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Michèle Bonneton
Question N° 16287 au Ministère de l'économie


Question soumise le 22 janvier 2013

Mme Michèle Bonneton attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les produits d'investissements locatifs défiscalisés dans des résidences de tourisme qui sont proposés depuis quelques années aux contribuables, portant sur la TVA ou sur l'impôt sur le revenu selon différentes durées et différentes modalités (loueur en meublé non professionnel, « Censi-Bouvard » etc...). L'impact, en termes de coût pour les finances publiques de ce qui peut être considéré comme une niche fiscale, et d'avantages en termes de retombées économiques reste à cerner. À ce jour, aucune évaluation du dispositif dit « Censi-Bouvard », qui vient pourtant d'être reconduit jusqu'en 2016, n'a été publiée. Par ailleurs, de manière récurrente, des investisseurs protestent contre le fait que les dispositifs de protection vis-à-vis des promoteurs, des vendeurs ou des gestionnaires de ces biens immobiliers sont notoirement insuffisants. Après les défaillances en cascade de plusieurs sociétés gestionnaires de résidences de tourisme, notamment dans les Alpes et les Pyrénées, des copropriétaires d'appartements se sont retrouvés dans des situations financières périlleuses suite au non-paiement des loyers. On assiste également à des pratiques regrettables : surfacturation des biens immobiliers de la part des promoteurs, chantage à la diminution des loyers, notamment en fin de bail. Ce qui pouvait apparaître comme une opération de revitalisation du tourisme et des résidences de service semble servir des objectifs de rentabilité de court terme de quelques promoteurs immobiliers, au détriment des investisseurs et des communes concernées dont certaines se trouvent confrontées à des défaillances de leur parc touristique. Dans le pire des cas, on a assisté à une utilisation frauduleuse des dispositifs de défiscalisation : c'est le cas de l'affaire «Apollonia» qui fait l'objet d'une procédure judiciaire. Aussi, elle demande, si le Gouvernement est prêt à publier une évaluation des dispositifs de défiscalisation immobilière afin d'en cerner le coût et les avantages pour l'économie française et s'il envisage pour défendre les investisseurs, d'encadrer les pratiques des promoteurs, banques et gestionnaires de parc intervenant dans les montages de défiscalisation.

Réponse émise le 4 juin 2013

Les dispositifs fiscaux d'incitation à l'investissement immobilier locatif répondent à des objectifs de politique publique tant en termes de production de logements neufs que de soutien aux secteurs de l'immobilier et de la construction, secteurs d'activités très créateurs d'emplois peu délocalisables. A ce titre, et par la contrepartie exigée des investisseurs pour bénéficier de l'avantage fiscal, les différents dispositifs qui ont été successivement mis en place ont contribué, d'une part, à répondre structurellement aux besoins croissants de la population en logements par la mise sur le marché locatif de logements à loyers encadrés et d'autre part, à soutenir conjoncturellement l'activité du secteur du bâtiment dans un contexte de crise économique. Pour autant, compte tenu du coût de chacun de ces dispositifs pour la collectivité nationale, les pouvoirs publics prennent en compte l'ensemble de leurs effets directs et de leurs impacts économiques et sociaux, y compris en matière de protection des investisseurs, pour en apprécier l'utilité et en améliorer l'efficience. A cet effet, conformément aux dispositions de l'article 12 de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, les dispositifs fiscaux en faveur de l'investissement immobilier locatif ont fait l'objet d'une évaluation dans le cadre général de l'exercice d'évaluation de l'ensemble des dépenses fiscales et des niches sociales en vigueur à la date de publication de cette loi. En outre, le Parlement a conduit également des travaux d'évaluation des dépenses fiscales. C'est d'ailleurs à la suite du travail d'évaluation des dispositifs fiscaux en faveur de l'investissement immobilier engagé par la commission des finances du Sénat que l'article 92 de la loi de finances pour 2011 (n° 2010-1657 du 29 décembre 2010) a été adopté. Cette disposition a supprimé par anticipation la réduction d'impôt sur le revenu au titre des investissements réalisés dans le secteur du tourisme, dite « Demessine », dès le 1er janvier 2011 pour sa partie acquisition, tout en la maintenant pour sa partie rénovation jusqu'à son extinction programmée au 31 décembre 2012. En effet, la commission des finances du Sénat a dressé un constat d'échec de ce dispositif, tant sur le plan de l'efficacité de la dépense publique en matière de développement touristique que sur celui de la protection des investisseurs. Par ailleurs, et en vue de permettre aux investisseurs concernés de mieux mesurer la portée des engagements qu'ils contractent en contrepartie de l'avantage fiscal qui leur est promis, l'article 28 de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation prévoit que toute publicité relative aux opérations d'acquisition de logements susceptibles de bénéficier d'un des dispositifs fiscaux en faveur de l'investissement immobilier locatif, doit mentionner que le manquement à l'engagement de location du bien concerné expose au risque de déchéance de l'avantage fiscal correspondant. Enfin, la jurisprudence de la Cour de cassation permet, dans certaines situations caractérisant un manquement par les professionnels concernés à leur obligation d'information et de conseil à l'égard des clients auxquels ils ont vendu un bien immobilier locatif afin de leur permettre de bénéficier d'un avantage fiscal, d'agir en responsabilité contre les personnes concernées en vue d'obtenir réparation du préjudice subi, notamment à raison de la perte de l'avantage fiscal (Cour de cassation, 3e chambre civile, arrêt du 11 mai 2010, n° 09-14276). Dans les cas les plus graves, des poursuites pénales sont susceptibles d'être engagées. Tel est le cas dans l'affaire Apollonia évoquée par l'auteur de la question, pour laquelle une information judiciaire est ouverte au tribunal de grande instance de Marseille mettant en cause le fonctionnement de cette société, certains de ses membres et de ses relations d'affaires. Diverses personnes - personnes physiques surtout et personnes morales - ont à ce jour été mises en examen des chefs d'escroquerie en bande organisée, faux et usage de faux, abus de biens sociaux, activité illégale d'intermédiaire en opération de banque, entrave à l'exercice de l'activité de commissaire aux comptes et recel. Il appartient bien entendu aux autorités judiciaires territorialement compétentes saisies de l'affaire d'apprécier les suites qu'il convient de lui donner. Ces précisions sont de nature à répondre aux préoccupations exprimées.

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