriculture, sont subordonnées à une homologation ou, à défaut, une autorisation provisoire de vente (APV) ou une autorisation de distribution pour expérimentation (art. L. 255-2 du CRPM). Par dérogation à ce principe général et sous réserve que l'innocuité pour l'homme, les animaux et leur environnement des produits considérés soit établie, les produits normalisés sont exonérés de l'obligation d'homologation si la norme les concernant a été rendue d'application obligatoire (par arrêté interministériel). A ce stade, aucune norme ne vise aujourd'hui les digestats de méthanisation en tant que matière fertilisante destinés à être mis sur le marché. Des travaux sont en cours au sein de commissions AFNOR à ce sujet. Les normes NF U 44-051 et NF U 44-095 portant respectivement sur les amendements organiques « classiques » compostés et les composts de matières issues du traitement des eaux permettent toutefois leur utilisation en tant que composant de compostage final. Toute personne qui détient un digestat dont l'emploi est destiné à assurer ou à améliorer la nutrition des végétaux ou les propriétés des sols est tenue de solliciter une autorisation telle que décrite ci dessus. Cette procédure est à même de permettre d'assurer la sortie de déchet de digestat de méthanisation. C'est pourquoi le plan EMAA prévoit un volet consacré à la question de l'homologation de certains digestats de méthanisation.

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