Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Paul Salen
Question N° 1789 au Ministère du budget


Question soumise le 24 juillet 2012

M. Paul Salen attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la constitutionnalité de la rétroactivité de la taxation des heures supplémentaires. Le principe de non-rétroactivité des lois n'a de valeur constitutionnelle qu'en matière répressive ; pour autant le juge constitutionnel encadre le principe de rétroactivité des lois, en matière fiscale, en le subordonnant, notamment, à la notion d'intérêt général suffisant comme il le fait dans sa décision n° 2005-530 DC (29 décembre 2005) qui dans son 45e considérant dispose : « Considérant, en second lieu, qu'il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions ; que, ce faisant, il ne saurait toutefois priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ; qu'en particulier, il méconnaîtrait la garantie des droits proclamés par l'article 16 de la Déclaration de 1789 s'il portait aux situations légalement acquises une atteinte qui ne soit justifiée par un motif d'intérêt général suffisant ». Cette position est rappelée à de maintes reprises par le Conseil constitutionnel dans ses Décisions ultérieures (décision n° 2007-550 DC du 27 février 2007, décision n° 2009-599 DC du 29 décembre 2009, décision n° 2010-4-17 QPC du 22 juillet 2010, décision n° 2010-102 QPC du 11 février 2011, décision n° 2011-141 QPC du 24 juin 2011). Aujourd'hui, en France, 50 % des foyers fiscaux perçoivent un revenu inférieur à 2 400 €/mois. À ce jour, 5,6 millions de foyers fiscaux bénéficient des exonérations fiscales sur les heures supplémentaires ce qui constitue un complément de revenu indispensable. Sur ces foyers, un peu plus de 3 millions gagne moins de 27 000 € par an et pour 1,4 million d'entre eux moins de 17 500 € par an. La taxation des heures supplémentaires, à compter du 1er septembre 2012, représente une ponction de 2,3 milliards d'euros opérée sur les salariés qui, comme on vient de le rappeler, ne sont pas les plus aisés puisque seuls 800 000 foyers perçoivent plus de 58 000 € par an. Il apparaît ainsi de manière évidente que, compte tenu de la situation réelle des foyers bénéficiant de la détaxation des heures supplémentaires, l'abrogation rétroactive de celle-ci ne satisfait pas à la notion d'intérêt général suffisant tel que développée par le Conseil constitutionnel. En conséquence, il lui demande si elle partage son analyse et si le Gouvernement entend, afin de respecter les principes constitutionnels, modifier son texte.

Réponse émise le 15 janvier 2013

L'article 3 de la loi de finances rectificative pour 2012, du 16 août 2012, a notamment supprimé l'exonération d'impôt sur le revenu des heures supplémentaires et complémentaires de travail codifiée sous l'article 81 quater du code général des impôts (CGI). Cette suppression prend effet pour les heures supplémentaires effectuées à compter du 1er août 2012. Cette entrée en vigueur n'est donc pas rétroactive. Dans sa décision n° 2012-654 DC du 9 août 2012 le Conseil constitutionnel a confirmé que cette disposition était conforme à la Constitution car elle n'affectait pas une situation légalement acquise et n'était dès lors pas contraire à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. La mesure adoptée par le Parlement a ainsi permis de mettre fin à une disposition très coûteuse pour les finances publiques et contraire à l'objectif de lutte contre le chômage, tout en laissant inchangé le régime des heures supplémentaires réalisées avant le vote de la loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion