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Anne-Yvonne Le Dain
Question N° 13893 au Ministère de la justice


Question soumise le 18 décembre 2012

Mme Anne-Yvonne Le Dain attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les écarts entre les ressorts judiciaires en ce qui concerne le nombre d'affaires traitées et le nombre de magistrats. Elle note des écarts particulièrement disproportionnés qui ne tiennent compte d'aucune spécificité particulière, comme par exemple le nombre d'habitants de la circonscription judiciaire, les statistiques locales de la délinquance, etc.). Ainsi, et à titre d'exemples, Nancy affiche une moyenne de 1 244 affaires annuelles par magistrat, Meaux 1 373, Toulon 1 264, Strasbourg 969 et Montpellier 1 694 affaires par magistrat. Les raisons qui fondent ces inégalités ne semblent répondre à aucune logique, sauf peut-être à entériner des histoires successives dans chacun des ressorts. Aussi, elle souhaite connaître les dispositions qu’elle compte prendre, par exemple par une réforme de la « Circulaire de localisation des emplois» afin de réduire ces écarts qui creusent des inégalités entre les territoires et remettent en cause le principe d'égalité de tous et de chacun.

Réponse émise le 11 juin 2013

La localisation des magistrats ne s'appuie pas à titre principal sur la population du ressort mais sur l'activité des juridictions qui n'y apparaît pas systématiquement corrélée. De même, il n'existe pas de lien de proportionnalité établi entre un niveau de délinquance qui serait défini par les éléments des statistiques locales de la délinquance, issues du ministère de l'intérieur, et le nombre d'affaires portées devant les tribunaux de grande instance des ressorts concernés. Cependant, si tel était le cas, cette donnée se répercuterait mécaniquement sur l'activité des juridictions qui sert de base à l'analyse de leur performance laquelle constitue l'élément majeur de référence au moment de la mise à jour annuelle de la circulaire de localisation des emplois. En revanche la population est un des facteurs pris en compte dans la détermination des groupes de juridictions qui structurent la démarche comparative d'analyse de la performance laquelle ne s'appuie pas, loin s'en faut, uniquement sur les ratios de performance évoqués dans la question. En effet ces ratios traduisent non le besoin de la juridiction mais sa capacité de traitement, puisqu' ils sont calculés en divisant un nombre d'affaires terminées par un nombre de magistrats, en l'espèce les affaires poursuivables (le nombre d'affaires poursuivables s'établit en ôtant du nombre d'affaires terminées celles qui ont dû être classées car elles ne pouvaient être poursuivies pour des raisons de fait ou de droit) divisées par les magistrats du parquet. Si l'on veut approcher le besoin de la juridiction, il convient d'interpréter ce ratio, comme le ratio de performance des magistrats du siège et celui des fonctionnaires, à la lumière de nombreux autres indicateurs tant pénaux que civils (par exemple, le taux de couverture des affaires nouvelles, les délais de traitement, l'âge moyen des affaires en stock ou le délai d'évacuation théorique du stock) qui permettent d'apprécier si la juridiction fait face de façon satisfaisante à sa situation ou si, au contraire, elle éprouve des difficultés. Par ailleurs, s'agissant singulièrement du ratio de performance des magistrats du parquet, le déploiement progressif depuis fin 2009 de la nouvelle chaîne pénale Cassiopée et les difficultés rencontrées par son infocentre (source des données statistiques) impactent sérieusement la qualité des données pénales disponibles. Ainsi, pour les juridictions citées, on relève que le nombre d'affaires poursuivables constituant le numérateur du ratio est affiché en 2011 à 12563 affaires pour Meaux, 10 224 affaires à Toulon et 11 625 affaires à Strasbourg, alors que les mêmes juridictions affichaient respectivement l'année précédente 17 700, 16 180 et 17 100 affaires, soit entre 40 et 60 % de plus. C'est pourquoi, pour mener l'analyse de la performance et projeter les besoins, la cellule de contrôle de gestion de la direction des services judiciaire bâtit ses ratios de performance en étudiant l'activité pénale des quatre années précédentes, en éliminant l'année (voire parfois les deux années) impactées par Cassiopée et en retenant comme référence une moyenne d'activité, ensuite projetée, si nécessaire, à la baisse ou à la hausse en fonction de la tendance de fond du ressort. En tout état de cause, le nombre des affaires poursuivables ne définit pas à lui seul les tâches auxquelles le parquet doit faire face et, même pour des tribunaux offrant a priori des profils comparables sur la base de cette donnée, il existe des différences marquées tenant à leurs spécificités, telles : l'existence sur l'arrondissement d'un important centre de détention, d'un grand centre de rétention administrative, de nombreux établissements psychiatriques, la présence d'un tribunal de commerce et son niveau d'activité, le fait que le tribunal soit ou non pôle de l'instruction, siège d'assises, doté d'une compétence JIRS, etc. Ce n'est qu'en tenant compte de l'ensemble de ces variables que l'on peut avoir valablement une approche critique et comparative au sein d'un même groupe, des moyens mis à disposition d'un tribunal. C'est à cette analyse critique que se livrent conjointement la sous-direction des ressources humaines magistrats et le bureau de la gestion de la performance, annuellement, à l'issue des dialogues de gestion qui sont pour les juridictions l'occasion de formaliser et d'argumenter leurs demandes en la matière. La localisation des emplois de magistrats en 2013 se veut la traduction des demandes exprimées par les chefs de cour dans le cadre des dialogues de gestion, des besoins identifiés au vu de l'activité et des orientations prioritaires définies par la Garde des sceaux et annoncées dans la loi de finance 2013. Ainsi, les postes localisés dans les cours d'appel ont été maintenus, en raison des suppressions conséquentes de ces dernières années. En outre, des postes ont été localisés en première instance, au siège non spécialisé et dans les juridictions d'instance afin d'améliorer la justice au quotidien, au siège spécialisé pour renforcer l'application des peines, la justice des mineurs et les pôles de l'instruction dans le cadre de la mise en place de la collégialité.

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