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Paul Salen
Question N° 1961 au Ministère de la justice


Question soumise le 31 juillet 2012

M. Paul Salen attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les éventuels problèmes posés par la fin de l'application des peines-planchers. Aujourd'hui, le sentiment d'impunité est le plus sûr moyen de voir la justice de plus en plus confrontée à des multirécidivistes confortés dans leurs « habitudes criminelles ». Sans déroger au principe d'individualisation des peines, puisque le texte offre la possibilité d'une modulation des peines prononcées compte tenu du caractère exceptionnel de l'infraction et des possibilités de réinsertion, la loi apportait des moyens d'actions nouveaux destinés à lutter plus efficacement contre la criminalité. L'incitation à un recours quasi systématique aux dérogations signe la fin des peines-plancher mais constitue aussi la marque du changement de politique avec une orientation moins répressive dont les résultats sont connus à l'avance si on se réfère à la période 1997-2002 au cours de laquelle l'insécurité avait progressé de plus de 17 %. Aussi, il lui demande si elle partage ses analyses et ce que le Gouvernement entend faire afin de maintenir un système pénal dissuasif capable de protéger les citoyens.

Réponse émise le 25 décembre 2012

Le dispositif des peines planchers a été une création de la loi du 10 août 2007 visant à renforcer la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs. La loi a ainsi fixé pour les majeurs des peines minimales d'emprisonnement en matière de délits (tribunal correctionnel) ou de crimes (cour d'assises) pour les auteurs en état de récidive légale. Pour faire une analyse de la pertinence de ce dispositif, il convient de savoir si une incarcération plus longue de quelques mois est un facteur de meilleure réinsertion et de prévention de la récidive. Il est fortement permis d'en douter. La garde des sceaux entend mettre en oeuvre l'engagement d'abroger les peines planchers, qui sont non seulement contraires au principe de l'individualisation des peines, fortement rappelé par la garde des sceaux dans sa circulaire pénale du 19 septembre 2012, mais qui en plus ne sont pas pertinentes contre la récidive. Leur impact a été en effet quasi nul sur le niveau des délits graves et des crimes alors qu'elles ont pour effet d'accroître les courtes peines de prison dont on sait qu'elles sont génératrices de récidive. Elles sont une illusion de sécurité que vient infirmer l'accroissement des faits de violences sous le précédent gouvernement. La sécurité doit venir de peines adaptées dans leur fermeté, exécutées avec célérité, aménagées dans un souci de responsabilisation du délinquant et d'action sur les causes du passage à l'acte. L'augmentation du temps d'incarcération, consécutive aux peines plachers, emporte par contre avec certitude une augmentation de la surpopulation carcérale qui produit des situations très dégradées, comme l'a illustré récemment la situation très précoccupante du centre de détention des Baumettes à Marseille. Cette surpopulation est en outre un facteur de dégradation des conditions de prise en charge de la population pénale par les personnels. Au final, ce qui est à l'oeuvre avec l'application des peines planchers est une logique d'éloignement de la société par l'enfermement, sans travail sur les causes de la délinquance. Il s'agit donc d'une réponse peu adéquate en matière de prévention de la récidive. Ce constat ne devant pas rester sans réponse, la garde des sceaux a initiée le 18 septembre 2012 un processus devant aboutir en février 2013 à une conférence de consensus sur la prévention de la récidive destinée, sur la base des études scientifiques menées en France et à l'étrangers, à mettre en lumière de manière pragmatique les outils les plus pertinents en matière de lutte contre la récidive. A la suite de ces travaux dont les résultats seront publiés le 15 février, le Gouvernement soumettra au parlement les dispositions législatives devant apporter des réponses efficaces en ce domaine, parmi lesquelles les peines planchers ne figurent pas.

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