M. Joël Giraud attire l'attention de Mme la ministre de la réforme de l'État, de la décentralisation et de la fonction publique sur le « délai de carence » dans la fonction publique instauré par la loi de finances pour 2012. Cette disposition prévoit de fait que le fonctionnaire ne perçoit pas sa rémunération au titre du premier jour de congé de maladie ordinaire. Depuis son instauration en décembre 2011, le SNUCLIAS-FSU, syndicat de la fonction publique territoriale, est farouchement mobilisé contre cette journée de carence imposée sans dialogue social aux agents publics. Il considère cette mesure comme doublement inéquitable. Premièrement, cette disposition ne rapproche pas le statut des agents publics de celui des salariés du privé, contraints à trois jours de carence. En réalité, la majorité d'entre eux, grâce à des accords d'entreprise ou à des conventions collectives, ont ces trois jours pris en charge par leurs employeurs. La vraie équité consisterait à ce que les salariés restants soient aussi pris en charge. Deuxièmement, la fonction publique territoriale est composée de 77 % d'agents de catégorie C à faibles revenus qui sont les premiers touchés par cette mesure inique. En effet, ces agents aux métiers pénibles et accidentogènes, sont sujets à des arrêts de travail plus fréquents dont le premier jour ne leur sera systématiquement plus payé, avec la plupart du temps une incidence négative sur le montant de leur régime indemnitaire et une aggravation de leur santé, beaucoup d'entre eux repoussant de ce fait les soins dont ils auraient besoin. Sous couvert d'une prétendue équité, cette mesure est inefficace sur le plan économique car les retenues sur le traitement des fonctionnaires ne seront pas reversées au budget de la sécurité sociale, bien au contraire : moins de salaire génèrera moins de cotisations sociales, donc moins de moyens pour la protection sociale. De plus cette décision unilatérale et autoritaire, instaurée sans concertation par l'article 105 de la loi de finances de décembre 2011, est en contradiction totale avec l'art 57 de la loi du 26 janvier 1984 régissant le statut des fonctionnaires qui dispose que les agents conservent l'intégralité de leur traitement pour trois mois et un demi-traitement pendant neuf mois en cas de maladie ordinaire. Elle porte attaque directement au statut général de la fonction publique en modifiant la loi sans demander l'avis des conseils supérieurs (État, hospitalier, territorial) ou du conseil commun pour les trois fonctions publiques pourtant récemment installé en 2012, s'exonérant ainsi du minimum de dialogue social réglementaire avec les organisations syndicales et du respect vis-à-vis des représentants des personnels. L'actuel Gouvernement, plutôt que d'annoncer sa suppression comme il l'avait envisagé, a émis l'hypothèse de faire payer cette journée de carence par les mutuelles de fonctionnaires. Cette hypothèse n'est à l'évidence pas bien accueillie par les personnels concernés. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir envisager de réfléchir à l'abrogation de cette mesure.
Le Gouvernement a décidé d'abroger la journée de carence dans la fonction publique mise en place par le précédent Gouvernement dans le cadre de la loi de finances pour 2012. Un an après la création du jour de carence, un premier bilan du dispositif a été établi et démontre que le jour de carence n'a pas les effets que l'ancien Gouvernement escomptait : - En termes d'équité : plus de deux tiers des salariés du privé bénéficient d'une prise en charge des jours de carence en application d'une convention de branche ou d'entreprise. Le jour de carence dans la fonction publique a lui privé de toute rémunération 100 % des agents publics pour le premier jour de leur arrêt maladie. - En ce qui concerne un éventuel recul de l'absentéisme, dont les dernières statistiques publiées par le ministère du travail prouvent qu'il n'est pas plus important dans le secteur public que dans le secteur privé, les effets ne sont pas démontrés : le nombre de congés maladie est resté quasi stable à l'Etat en 2012 et plus des deux tiers des agents ayant eu un jour de carence n'ont eu qu'un arrêt maladie dans l'année. Il n'est pas mis en évidence de recul significatif généralisé des arrêts de courte durée entre 2011 et 2012 : la proportion d'agents en arrêt court est passée de 1,2 % à 1,0 % dans la fonction publique de l'Etat, de 0,8 % à 0,7 % dans la fonction publique hospitalière mais est restée stable dans la fonction publique territoriale à 1,1 %. Si chez certains employeurs, le nombre d'arrêts a pu diminuer, on observe aussi un allongement de la durée des congés maladie. - Les économies budgétaires sont quant à elles bien moins importantes que prévues : la mesure a rapporté 60 M€ à l'Etat alors qu'elle avait été évaluée à 120 M€. Cette décision sera traduite par une mesure législative qui sera proposée dans le prochain projet de loi de finances présenté au Parlement. La nécessaire recherche de l'équité entre fonctionnaires et salariés implique cependant que les arrêts maladie soient soumis, dans tous les cas, à un régime de contrôle identique et à un renforcement des mesures contre les arrêts abusifs. A cet effet, la généralisation d'un dispositif de contrôle des arrêts médicaux de moins de six mois sera proposé. Par ailleurs, l'obligation de transmission, dans les 48 heures suivant le début de l'arrêt de travail, du certificat ouvrant droit au congé maladie sera strictement contrôlée et renforcée. Le non-respect de cette obligation entraînera une retenue sur salaire. Enfin, la prévention des arrêts de travail liés à l'exposition aux risques professionnels et aux conditions de travail des agents publics sera une priorité dans le cadre de la concertation sur l'amélioration de la qualité de vie au travail qui a été ouverte avec les organisations syndicales représentatives de la fonction publique.
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