M. Jean-Louis Gagnaire attire l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur la question de la discrimination indirecte en défaveur des fonctionnaires hommes pour leur admission à la retraite anticipée comme pères de trois enfants ou la bonification de pension de 2 % par enfant. Malgré la condamnation de la France pour violation du principe d'égalité de traitement dans sa législation sur la retraite des fonctionnaires, plus particulièrement sur la retraite anticipée et la bonification pour enfants ouverte aux femmes ayant plus de quinze ans d'ancienneté et trois enfants au moins, mais fermée aux hommes par les articles L. 12 et L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite, l'article 48 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites et l'article 136 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2004 ont maintenu des dispositions expressément rétroactives et ont fixé des conditions d'interruption d'activité que seules les mères peuvent remplir en pratique. En effet, si ces textes ont bien modifié les conditions permettant le départ anticipé à la retraite des parents de trois enfants en étendant cette possibilité aux hommes tout en posant la même condition de durée d'interruption d'activité pour chaque enfant, le droit accordé aux hommes de prendre un congé parental n'existe que depuis 2002. Dans ces conditions, de nombreux pères de familles n'ont pas la possibilité de faire valoir ces droits. Il lui demande donc quelles mesures compte prendre le Gouvernement pour que cette situation discriminante cesse.
Les dispositifs de retraite anticipée et de majoration de retraite doivent répondre aux conditions posées dans le code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR), spécialement aux articles L. 24 et R. 37 pour la retraite anticipée, aux articles L. 12b et R. 13 pour les bonifications pour enfants. L'auteur de la question s'interroge notamment sur la condition d'interruption ou de réduction d'activité de deux mois au moins à l'occasion de chaque naissance ou adoption, posée dans le code des pensions civiles et militaires de retraite, pour pouvoir bénéficier de ces dispositifs. La prise d'un congé parental, ouverte aux hommes comme aux femmes dans la fonction publique depuis 1984 (cf. article 54 de la loi no 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat), n'est pas la seule modalité d'interruption ou de réduction d'activité offerte pour pouvoir bénéficier de ces dispositifs : s'y ajoutent le congé pour adoption, le congé de présence parentale, la disponibilité pour élever un enfant de moins de 8 ans, ainsi que le temps partiel. Toutes ces possibilités d'interruption ou de réduction d'activité sont ouvertes aux hommes comme aux femmes. Ainsi, les pères fonctionnaires ne sont pas exclus de l'application des dispositifs précédemment décrits, mais peuvent en bénéficier, sous réserve de satisfaire aux mêmes conditions d'interruption ou de réduction d'activité que les mères fonctionnaires. Sur le sujet d'éventuelles discriminations, directes ou indirectes, en matière de droits à pension des agents publics français, la Commission européenne a produit, suite à une procédure d'infraction (n° 2004-4148) introduite à l'encontre de la France, un avis motivé C (2009) 4762 en date du 25 juin 2009 relatif à de possibles discriminations sexistes dans le prolongement de l'affaire Griesmar (arrêt de la Cour de justice des communautés européennes en date du 29 novembre 2001, affaire C-366/99, M. Joseph Griesmar). Après réponse de la France, la Commission a classé, par décision du 6 avril 2011, son avis motivé précité du 25 juin 2009. L'article 22 de la loi « retraites » de 2014 a prévu que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l'évolution des droits familiaux afin de mieux compenser les effets de l'arrivée d'enfants au foyer sur la carrière et les pensions des femmes. Cet article a trouvé son application dans le rapport sur les droits familiaux de retraite de M. Bertrand Fragonard, président du Haut Conseil de la famille, remis au Gouvernement en février 2015, puis transmis au Parlement le 25 mars 2015. Ce rapport constate que, tous régimes confondus, les droits à pension des mères de famille sont moindres que ceux des hommes compte tenu d'une activité professionnelle plus réduite et des inégalités salariales entre les sexes. Il observe que les droits familiaux de retraite (majorations de durée d'assurance et de pension, départ anticipé en retraite) ont un effet correcteur en ce qu'ils permettent de réduire l'écart de pension entre les femmes et les hommes, mais que, pour autant, il n'en reste pas moins qu'après application de ces mécanismes de compensation, la pension moyenne des femmes s'élève à seulement 60 % de celles des hommes (pour la génération 1946). Le rapport indique que cet écart devrait se réduire à long terme mais lentement, puisqu'à l'horizon 2040, la pension moyenne des femmes nées dans les années 1970 devrait être encore inférieure de 20 % à celle des hommes. Enfin il propose plusieurs leviers d'action : développer la promotion de l'activité et des salaires des femmes et refondre des droits familiaux de retraite, notamment sous l'angle de l'équité inter-régimes. Ces propositions seront analysées en tenant compte des avancées salariales intervenues dans l'intervalle et des effets des diverses actions menées par le Gouvernement depuis plusieurs années en faveur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, tant dans le secteur privé que dans le secteur public.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.