M. Luc Chatel interroge M. le ministre de la défense sur les nombreux dysfonctionnements engendrés par le logiciel de paiement des soldes Louvois (logiciel unique à vocation interarmées de la solde). Le ministre a annoncé en octobre dernier une série de mesures exceptionnelles visant à remédier au retard de paiement de centaines de milliers de soldes du personnel de l'armée, parmi lequel la mise à disposition d'un fonds d'avance de 30 millions d'euros destiné à remédier aux lourdes difficultés de trésorerie rencontrées par les militaires et leurs familles, et la mise en place d'une plateforme téléphonique « Urgence solde ». Ces mesures avaient pour but d'apporter une réparation à chaque situation avant Noël 2012. Aujourd'hui, alors qu'une partie des problèmes a pu être réglée, de nombreuses familles sont encore dans l'incertitude et attendent le versement de leur solde impayée, pendant que d'autres s'inquiètent d'un trop-perçu qu'il leur sera demandé de rembourser. Il lui demande donc, d'une part, de lui indiquer quels sont les moyens mobilisés pour mettre un terme au plus vite à ces dossiers en souffrance, et de l'autre de faire la lumière sur les erreurs qui ont permis que perdurent pendant plus d'un an ces dysfonctionnements aux conséquences graves pour notre armée.
Dans le cadre d'une réforme de la fonction ressources humaines (RH) du ministère de la défense, a été mis en service, au mois d'octobre 2011, le logiciel Louvois (LOgiciel Unique à VOcation Interarmées de la Solde), un calculateur de rémunération « raccordé » aux systèmes d'information des ressources humaines (SIRH) des armées, dans lesquels se trouvent les données nécessaires au calcul de la solde. Ce logiciel, qui avait initialement vocation à calculer la solde des militaires des armées, des services interarmées et de la gendarmerie, vise à remplacer les chaînes autonomes de traitement de la solde. Ce projet de grande ampleur s'est inscrit dans une démarche complexe et risquée. Complexe, parce que le calcul de la solde des militaires obéit à des règles particulières, nombreuses, parfois anciennes, qui correspondent à la grande diversité de leurs compétences, de leurs situations et des missions qui leur sont confiées ; risquée, parce qu'elle touchait à la rémunération et que, dans ce domaine, tout retard ou toute anomalie prend tout de suite, légitimement, des proportions importantes. En dépit de ces éléments qui ne pouvaient être ignorés, la méthode adoptée par le précédent Gouvernement pour le déploiement du logiciel Louvois est identique à celle appliquée à la conception et l'ouverture à marche forcée des bases de défense (BdD). Cette politique de la précipitation, dispensée d'évaluations préalables et d'études d'impact, a eu pour conséquence, lors de la brutale bascule informatique des soldes, l'émergence de difficultés majeures de fonctionnement et le mécontentement légitime du personnel directement affecté. Là encore, le précédent Gouvernement, qui n'avait pas pris toute la mesure des risques et de la complexité de ce projet, a alors tardé à réagir lorsque les premières difficultés sont apparues. Conscient de ces graves dysfonctionnements et les jugeant inacceptables, le ministre de la défense a estimé que le système devait être stabilisé sans délai et les difficultés sérieusement prises en compte. Il a demandé un état des lieux précis des dossiers encore en souffrance, afin que tous les moyens nécessaires à leur régularisation soient mis en oeuvre. Dans cette même dynamique, il a présenté, le 25 septembre dernier, au centre expert RH soldes de l'armée de terre de Nancy (CERHS), un plan d'action opérationnel le jour-même, se concrétisant par : - le renforcement des effectifs du CERH-S pour lui permettre de traiter de façon satisfaisante toutes les demandes dans un délai raisonnable ; - la mise en place, depuis le 1er octobre dernier, d'un numéro vert accessible aux militaires et à leurs familles afin de répondre directement à toutes leurs questions et de les accompagner dans le traitement de leur dossier. Près de 25 000 appels et courriels ont été enregistrés à ce jour. Ils ont donné lieu à l'ouverture d'environ 10 000 dossiers au profit des administrés. Ce numéro vert permet également de donner l'alerte en temps réel sur les incidents de paye pouvant encore survenir ; - la création d'un « groupe utilisateurs » rassemblant les acteurs de la solde du ministère, les représentants des militaires et de leurs familles, et auquel est associé le conseil supérieur de la fonction militaire ; - l'instauration d'un contrôle mensuel de la fonction solde permettant une double remontée des incidents, à la fois par la chaîne de commandement et par la chaîne solde ; - l'établissement d'un dispositif spécifiquement dédié au suivi du versement des soldes et des primes du personnel de retour d'opérations extérieures (OPEX), s'inscrivant dans le devoir de reconnaissance de la Nation envers celles et ceux que leur engagement expose à de difficiles et périlleuses missions. Pour accompagner ces actions, le ministre a décidé la création d'une mission d'appui avec le déploiement d'équipes de spécialistes dans toutes les bases de défense afin que l'ensemble des dysfonctionnements puisse être clairement identifié, pris en compte et résolu dans les plus brefs délais. Par ailleurs, le 30 octobre dernier, le ministre a annoncé la mise en place d'une procédure exceptionnelle d'urgence pour que tous les militaires vis-à-vis desquels l'État a une dette soient payés immédiatement par le centre interarmées d'administration de la solde sur fonds d'avance, lorsqu'ils en font la demande. Près de 29 millions d'euros ont été versés depuis l'instauration de ce dispositif, qui se poursuit au titre de l'année 2013. En outre, les conseillers sociaux et juridiques du ministère ont été pleinement mobilisés afin d'assister techniquement les militaires et leurs familles qui sollicitent leur concours. Dans le même temps, le ministre de la défense s'est efforcé de sensibiliser les opérateurs bancaires aux difficultés auxquelles la communauté militaire est temporairement susceptible d'être confrontée. Il s'est de plus rapproché, dès le mois de décembre dernier, de son homologue chargé du budget pour que soient étudiées les solutions de nature à garantir une juste appréciation de la situation des militaires au regard du calcul et des modalités de recouvrement de leur impôt sur le revenu. Enfin, un plan d'action décliné en une dizaine de chantiers majeurs couvrant l'intégralité du spectre de la fonction solde est en cours de définition. A cet égard, une attention particulière sera portée aux domaines suivants : gouvernance de l'ensemble des composantes du dispositif, pilotage fonctionnel de la chaîne, suivi comptable et réglementaire, pilotage des systèmes d'information et gestion du référentiel métier. Le ministre de la défense veille personnellement à l'application de l'ensemble de ces mesures.
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