M. Yannick Favennec attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les politiques de soutien aux agrocarburants. Les différentes mesures mises en œuvre dans ce cadre ont des impacts sur le droit à l'alimentation des populations du sud et contribuent à la volatilité des prix des denrées alimentaires, ainsi qu'au phénomène d'accaparement des terres. Aussi, il conviendrait de supprimer les objectifs d'incorporation d'énergie renouvelable dans le secteur des transports aussi longtemps que la recherche ne propose pas d'agrocarburants n'ayant pas d'impact sur le plan alimentaire et environnemental. Il conviendrait également de ne pas accorder d'avantages fiscaux aux distributeurs français de carburants qui encouragent la production d'agrocarburants au détriment des populations du sud. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures elle entend prendre pour développer les agrocarburants tout en préservant le droit des populations du sud à s'alimenter.
La directive 2009/28/CE relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables et la directive 2009/30/CE concernant les spécifications relatives à l'essence, au carburant diesel et au gazole ainsi que l'introduction d'un mécanisme permettant de surveiller et de réduire les émissions de gaz à effet de serre, prévoient notamment : - l'instauration d'un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre produites sur l'ensemble du cycle de vie des carburants de 10 % en 2020 ; - l'instauration d'un objectif d'utilisation d'énergies renouvelables dans le bouquet énergétique de 23 % et de 10 % dans le secteur des transports en 2020. En France, le Plan national d'action en faveur des énergies renouvelables prévoit que les biocarburants apporteront la contribution la plus importante cet objectif européen pour les transports à l'horizon 2020. En effet, les alternatives, comme la pile à combustible (PAC) ou le véhicule électrique, ne seront pas en mesure de contribuer significativement à cet objectif à court terme en raison du stade trop peu avancé de leur développement. Pour cela, le Plan national d'action a fixé des objectifs d'incorporation de biocarburants dans les carburants traditionnels d'origine fossile de 2005 à 2010. L'objectif d'incorporation de 5,75 % en énergie de biocarburants dans les carburants traditionnels d'origine fossile, initialement prévu pour 2010 par la directive européenne 2003/30/CE, a été avancé à 2008 et porté à 7 % en énergie pour 2010. Lors de la Conférence environnementale pour la transition écologique de septembre 2012, le Gouvernement, conscient des difficultés que les biocarburants de première génération peuvent poser en termes d'utilisation des sols, a annoncé que l'objectif d'incorporation des biocarburants resterait plafonné à 7 %. Cette limitation permet de se donner le temps d'évaluer les conséquences de l'usage de biocarburants, notamment dans le cadre de la révision de la directive, sans mettre en péril cette filière qui participe à la transition énergétique, et dont les débouchés industriels sont intéressants pour la France. Après l'atteinte de cet objectif dans chacune des filières, les objectifs devraient être relevés progressivement avec le concours des biocarburants issus de déchets ou de résidus, puis avec les biocarburants avancés. Pour cela, le Gouvernement a engagé des actions volontaristes. La recherche sur les biocarburants de 2e et 3e générations est privilégiée parallèlement aux filières actuelles. En effet, les limites physiques et économiques de production des biocarburants de 1re génération, notamment en matière de rendement à l'hectare et de protection des débouchés alimentaires, conduisent les pouvoirs publics à soutenir la recherche et le développement des biocarburants avancés de 2e et 3e génération. Les biocarburants de 2e génération utilisent l'intégralité de la lignocellulose des plantes ou de la biomasse : bois, paille, résidus agricoles et forestiers et cultures dédiées. Ces cultures dédiées n'entreront plus en concurrence directe avec les cultures vivrières. Les biocarburants de 3e génération sont issus des algues cultivées soit en milieu ouvert, soit en bioréacteur. Ces filières du futur se développent avec de nouveaux procédés industriels utilisant des sources de biomasse non destinées à l'alimentation humaine ou animale. Les biocarburants avancés n'ont pas encore atteint le stade industriel et sont encore au stade de la recherche et du développement. En France, les premières productions industrielles sont escomptées avant la fin de la décennie. En outre, la Commission européenne travaille actuellement sur la mise à jour des directives susmentionnées, afin d'intégrer les effets du changement d'affectation des sols indirect (CASI). Pour tenir compte de ce phénomène, et limiter les effets des politiques en faveur des biocarburants sur les prix des matières premières destinées à l'alimentation humaine, la Commission propose de limiter la part des biocarburants issus de matières premières alimentaires. Dans ce contexte, le Gouvernement a décidé de marquer une pause dans le développement des biocarburants de première génération, ainsi que l'a annoncé le Premier ministre dans son discours de clôture de la Conférence environnementale des 14 et 15 septembre 2012. Pour l'atteinte de l'objectif d'incorporation de 10 % d'énergies renouvelables dans les transports à l'horizon 2020, la production de biocarburants de deuxième génération, qui n'entrent pas en concurrence avec l'usage alimentaire de la biomasse, devra donc prendre le relais. En cohérence avec cette réorientation de notre politique de soutien, la diminution de la défiscalisation des biocarburants sera graduellement mise en oeuvre en 2014 et 2015, avant extinction totale en 2016. Cette trajectoire responsable permet à l'outil industriel de s'adapter progressivement sans provoquer d'impact trop important sur l'emploi dans le contexte de crise économique que nous connaissons.
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