M. François Loncle interroge Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur la protection des ours polaires qui sont menacés de plusieurs dangers. Ces grands mammifères carnivores, originaires des régions arctiques et vivant sur la banquise, se répartissent dans cinq régions, l'Alaska, le Groenland, la Russie, la Norvège et le Canada. On en dénombre environ 22 000, principalement présents au Canada et en Alaska. Sur les 19 sous-populations, 8 sont en déclin. Ainsi, le nombre des ours de l'ouest de la baie d'Hudson a diminué de 22 % au cours des deux décennies écoulées. Leur masse corporelle s'est également réduite de moitié en 40 ans. Tout d'abord, ces plantigrades sont la proie d'un commerce en expansion. Entre 2001 et 2010, plus de 32 000 spécimens ont été commercialisés. Les quotas de leur chasse ont été relevés au Canada, bien qu'ils y soient considérés comme une « espèce préoccupante ». Non seulement leurs peaux, mais aussi leurs griffes et leurs dents sont convoitées par des marchands cupides. Les ours polaires doivent, en outre, affronter une modification importante de leur environnement naturel. D'une part, les matières toxiques répandues dans la mer affectent leur alimentation. D'autre part, leur habitat ne cesse de se restreindre, en raison de la fonte de la banquise provoquée par le réchauffement climatique. Des experts américains estiment que, si ce phénomène se poursuit au même rythme, la population des ours blancs pourrait diminuer des deux tiers d'ici à 2050 et totalement disparaître en un siècle. En conséquence, les États-unis ont inscrit le spécimen d'Alaska sur la liste nationale des espèces protégées. La prochaine réunion de la conférence des membres de la convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) abordera cette question. Aussi, il aimerait savoir si elle envisage de demander, à l'instar des États-unis, de la Russie, de l'Autriche et de l'Allemagne, l'inscription de l'ours polaire à l'annexe I de la CITES, ce qui permettrait d'interdire le commerce international de ces mammifères, tout en ne remettant pas en cause la pratique de la chasse de subsistance traditionnelle par les Inuits.
L'objectif de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) est de garantir qu'aucune espèce ne fasse l'objet d'une exploitation non durable du fait du commerce international. A cette fin, les dispositions de l'annexe II, à laquelle l'ours polaire est inscrit depuis 1975, conditionnent chaque transport avec passage en frontière de tout spécimen ou produit issu de spécimen à la présentation de permis. Ceux-ci, délivrés aux cas par cas, certifient d'une part que les spécimens ont été acquis légalement et d'autre part, que l'expédition en question ne porte pas préjudice à l'état de conservation de l'espèce, ni à l'étendue du territoire qu'elle occupe. Ces règles destinées à prévenir la surexploitation commerciale des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction sont complétés par divers dispositifs permettant à la communauté internationale de repérer les anomalies et de contraindre, le cas échéant, le pays en cause à réduire, voire supprimer ses exportations. Si, en dépit de cet encadrement strict du commerce, l'examen des données scientifiques les plus récentes établi que l'espèce est menacée par le commerce international, la CITES prévoit que l'espèce doit être transférée à l'annexe I. Pour évaluer cette possibilité de transfert, la Convention a fixé plusieurs critères concernant à la fois l'aire de répartition de l'espèce, ses effectifs et l'évaluation de son déclin. Lors de la 16e session de la Conférence des parties à la CITES qui s'est tenue du 3 au 14 mars 2013 à Bangkok, les États-Unis ont proposé d'inscrire l'ours polaire à l'annexe I. Toutefois, le Groupe des spécialistes de l'UICIN, l'Unité scientifique du Secrétariat CITES et le Muséum national d'histoire naturelle s'accordaient sur le fait que les critères de l'annexe I n'étaient pas remplis. En effet, avec plus de 20 000 individus, les effectifs de l'espèce ne sont pas faibles, son aire de répartition couvrant plusieurs millions de kilomètres carrés n'est pas restreinte et le déclin signalé par le recensement de 2009 pour 8 des 19 populations d'ours polaires apparaît nettement en-deçà des seuils fixés par la CITES. Actuellement, seul le Canada qui détient plus de 84 % des ours polaires, exporte des spécimens à des fins commerciales. En l'occurrence, il s'agit de sous-produits d'une chasse de subsistance qui persisterait à l'identique si l'espèce était transférée à l'annexe I. De l'avis des scientifiques, le taux de prélèvement de 3 à 4 % de ces animaux au Canada n'affecte pas l'espèce. Par ailleurs, les avis des pays de l'aire de répartition de l'ours polaire sur cette proposition étaient partagés La Fédération de Russie soutenait la proposition des États-Unis, mais les trois autres États concernés (Canada, Danemark, Norvège) y étaient opposés. Ils considéraient que le transfert de l'ours polaire à l'annexe I risquait de priver les communautés locales de revenus, d'être perçu comme une sanction et par conséquent, de remettre en cause la collaboration active que ces communautés accordent aux programmes locaux de conservation de l'espèce. Aussi, compte tenu de ces éléments, l'Union Européenne a tenté de rapprocher les points de vue, en soumettant une proposition alternative de compromis. Elle incitait les cinq États concernés à communiquer le maximum d'informations sur la situation réelle de leurs populations d'ours polaires et sur leurs mesures nationales de gestion. Le dernier recensement des ours polaires date de 2009 et le prochain sera disponible en 2014, Ces chiffres, ainsi que les informations transmises par les pays de l'aire de répartition, permettront de prendre une décision en toute connaissance de cause sur des fondements scientifiques solides. En attendant, la CITES permet, dans le contexte de l'annexe II à laquelle l'ours polaire figure actuellement, de prendre des mesures correctives immédiates, très concrètes et contraignantes à l'encontre des pays hébergeant l'espèce à l'état naturel si les scientifiques estiment que leurs exportations portent préjudice à l'espèce. Cette position équilibrée de l'Union européenne, à la fois exigeante et pragmatique, a été soutenue par la France et les pays membres de la convention ont décidé, le 7 mars 2013, de maintenir l'ours polaire à l'annexe II de la CITES. La France partage entièrement les préoccupations quant au devenir des ours polaires et mettra tout en oeuvre pour sauvegarder cette espèce. Le Président de la République a assuré, dans un courrier en date du 25 Février 2013 adressé à la Fondation Brigitte Bardot et rendu public, que « la France veillera également à ce que les contrôles et la répression des fraudes liées aux trafics d'espèces animales et de leurs parties soient renforcées, de façon à ce que les décisions adoptées dans le cadre de la CITES soient mieux appliquées et respectées ».
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