Mme Pascale Crozon alerte M. le ministre de l'intérieur sur la situation des femmes étrangères bénéficiant d'un titre de séjour vie privée et familiale du fait du mariage. Afin notamment de lutter contre les mariages blancs, la loi impose une période de trois années durant laquelle la rupture de la vie commune est un motif de retrait du titre de séjour. Cette condition crée une inégalité de droits entre les conjoints, qui peut conduire à de nombreuses dérives. Le législateur a ainsi identifié le risque particulier de violences conjugales et y a partiellement répondu dans la loi du 9 juillet 2010. Toutefois, elle constate dans sa circonscription un nombre croissant de « mariages jetables », dans lesquels le conjoint Français ou résident demande le divorce et dénonce la rupture de la vie commune dans le seul objectif de mettre en oeuvre la procédure d'éloignement. Cette faculté offerte au conjoint non soumis à la condition de vie commune s'apparente de fait à un droit à la répudiation, les épouses devant dans bien des cas quitter le territoire français avant même d'avoir pu faire valoir leurs droits devant le juge aux affaires familiales. Elle lui demande comment le Gouvernement entend lutter contre ces effets pervers et s'il envisage de modifier les conditions de renouvellement du titre de séjour vie privée et familiale.
L'objectif, poursuivi par les pouvoirs publics, de lutter contre les détournements de procédure et les filières d'immigration, a conduit à renforcer les instruments juridiques mis au service d'une politique de maîtrise de l'immigration familiale sans porter atteinte à la liberté de mariage ni au droit des étrangers à se faire rejoindre par les membres de leurs familles. La difficulté est en effet de trouver des points d'équilibre et d'éviter les dérives. Le législateur a subordonné le droit au séjour de l'étranger conjoint d'un ressortissant français à la preuve de la durabilité de l'engagement matrimonial dans le but, bien compris, de lutter contre les mariages de complaisance. Les conditions auxquelles sont soumis le renouvellement des cartes de séjour temporaires et la délivrance des cartes de résident pour cette catégorie d'étrangers traduisent le souci de sécuriser juridiquement des situations matrimoniales stabilisées. C'est la raison pour laquelle il ne peut être envisagé d'y renoncer. Pour tenir compte des cas où les relations du couple sont empruntes de violence, le législateur a institué, par la loi no 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, un dispositif de protection renforcée. L'esprit de ce dispositif est de permettre au ressortissant étranger, victime de violences conjugales, de s'y soustraire tout en conservant son droit au séjour. Ces violences peuvent être, au demeurant, physiques ou psychologiques. Dans les hypothèses évoquées, où le conjoint étranger d'un ressortissant français ou même d'un ressortissant étranger résidant régulièrement sur le territoire, est soumis aux pressions exercées sur lui par son conjoint, il est généralement malaisé de caractériser ces pressions et de les établir. Ce n'est que lorsque de telles relations se prolongent par de la violence, matériellement constatée, que l'autorité préfectorale est en mesure d'agir pour garantir le droit au séjour des victimes. Par circulaire en date du 28 novembre 2012, portant admission exceptionnelle au séjour, il a été demandé aux préfets de faire une application bienveillante de ces dispositions. Le maintien du droit au séjour est lié à la continuité de la vie commune. Lorsque l'engagement d'une procédure de divorce a pour effet la rupture de la communauté de vie, le préfet statue sur la situation prévalant à la date à laquelle il prend sa décision. Si au jour où il décide de la délivrance ou du renouvellement du titre, le préfet constate que le conjoint étranger ne remplit pas la condition de la communauté de vie, il est, sauf en cas de violences conjugales, tenu de rejeter la demande. Toutefois, afin de ne pas méconnaître le droit de chacun à se défendre en justice, lorsque les nécessités de la procédure civile de dissolution du mariage impliquent la présence en France du conjoint étranger, le préfet peut décider le maintien temporaire de l'intéressé sur le territoire français. L'autorité préfectorale ne peut exercer aucun contrôle sur les motifs de dissolution des mariages conclus par un ressortissant français avec un étranger. Il est difficile d'établir que la séparation de ces couples obéit à des considérations tenant à la volonté du conjoint de remettre en cause le droit au séjour de l'autre conjoint. En tout état de cause, il n'appartient qu'au juge aux affaires familiales de se prononcer sur la licéité des motifs d'un divorce. Enfin, le préfet peut utiliser son pouvoir d'appréciation en vue de maintenir le droit au séjour du ressortissant étranger en examinant avec attention les éléments relatifs à la stabilité, à l'ancienneté et à l'intensité des liens personnels et familiaux que ce dernier a pu avoir en France afin d'éviter qu'un refus de séjour ne porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale du ressortissant étranger.
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